Dangereusement Engagés [Boy x Boy]

Chapitre 1

Samedi 10 février - Noé

Deux jours. Deux jours que je savais que j'avais un fils, et deux jours que Miles croyait qu'il était le sien. J'avais cru pouvoir supporter cela, mais au final, c'était bien plus compliqué que ce que je pensais. J'avais mal en voyant Nash appeler mon frère aîné « papa » alors que j'étais son créateur. Bien sûr, je n'interférai pas, je n'en avais pas le courage. J'avais déjà détruit mon frère involontairement six ans auparavant, je refusais de recommencer. Nash était son enfant, et puis je devais me faire à cette idée.

Ceci dit, j'étais celui qui y était probablement le plus attaché. Comme Miles était très occupé par son complexe hôtelier, je m'occupais de Nash à longueur de journée. Je n'avais pas besoin de retourner au studio avant le lendemain, pour accueillir le militaire dont il devait se charger pour la production de son documentaire. Noé n'était pas un grand acteur, mais il s'amusait bien lorsqu'il allait aider Ernest Moon pour gérer les acteurs dont il se chargeait, et j'étais un bon ami de Neth Emmingway, qui gérait le management. Les studios étaient comme une deuxième maison, même si j'aillais très rarement sous le feu des projecteurs. Après tout, je ne jouais que des rôles secondaires et je n'étais là que pour mettre la lumière sur l'acteur principal en général. Comme j'avais pris beaucoup de cours de théâtre pendant mon enfance et que je chantais apparemment très bien, je ne jouais que lorsque les protagonistes devaient aller dans un bar où quelqu'un devait aller sur scène. Je me demandais quelle réaction allait avoir Nash en voyant les lieux où la plupart des grands films avaient été tournés.

Mais pour l'instant, j'étais en ville, en train de parcourir toutes les boutiques de meubles de Los Angeles, pour réaménager la chambre de mon neveu. En effet, comme je gagnai plus d'argent que mon frère, malgré son énorme salaire mensuel, et que j'avais plus de temps libre, j'étais le plus apte à promener Nash pour qu'il puisse avoir son antre à lui. Apparemment, aussi, j'avais des meilleurs goûts esthétiques pour la décoration. Visiblement, ce n'était pas un problème pour ce petit brun qui me suivait à la trace, il semblait même adorer faire les boutiques, et critiquait absolument tout ce qu'il voyait : « Voilà une bien piètre table à repasser » m'avait-il dit en passant dans un coin ménager, ce qui m'avait décroché la mâchoire en passant. Soit l'enfant adorait tous les films du XIXème siècle, soit il avait eu une éducation en or et était surdoué. J'hésitai, très sincèrement. Ceci dit, un souffle d'espoir m'avait gonflé la poitrine en songeant que mon fils aurait sûrement un meilleur cerveau que moi. Peut-être lui enseignerais-je un jour l'art du chant, de la danse, et du théâtre, si cela l'intéressait.

-Oh, oncle Noé ?

-Oui ? répondis-je aussitôt en baissant les yeux vers lui.

-Est-ce qu'on pourrait laisser ma chambre telle qu'elle est maintenant ? J'aime beaucoup les chambres des grandes personnes.

Voilà comment j'étais arrivé à la conclusion que j'avais passé trois heures à faire les magasins inutilement, alors que je détestais faire du shopping. Dans la chambre qu'on avait dû lui attribuer, puisque mon appartement n'en contenait que trois, il y avait déjà un dressing encastré dans le mur, et un lit double, surmonté de deux tables de chevet en ébène. D'habitude, cette chambre servait à Lucas lorsqu'il venait en vacances chez Miles et moi, mais maintenant, c'était pour Nash. D'ailleurs, ceci me fit penser au fait que ni mon aîné ni moi n'avions prévenu notre cadet pour le prévenir qu'on avait un énergumène de cinq ans chez nous à garder jusqu'à la majorité au grand minimum. Je n'étais même pas certain de pouvoir le lâcher une fois qu'il serait adulte, en fait. Comment pourrais-je me détacher de cette adorable créature ? Je pris un instant pour fixer ses joues rondes et rosées sous la fraicheur hivernale, ses petites lèvres rougies et légèrement gercées –il faudrait que j'y remédie-, ses petits yeux océan qui ressemblaient énormément aux miens et à ceux de Luke.