Chapitre 24

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J'ouvris les yeux au moment où un grand bruit retentissait. Après les trois nuits que j'avais passées dans l'appartement, je commençais à avoir l'habitude de me réveiller dans le noir complet, le silence, sans repère, seule. Mais en général, j'étais tirée du sommeil par un mauvais rêve, par la douleur d'être couchée par terre ou bien sans raison particulière.

De nouveaux bruits étouffés me parvinrent. Je n'arrivais pas à déterminer exactement d'où ils provenaient. L'obscurité était presque totale, seule une mince lueur venue de l'extérieur se dessinait sur le mur. Je me redressai en sentant mon cœur s'accélérer. Il se passait quelque chose d'anormal.

Les bruits devinrent plus précis, et je compris qu'il s'agissait de pas dans l'entrée. Un chuchotement perça la nuit, me faisant frissonner. Je me levai faiblement, tremblante.

J'entendis un clic et la lumière, à laquelle je n'avais pas touché depuis mon arrivée, envahit la pièce comme dans une explosion. Je dus me frotter les yeux pour les protéger de la luminosité soudaine. Lorsque je les rouvris, encore chargés de sommeil et éblouis, je crus que mon cœur s'était arrêté.

Devant moi, Jack pénétrait dans le salon, suivi de près par Maxime. Derrière eux, un peu plus petit, Al se glissa dans la pièce à son tour. Tous les trois me regardèrent, Jack et Maxime avec une pointe d'amusement, Al les sourcils froncés. Un quatrième homme arriva, qui me fit l'effet d'un coup de poignard dans le ventre.

C'était Charlie, le regard noir, les mains dans les poches, les cheveux un peu plus long que la dernière fois que je l'avais vu. Il me fixait d'un air impassible, mais toujours aussi froid. Ma gorge se serra.

— Salut, Eris, lança Jack avec une pointe de dégoût en prononçant mon prénom. T'as pas l'air très contente de nous voir.

Je restai immobile. J'étais prise au piège. Derrière moi, le mur m'empêchait de reculer. La fenêtre était un peu plus loin, mais fermée, et une chute de cet étage aurait été mortelle. La porte se trouvait derrière les garçons, qui n'étaient pas près de libérer le passage.

— Tu ne nous dis pas bonjour ? fit mine de s'offusquer Jack avec son air suffisant habituel. Alors tu es vraiment muette, ou ça faisait partie du personnage ?

Je ne répondis rien, me tordant nerveusement les doigts.

— Tu dois te demander comment on a réussi à te retrouver, intervint Maxime en s'approchant d'un pas. Ça n'a pas été si compliqué que ça.

Je sentais mon cœur battre la chamade, et j'aurais juré que les garçons pouvaient l'entendre de là où ils se trouvaient.

— On t'a traquée comme on le fait pour tous les autres, continua Maxime. On ne savait pas que c'était toi.

Cela voulait-il dire que Charlie ne leur avait rien raconté de ce qu'il savait ? Je lui adressai un regard, mais il ne me prêtait pas attention.

— On n'a pas tardé à retrouver le tailleur chez qui tu as travaillé, et puis l'appartement que ta famille a loué pendant pas mal d'années. On a compris que tu avais été virée, que tu n'habitais plus là. Comme on était dans une impasse, on a posé quelques questions à tes copines...

Jack ricana.

— C'est marrant comme elles étaient prêtes à te balancer pour quelques billets, dit-il. Sauf qu'elles ne savaient pas grand-chose. Il n'y a que cette fille... Jade, c'est ça ? – qui nous a vraiment aidés.

Il s'arrêta un peu pour prendre le temps de voir comment j'allais réagir. La surprise et la colère se bousculaient en moi, mais je ne voulais rien laisser paraître. Jade m'avait trahie ? Pour la seconde fois ?

SilenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant