XXVII

47 2 2
                                    

-À quelle heure t'as dormi, toi ? Me demanda Fresh à la cantine, ayant remarqué les cernes que j'avais sous les yeux.

-Deux heures quart.

-Tu me caches quelque chose, je le sens... Patricia et toi, tout baigne ?

-Oui oui, tout baigne. Et avec Roberta Naomi Marbell ?

Il se cambra avec fierté. 

-A merveille. On s'est même "pécho".

Je me sentis tout d'un coup mal à l'aise, ce que Fresh remarqua.

-Toi et Tricky... ?
 
Pour éviter de répondre à sa question, je m'empressai de fourrer une quantité importante de pâtes dans ma bouche.

Il secoua la tête, ayant compris que je ne désirais pas en parler.

Quand j'eus fini de mâcher avec lenteur, je regardai ma montre.    
  
-Mon père rentre à onze heures de l'avant-midi.    
 
-Il en voit du monde, ton père,   répondit-il la bouche pleine de pâtes.

Frizzy et Tricky étaient à l'autre bout de la salle, Cody et Tasha étaient dans leur coin à eux, beaucoup plus en train de discuter romantiquement que de manger.     

Une seule personne était isolée dans son coin : Lucy. Elle portait une blouse rouge sang (très subtil) et un jean slim noir, revâssant devant son plat de pennes qu'elle mangeait lentement.

Depuis que Tasha était en couple avec Cody, elle était souvent seule. 

-Miss Émo t'attire ou quoi ?

-Pourquoi n'a-t-elle aucun ami ?

-C'est une question piège ?

Je soupirai.
  
-Pitié pour elle.

-Brody n'est pas dans les parages ?

-Il est beaucoup plus occupé à  draguer les filles qu'à s'interresser à elle...  
   
Nous regardâmes en direction du fameux Don Juan, entouré de minettes complètement dingue de lui, l'archétype du beau gosse dragueur américain.      

-Tu pourrais aller lui parler, toi ! Me dit Fresh en me donnant un coup de coude.   
  
-Moi ???   
 
-Mais oui, vas-y...

Je secouai la tête.

-Allez quoi, le grand Jake McAlester est effrayé de parler à une fille ?

Il la regarda.  
  
-Même si elle fait vraiment peur...
 
-Négro, dans la vie, les gens sont comme des aimants... Soit on s'attire parce qu'on est opposés soit on se repousse parce qu'on est identiques.

-Elle et toi vous êtes opposés, c'est parfait.    

Je levai le doigt en l'air en signe d'objection, le temps que je finisse de mâcher ce que j'avais en bouche.    

-Là je t'arrête tout de suite, mon ami. Elle et moi, c'est un cas tout à fait atypique, contraire à toutes les lois de la physique. Nous sommes de charges diamétralement opposées, mais nous nous repoussons à des kilomètres... Élémentaire, mon cher Watson.

Fresh sourit.

-On croirait entendre ton père !

Je fronçai les sourcils.

-Sérieusement ?  

-Ouais, une plaidoirie ! Une fine barbe, une toge, une voix plus grave, et tu seras son jumeau !

Il avait raison. Je me rendis compte qu'en effet, sans le vouloir, je venais de parler comme lui.

Je me levai.

Patricia Miss Parfaite Où les histoires vivent. Découvrez maintenant