Allongée dans l'herbe du jardin, les yeux fermés, Kamelya pense à Luke. Il s'est montré si doux avec elle et si attentionné. Elle a aimé la façon dont il l'a prise dans ses bras, elle a senti son parfum, une odeur qui l'a rassurée. Dans ses bras d'acier, elle a eu l'impression d'être à l'abri de toute tempête. Luke semble n'avoir peur de rien. Son côté mystérieux et dur a caché une facette de lui qu'elle chérit : sa tendresse. Elle repasse en revue ces derniers mois. : sa rencontre avec Luke la première fois où elle a failli l'assommer ; leur silence ; la fois où elle l'a vu torse nu, leur dispute ; leur danse sous le patio ; leur nuit à discuter dans les montagnes. Il lui a avoué être amoureux d'elle. Kamelya en a hâte de finir avec passé pour répondre à cette question : ressent-elle de l'amour pour son patron ?
Absorbée à sa rêverie, Kamelya ne se doute pas de ce qui se tramait dans la maison.
Tobby a fait entrer sa voiture juste devant l'entrée de la maison afin de pouvoir y glisser facilement sa proie. Il a réussi à louer une voiture semblable à celle des Anderson. Si quelqu'un repère son véhicule, on croira que ce serait celui des Anderson. En se dirigeant vers le jardin, il ne désire pas tuer Kamelya, juste l'emmener avec lui. Il la trouve exactement à l'endroit où il l'a repérée quinze minutes plus tôt.
Durant ces nuits où elle a enduré l'atrocité, Kamelya a développé sa mémoire olfactive. Cinq ans plus tard, ses sens sont toujours aussi affûtés. Quand elle perçoit l'odeur, elle se fige. Elle n'a pas besoin d'ouvrir les yeux pour savoir qu'il est là. Le monstre l'a retrouvée. Tout son être vibre de terreur. Ses membres se paralysent. Son cerveau fait une pause.
Tobby s'approche d'elle sans faire de bruit. Il attend qu'elle réagisse. Il la voit maintenant pleurnicher.
— Bonjour ma jolie, lui dit-il. J'ai mis du temps, mais j'ai fini par te retrouver. Tu m'as tellement manqué.
Elle ne scie pas. Ses membres ne répondent plus. Elle a l'impression d'être hors de son corps et d'assister impuissante à la scène.
— Tu n'as pas l'air contente de me voir, lui dit-il d'un ton amer. Ce n'est pas grave. Tu souriras peut-être en voyant la surprise que je t'ai préparée.
Tobby s'approche des lèvres de la jeune femme. Son souffle est chaud et son haleine empeste l'alcool. Il passe la langue sur ses lèvres si douces. Là, sans plus attendre il lèche son visage pour la mettre en appétit.
— Nous n'avons pas beaucoup de temps. Dépêche-toi de me suivre ! ajoute-t-il.
Comme elle ne dit pas, il la saisit par les cheveux. Il la traine sur le sol. Elle est un pantin désarticulé. Une poupée de chiffons vivante. Un corps sans âme. Une vie sans émotions. Ce qui agace Tobby. Il désire l'entendre gémir. La voir se cambrer. La regarder verser des larmes. Il n'a pas attendu toutes années pour une momie ! Les femmes aiment ça ! Sa mère aimait ça ! Il l'a entendu crier à chaque fois qu'un client venait la voir. Il l'a vu dans les films pornos. Il l'a expérimenté avec les prostituées. La belle fera de même !
Kamelya a l'impression de ne plus être en vie. Elle est éparpillée sur la terre. Son coeur git sur le sol en mille morceaux, son corps une enveloppe vide. Elle prend des coups qu'elle ne sent pas. Son agresseur hurle de plus belle, elle est sourde à ses cris. Ses pieds font de longues traces dans la terre, tel un chemin à emprunter. Parfois, ses orteils se heurtent des cailloux. Désormais, ils sont noirs. Ses mollets sont chatouillés par l'herbe fraîche.
Tobby pousse la baie vitrée. Le bras inerte de sa victime reste pris dans le voilage et fait tomber un cadre photo et un pot de fleurs. Le carrelage est à présent recouvert de saleté. Il faudra nettoyer tout cela ! Les doigts de Kamelya caressent le sol si lisse et si froid ! Tiens, elle n'avait pas remarqué ce bouton rose bonbon sous la table à manger. Elle devra le ramasser.
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Un Goût de Bonheur #wattys2017 (Terminé)
RomanceLuke est veuf, père d'une petite Leah et célèbre, mais il cache ses peurs et ses soucis derrière son pseudonyme. Kamelya est en fuite, trainant au gré de ses déplacement son passé telle une lourde valise. Tous deux ne rêvent que de gouter au bonhe...