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Il est revenu.

Malgré sa totale ignorance, je ne peux m'empêcher de ressentir du soulagement.

Je suis rentré il y a déjà plusieurs heures de ma sortie accompagnée d'Enid, Carl et Sasha rapportant tout un coffre de sachets de graines pour des plantations de légumes ainsi que quelques conserves. Nous avons même pu trouver du chocolat dans l'arrière-boutique d'une pâtisserie et au vue du large sourire de Carol, ça lui a apparemment fait un plaisir fou.

Après le retour de Rick et Daryl, je suis directement rentré chez moi complètement lessivée. Il faut dire qu'on ne peut pas être au top après un viol. J'ai encore pas mal d'hématomes qui me lancent mais ce qui me fatigue encore plus ce sont mes pensées qui ne cessent de décortiquer et rassembler le peu d'informations que j'ai. Je n'ai pas réussi à en parler à qui que ce soit, ne voulant pas prendre ce rôle de victime. Je suis au-dessus de tout ça. Je voudrais simplement tirer un trait sur cet évènement et ne plus devoir y repenser. Malgré cela, je suis hanté de cauchemars la nuit et de pensées noires la journée. Tout autour de moi n'a plus qu'un goût de cendres.

D'ailleurs, ce soir l'ensemble de la communauté s'est rassemblé dans le jardin pour un repas en commun et j'ai préféré resté seule à veiller les étoiles dans la cour arrière de la maison, là où je suis sûre d'être tranquille, où je peux entendre les bruits de la nuit et sentir la brise nocturne. C'est dans ces instants que je respire enfin, laissant aller mes larmes et courir mon esprit vers un monde plus simple qui ne connaît pas les zombies, ni les abus de force ni la constante rébellion pour survivre.

Assise sur les marches du perron, les genoux rassemblés contre moi, je cherche la grande ourse en m'apercevant de la myriade d'étoiles qui semble s'être illuminé depuis le début de l'apocalypse comme si le tumulte humain les avait effrayées et que dorénavant elles s'emparaient de leur territoire pour imposer leur éclat au-dessus de nos têtes.

Quelqu'un passe en bas de la terrasse projetant son ombre à mes pieds. Je me redresse d'un bond en retirant de son étui ma lame quand je vois apparaître, d'une manière nonchalante, Spencer.

Mon cœur se met à palpiter douloureusement à une cadence accélérée. Je lui jette un regard terrorisé cherchant une fuite possible à son approche assurée. Il porte sur son visage un sourire suffisant.

- Je pensais me faire défoncer par tes chevaliers servants. Entame-t-il.

- ... Me plaquant contre le mur de la maison.

- Mais tu n'as rien dit apparemment puisque personne n'est venu. Continuant de se rapprocher. Il monte les marches calmement, prenant tout son temps. Je me suis dit que peut-être tu voulais garder ce secret rien qu'entre nous. Que quelque part ça t'avait plu.

- J'étais inconsciente. Le coupant dans son élan verbal.

- Oui c'est vrai. Beaucoup plus conciliante comme ça.

Maintenant il est si proche que je peux sentir l'odeur de son parfum. D'un geste vif, il vient récupérer mon poignet du côté où je tiens le couteau et serre suffisamment pour me contraindre à le lâcher. Il fait un bruit sourd en touchant le sol de bois. Son souffle contre ma joue tandis que je tourne la tête, il pose ses lèvres toutes proches de mon oreille. Sa respiration devient profonde quand il pose sa main contre le mur m'enfermant entre ses bras. J'expulse l'air de mes poumons par saccades en me pressant davantage comme si je pouvais traverser le mur.

- J'ai pensé à toi tout le temps. Chuchote-t-il. Je déglutis difficilement.

- Va-t'en s'il te plaît.

LA RAISONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant