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Lorsque les instants difficiles surgissent du passé sans que vous ne puissiez vous y préparer et que de surcroît vous avez la mémoire fragmentée, il est pratiquement insurmontable de calmer le chagrin ou la peine qui vous envahissent. Et je me retrouve recroquevillée dans un lit qui n'est pas le mien, dans une chambre noyée de pénombre que je ne reconnais pas avec pour seule compagnie les fantômes du passé et cette douleur terrible qui irradie mon épaule gauche.

Avec difficulté, je me redresse, laissant glisser le drap jusqu'à ma taille et m'aperçois que je ne porte que mes sous-vêtements. Un large pansement recouvre la moitié de mon bras et une perfusion est fichée dans le pli de mon coude. Je la retire vivement d'un geste maladroit, répandant quelques gouttes de sang sur le drap immaculé. Sur un fauteuil posé tout près, je discerne mon jean et mon sweat soigneusement pliés. Prenant appui sur le bord du lit, je pose les pieds à terre et tente de me relever prudemment. Lorsque ma tête arrête son manège, je m'efforce d'avancer vers le fauteuil et attrape mes affaires que j'enfile rapidement non sans ressentir l'éclair fulgurant qui me traverse l'épaule.

La lumière filtrant par la fenêtre entrouverte fait jouer les grains de poussière. Au dehors, des bavardages et des rires d'enfants attirent mon attention. Soudain, je me rends compte que mes armes ont disparues et je balaye la pièce du regard sans succès. La porte de la chambre est entrouverte. Prudemment, je passe la tête de l'autre côté mais il n'y a personne, seulement un long couloir donnant sur un escalier rejoignant l'étage du dessous. Toutes les autres portes du niveau sont closes et aucun son ne me parvient. D'un pas que je souhaite léger je me glisse à l'extérieur de la pièce, mes yeux sondant les environs.

Je suis plus que méfiante et je déteste cette sensation.

Les marches de l'escalier craquent légèrement sous mon poids tandis que je rejoins le rez de chaussée. Je me retrouve rapidement sur le parquet d'une large entrée richement meublée recouverte d'un épais tapis. Au centre du vestibule, un guéridon où est posé un glock (c'est vraiment de plus en plus bizarre). Jetant un regard circulaire, les yeux empreints d'inquiétude, je me dirige vers celui-ci et vérifie son chargeur. Il est plein. Je glisse l'arme dans la ceinture de mon pantalon et prend la direction de la lourde porte d'entrée à double vantail. Lorsque j'ouvre celle-ci, l'éclat du soleil m'aveugle quelques secondes, me contraignant à plisser les yeux. A l'extérieur, je reconnais l'attroupement de caravanes et le gigantesque potager aperçus plus tôt.

Je me trouve toujours à la Colline.

...

- Tu es réveillée. C'est bien.

Je fais volteface, me rattrapant au battant de la porte, évitant de justesse une chute monumentale. Jésus me rejoint, un large sourire se dessinant sur le visage.

- Qu'est-ce qui s'est passé ? Je lui demande tout en tentant de récupérer un rythme cardiaque plus régulier.

- Tu t'es fait tirer dessus et Gregory aussi. Heureusement vous êtes sains et saufs l'un comme l'autre. Commence-t-il m'enjoignant d'une main sur le dos à rejoindre la balancelle installée sur le perron.

- Je suis resté combien de temps inconsciente ? Et où est Daryl ?

- Doucement, Yas. Je vais tout t'expliquer. Tout d'abord on t'a mise sous tranquillisants. Tu n'arrêtais pas de faire des crises en pleine nuit et tu t'arrachais ta perfusion à chaque fois. Ça fait maintenant 3 jours que tu dors.

- 3 jours ?! Abasourdie. non mais tu te fous de moi !

- Le type a reçu une flèche en plein cœur. Ton copain manque sérieusement de sang-froid.

LA RAISONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant