Une innocente humaine

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Infirnia

Nous entrons dans une petite pièce sombre qui me donne des frissons. Au sol, une jeune fille est enchaînée par les chevilles, étalées de tout son, si faible que ça m'en fait mal. J'arrive à percevoir les marques de sang sur son chandail, sur sa frêle peau. Je me sens m'attendrir, mais de l'extérieur, moi-même je crois que je me trouverais froide. Tout d'un coup, c'est comme si mon âme sortait de mon corps. Je me sens flotter et suis face à moi. Mon regard est vide, mes sourcils légèrement froncés, je me tiens droite sans pour autant sembler soumise à la crapule dans mon dos. On croirait que je n'ai que dégoût pour cette pauvre fille. Mes yeux sont toujours violets, rendant ce regard encore plus pesant.

-À croire que c'est ce qu'il faut... je souffle.

-Pardon?

Je suis violemment de retour dans mon corps, comme si quelqu'un m'avait tiré dans mon enveloppe spectrale. Je ne bouge pas d'un cheveux, déjà prête à répondre.

-Que faut-il faire?

Il tape dans ses mains et avance devant moi, près de la jeune fille. Il agrippe son menton et le secoue vers moi alors qu'elle peine à essayer d'ouvrir les yeux. À l'intérieur, je voudrais hurler, le frapper de toutes mes forces et partir en courant avec cette pauvre victime. Ceux qui mériteraient d'être à sa malheureuse sont devant les barreaux.

Je ne dois pas divaguer, j'ai un but, rester en vie. Hors de question que je l'oublie.

-Vois-tu, commence-t-il d'un ton malsain, presque jouissif, cette jeune fille est pour nous une menace. Je ne te dirai pas pourquoi tout de suite, mais tu le sauras bien vite. Je veux avant que tu tortures... et que tu tues.

Je sais que mon visage reste de pierre, mais à l'intérieur, c'est la panique générale. J'ai l'impression d'être figée dans le béton, incapable de mouvoir quoi que ce soit. Je dois réagir, et vite, si je ne veux pas éveiller ses soupçons. Son regard semble fouiller mon âme, essayant à chaque seconde de me coincer. Ok, inspire, expire, inspire, expire. Avec un peu de chance, c'est un crime anodin, mais elle reste démone. Les démons ne sont pas bons, les démons ne sont pas bons, les démons ne sont pas bons. Allez, bouge, fais quelque chose!

-C'est tout?

Le sourire d'Asmode semble s'étirer jusqu'à ses oreilles. Je me rapproche d'eux, attrape avec violence la crinière de ma victime et la traîne au sol. Je la lance contre le mur et elle le percute telle une poupée de chiffon. Elle essaie de se relever, mais tombe nez sur la terre. Ses sanglots commencent à envahir la pièce, me donnant des frissons d'horreur.

Je m'allonge auprès d'elle, dos à Asmode, et caresse sa tête du bout des doigts avec tendresse. Pour elle comme pour tous les autres, ce geste est terrifiant, annonçant le pire, mais il faut me croire, cette sympathie m'habite bel et bien. Je ne veux plus être le monstre d'autrefois, et même si ça ne parait pas, je continue d'être gentille l'instant d'une minute.

Malheureusement, la fatalité lui fera beaucoup plus mal. Mes ongles entrent dans sa chair et la tranche lentement, suivant le même mouvement qui, il y a à peine quelques secondes, était inoffensif. Les filets de sang coulent sur son visage qui semble déjà presque mort. Sa lèvre inférieure tremble, ses yeux sont pleins d'eau, son corps entier est glacé. Elle est terrifiée, elle ne veut pas mourir, ça se voit dans son regard. Je sens aussi toute la détresse, toute la fatigue que j'ai ressenti à sa place.

- À ce que je vois, ta technique de torture est... débute Asmode.

-  Croyez-moi, il est encore plus terrifiant de regarder dans les yeux et dans le calme cette fatalité qu'est la mort, plutôt que de la subir avec violence. L'impuissance prend toute la place.

Demons around meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant