VI. Et mieux se comprendre

5.1K 60 12
                                    

-« Bonjour, dit la voix enjouée de la caissière.

- Bonjour Mademoiselle !

- Vous avez la carte de fidélité.

- Ah oui ! Excusez-moi, je suis un peu dans la lune…

- Oh, je crois savoir pourquoi, me répondit-elle en me lançant un regard explicite vers mon compagnon.

- C’est exactement ça.

- Ca va les filles, je ne vous gêne pas ?

- Si, tu devrais remplir le sac avec les achats déjà enregistrés mon cœur. »

Il m’obéit en grommelant. J’avais peut-être un peu abusé, mais il m’avait tendu le bâton pour se faire battre aussi. Je n’avais pu pas résister. J’allai l’aider, espérant le tirer de sa bouderie. Une fois les courses dans le sac, la caissière ajouta :

« 46 euros et 14 centimes »

Nous payâmes, Stéphane prit le sac et nous repartîmes.

-« Tu me fais vraiment la tête ?

- Oui, il n’y a pas que toi qui aies le monopole…. A moins que tu m’embrasses !

- Hey ! Un bisou cela ne se troque pas, cela s’offre.

- Alors offre-m’en un ! » répondit-il du tac au tac.

Mais je ne l’écoutais déjà plus. Pas que je ne lui aurais pas donné un baiser volontiers, mais autre chose attira mon attention. Un plan de la ville. Je m’approchai rapidement et entrepris de le inspecter de long en large. Stéphane s’approcha.

-«  Je veux bien que tu aies une bonne mémoire, mais là, je ne pense pas que tu y arrives.

- Je ne retiendrais certainement pas tous les noms des rues, mais je peux me concentrer sur l’organisation des principales artères de la ville et de leurs noms. Cela suffira.

- Et nous, on est où ?

- Ici, c’est le monoprix, et là notre appartement, enfin ton appartement, boulevard Colbert.

- Parce que c’est le mien ?

- Oui, il est bien trop masculin, c’est évident. Oh regarde, on a le Parc de Sceaux juste à côté de chez nous. Regarde !

- Tu voudras qu’on y aille ?

- Pourquoi pas, on a rien d’autre de prévu avant le match de ce soir, non ?

- Si, j’avais prévu de te harceler jusqu’à avoir mon bisou.

- T’es têtu toi ! Je préfère l’idée du Parc figure-toi.

- Cela m’aurait étonné. Je ne suis le seul à être têtu. Mais le fait d’aller au Parc ne te protègera pas du tout tu sais. »

Je mimai effrontément une mine effrayée et réussi enfin à lui arracher un sourire. Je me reconcentrai sur le plan 2 petites minutes, et nous repartîmes. Je proposai à Stéphane de porter un peu le sac à mon tour, mais d’après lui, ce n’était pas lourd. Nous rentrâmes sans encombre à l’appartement, rangeâmes les courses soigneusement et commençâmes à préparer le déjeuner sous les ordres insistants de nos deux estomacs chantant à l’unisson.

Le repas fut frugal, on n’avait pas vraiment le choix, et silencieux. J’observais mon compagnon à la dérobée, captivée par le moindre de ses gestes même les plus banals et en attente d’une moindre réaction de sa part. Il ne boudait plus et souriait même, mais j’avais suffisamment gâché l’ambiance pour qu’il n’ait pas envie de parler. Quand nous eûmes fini, nous débarrassâmes, toujours en silence. Puis Stéphane se dirigea vers la chambre et se laissa tomber sur le lit. Il rebondit et cela le fit discrètement rire.

Je finis alors de me laver les mains et le rejoignis dans la chambre. Je désirais le rejoindre sur le lit, mais je m’en voulais encore pour tout-à-l’heure. Je fis mine de chercher quelque chose, et, n’ayant rien à faire de mieux, continuai à fouiller la chambre à la recherche d’indice. Mais une force me tira brusquement en arrière.

« Madaâame, vous faîtes trop de bruits pour les oreilles de monsieur » déclara Stéphane avec amusement alors que je rebondissais à mon tour sur le lit. Je ris et, sans me dégager de son étreinte, me retournai, le visage tout proche du sien. Ses yeux, verts avec un cerceau couleur rouille autour de l’iris,  plongeaient dans les miens. J’entrouvris la bouche et me rapprochai doucement de la sienne. Sa main se posa sur ma joue et je ressentis toute sa force et sa chaleur. Le contact était doux, je voulais combler les quelques millimètres qui séparaient nos lèvres.

Mais la main sur ma joue se fit plus ferme et me stoppa dans mon élan.

« Non, je veux pas que tu m’offres un baiser juste pour m’apaiser. Je blaguais tout à l’heure. Il faut que le baiser soit voulu pour qu’il ai vraiment de la valeur autre que physique. »

Je m’éloignai de lui, les yeux écarquillés pour mieux le dévisager. Je n’étais pas sûre d’avoir compris. J’avais loupé ma chance, c’est ça ? Il était trop tard maintenant, il ne voulait plus de moi ? Je sondais ses yeux pour comprendre et y vis un éclat. Pas un éclat de colère ou de peur, mais un éclat de désir et d’espoir. Et je saisis : il pensait que je ne voulais pas l’embrasser, que je le faisais que par pitié.

« Regarde-moi dans les yeux Stéphane ! Qu’est-ce que tu y vois ? De la pitié ? Vraiment ? »

 °Orage dans l'air! Mais de  colère ou de passion? A vos commentaires et n'oubliez pas de voter et/ou devenir fan°

Comme deux étrangersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant