Chapitre 5 : Recherches

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Carmen avait décidé de s'éloigner de l'appartement de Philippe pour s'installer chez Julien. Elle avait mis en vrac quelques affaires dans des valises et des sacs, avec le carnet rouge de Philippe en supplément. Elle avait peur de retomber dans une dépression en restant sur un lieu marqué par l'empreinte de Philippe. Elle préférait se nourrir des souvenirs passés avec Julien.

Ce dernier avait décidé de passer la première nuit sur son canapé car Carmen lui avait manifesté sa volonté de dormir seule pour cette nuit. Elle avait dîné en sa compagnie et celle de Léna, qui n'avait rien à faire du reste de sa soirée.

« -Tu devrais prendre un congé auprès de ton cabinet, chérie, dit Léna en coupant sa salade. Il existe des procédures en cas de mort d'un proche.

-Oui, je vais appeler mon boss, répondit Carmen. Je vais négocier deux semaines. J'ai besoin de me consacrer à temps plein au cas de Philippe.

-Il va falloir que tu organises l'enterrement aussi, dit Léna avec son éternel franc parler. Je sais que ce n'est jamais agréable, mais quand la police aura terminé l'autopsie, il faut que tu ailles réclamer le corps.

-Oui, je sais, Léna, mais on n'est pas obligé d'en parler maintenant.

-Oh, c'est comme tu veux, chérie, je préfère juste que tu n'oublies pas de le recouvrir de terre, quoi.

-Léna, il y a des moments où faire de l'humour n'est pas recommandé, l'interrompit sèchement Julien.

-Je sais que tu dois te réjouir de ne plus avoir Philippe dans les pattes et d'avoir Carmen juste pour toi, mais ne te mêle pas de notre amitié, s'il-te-plaît, je la connais depuis beaucoup plus longtemps que toi.

-Ca suffit, coupa Carmen, agacée par la tournure que prenait la conversation. »

Julien et Léna avaient toujours eu des rapports tumultueux. Julien trouvait Léna superficielle et légère, tandis que cette dernière le trouvait trop immature et le tenait pour responsable du délitement progressif dans lequel s'était peu à peu engagé le mariage de Carmen. Ils parvenaient à se tolérer et faisaient des efforts pour Carmen, mais le naturel revenait souvent au galop. Mais, ce soir, la jeune femme brune n'était pas d'humeur à entendre des piques fuser autour d'elle.

« -L'enterrement aura lieu la semaine prochaine. Je veux un truc simple, avec peu de gens. Inutile d'appeler ma famille, je leur donnerai des nouvelles ce soir mais je ne suis pas d'humeur à les voir. Vous viendrez, j'inviterai quelques amis de Philippe mais ce sera tout. De toute manière, il n'était pas très sociable. La liste sera rapide à faire. Je veux que ça dure peu de temps. Je n'ai pas envie de m'attarder sur son corps, de penser à lui. J'ai besoin de m'occuper à autre chose. »

Ces paroles étaient très paradoxales, et Carmen s'en rendait compte. Elle avait décidé de mettre sa vie entre parenthèses pendant plusieurs jours pour se consacrer à la mémoire de Philippe, mais refusait de se confronter directement à sa mort. Elle n'avait pas envie de s'engager vers des souvenirs.

« -Je vais aménager ton salon pour pouvoir commencer mon enquête, Julien, dit Carmen, comme si la réponse de son amant allait de soi.

-Comme tu voudras, ma belle. Mais ne te prends pas trop la tête.

-Ne t'en fais pas.

-Il s'en fait beaucoup, je pense, railla Léna, tandis que Julien lui lançait un regard assassin. Je passerai demain, si tu veux, Carmen. J'ai un vernissage prévu la semaine prochaine, ça pourra te changer les idées. J'expose un jeune artiste, ça sera très sympa.

Dix TatouagesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant