Chapitre 28 : Russian Roulette

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Louis Aloin le déserteur qui fréquentait les bars de S. était définitivement la même personne que cet homme sur le portrait de Mercure qui avait le visage blanc, avait combattu à l'armée et s'était a priori suicidé lors d'une roulette russe hasardeuse. Autrement dit, Louis Aloin était le frère de Mercure.

Carmen fut ravie car, pour une fois, ses impressions se révélèrent être exactes. Quand Mercure lui avait parlé de son frère soldat, elle avait immédiatement fait le lien avec le manuscrit de Philippe. Puis, elle en voulut à Léna. Elle devait fatalement connaître le véritable nom de Mercure mais n'avait pas compris qu'il avait un lien de parenté avec l'un des tatoués. Etourdie, comme toujours.

Quentin comprit que Carmen venait de découvrir quelque chose d'important, mais il se garda bien de lui poser des questions. Il avait deviné que cette dernière ne souhaitait pas s'épancher davantage en révélations.

« -Quentin, vous savez quel type de bar fréquentait Louis ? Vous avez un nom, une adresse ?

-Non, je ne me souviens pas... Attendez, si. L'As de cœur, dans le centre-ville. Et l'Ange déchu également. Il les affectionnait particulièrement. Je l'ai accompagné plusieurs fois. Des endroits plutôt mal famés que je ne fréquentais pas d'habitude. Je n'y suis jamais retourné.

-Vous avez l'adresse ? »

Quentin lui griffonna le lieu où se trouvaient les deux bistrots sur un morceau de papier. Carmen le remercia et lui annonça qu'il était temps pour elle de partir. Quentin la raccompagna jusqu'à la porte de son cabinet. Il lui tendit une main amicale.

« -Merci encore pour votre aide, Quentin, dit Carmen. Je vous en serai éternellement reconnaissante.

-Je vous en prie, sourit Quentin. C'est toujours un plaisir de vous rendre service. »

Carmen lui dit au revoir et s'apprêtait à franchir le seuil de la porte quand il la retint par le bras.

« -S'il-vous-plaît... Si vous apprenez ce qui est arrivé à Louis, vous pouvez... juste me mettre un message ? J'aimerais vraiment savoir... pourquoi cette disparition soudaine...

-Ne vous inquiétez pas, le rassura Carmen. »

Pour la première fois, elle avait l'impression que Quentin était faible. Elle qui l'avait toujours vu comme une figure paternelle, rassurante, calme, capable de soigner tous les maux avait maintenant la sensation d'avoir affaire à un petit enfant. C'était touchant, et terrifiant à la fois. Ce qu'elle entendait lui rappelait...

Julien l'attendait, allongé sur un des canapés. Il somnolait presque. Carmen se revit deux ans auparavant avec Philippe, dans cette même salle d'attente, sur ce même canapé. Ils se tournaient presque le dos, ce jour-là. Il n'y avait personne d'autre dans la pièce. Leur couple battait de l'aile depuis plusieurs mois, et Philippe avait voulu organiser une thérapie de couple avec le docteur Jérôme, ce que Carmen refusait catégoriquement. Mais, comme à son habitude, et avec le peu de volonté qu'il lui restait pour arranger les choses, elle s'était pliée à ses désirs.

« -Tu sais bien que c'est pour notre bien, ma chérie, avait murmuré Philippe. C'est notre dernière chance pour sauver ce mariage.

-Une thérapie de couple ? C'est tout ce que tu as trouvé ? avait-elle violemment répliqué. On n'est pas dans un film, Philippe. Les problèmes de couple ne peuvent pas se résoudre dans une salle de consultation.

-Pourtant, tu connais les vertus et l'efficacité des méthodes de Quentin mieux que quiconque, avait avancé Philippe. Et puis, pourquoi ne pas essayer ? Si ça marche, tant mieux. Si ça ne fonctionne pas, nous trouverons une autre solution.

Dix TatouagesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant