Chapitre 27. Le malheur entre sans frapper

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Notre première nuit à la campagne fut des plus mauvaises. Une fois que Blaise eut fini de pester après Olivia,nous avons nettoyé notre chambre de fond en comble pour nous installer convenablement, un ménage chaotique puisque je n'arrêtais pas d'éternuer à cause de la poussière et que Blaise s'enfuyait à chaque fois qu'une araignée de plus d'un centimètre montrait le bout de ses pattes. Le soir venu, la « maison vide » - comme Blaise se plaisait à l'appeler - avait tout de la maison hantée, toiles d'araignées en moins. Blaise n'arrêtait pas de se tourner, s'immobilisant quelques minutes avant de se retourner à nouveau, comme si sa position pouvait changer quoi que ce soit à l'atmosphère de la maison.

- Il ne manque plus qu'un bon vieil orage... murmurai-je.

Blaise se redressa sur son coude.

- Tu ne penses pas que cette maison fout déjà assez les jetons comme ça ?

- Quelle partie peux-tu bien trouver désagréable ? Les portes qui grincent, le plancher qui craque, ou le vent qui fait bouger les volets ?

- Idiot, lança Blaise en se rallongeant et en me tournant le dos.

Je souris et me rapprochai d'elle. Je me plaquai contre son dos et la pris dans mes bras. Au bout d'un moment, je commençai à caresser ses cheveux. Ils avaient encore poussés.

- Quand j'étais petite, murmura Blaise après un long silence, je faisais souvent ça pour m'endormir. Me caresser les cheveux, je veux dire. Des fois, j'essayais de me persuader qu'ils étaient bien plus longs que d'habitude. Et puis je me rendais à l'évidence : même s'ils avaient poussé un peu, ils étaient toujours trop courts pour une petite fille. Toujours...

Je déglutis en pensant à la petite Blaise et à Richard. Je la serrai encore un peu plus contre moi et chuchotai à son oreille, sans doute pour me convaincre moi-même :

- Ça n'a plus d'importance, n'est-ce pas ? Tout est fini...

Le lendemain, Blaise était déjà levée quand je me réveillai. Je lui demandai comment s'était passée la nuit.

- J'ai mis des heures à m'endormir. C'est sympa d'avoir voulu me rassurer mais tu as sombré avant moi gentleman...

On trouva la table du petit-déjeuner prête à remplir son rôle. La tasse d'Olivia était déjà dans l'évier. Une fois rassasiés, Blaise et moi sortîmes dans le jardin à la recherche de notre hôte. Elle n'était pas sur la terrasse comme la veille, mais tout au fond du jardin. Elle ramassait les feuilles, le râteau à la main, vêtue d'un vieux pull violet bien trop grand pour elle et de bottes en caoutchouc vert kaki.

- Vous êtes enfin levés, jeunes fainéants ? nous lança-t-elle.

- Qui aurait cru que vous aviez des vêtements pareils dans votre garde-robe ?... répliqua Blaise en ignorant sa phrase précédente.

- Vous pourrez en trouver de similaires dans le petit cabanon. Ils seront plus pratiques que vos pyjamas... sourit-elle fixant nos pieds nus et mouillés par la rosée du matin.

J'échangeai un regard blasé avec Blaise, qui me proposa de passer en premier dans la salle de bain. Je rentrai dans la maison en les laissant toutes les deux. Je craignais une véritable tempête...

- Alors comme ça, commença Blaise au bout d'un moment, on fouille dans les carnets des autres... Vous avez bien reçu ma lettre ?

- Une devinette, ma chère. Ou une intuition, si vous préférez. Mais oui, Renzo m'a bien transmis votre lettre insolente.

Elle souriait, penchée sur son tas de feuilles mortes.

- Comment ça se passe avec notre ami alors ? demanda Olivia après un silence.

Rendre ses larmes à la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant