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Une calèche avançait rapidement sur des terres arides et poussiéreuses. Le cocher fouettait ses chevaux car il avait reçu l'ordre d'être le plus rapide possible.
Après quatre longs mois de traversée et une tempête si violente qu'elle avait tué une dizaine de matelos, la famille Dunoyer et la vieille Mme de Lestrange arrivaient enfin au Vivarais.
Ces séjours se faisaient très rares, puisqu'il fallait non seulement prévenir mais aussi organiser un long périple prévu depuis le mois de décembre.

Mme Dunoyer n'en pouvait plus et avait grand hâte de revoir son frère et sa petite soeur. Depuis ses quatorze ans, elle ne les voyait que très peu, cependant elle remerciait chaque jours le Seigneur de les avoir ainsi réuni.
Elle pensait parfois qu'à un détail près, sa vie aurait pu être tout autre. Recluse en Suisse pour pratiquer librement sa foi protestante, si son chemin n'avait jamais rencontré celui d'Hortense, peut-être y serait elle encore. Héloïse songea à sa belle-soeur qu'elle idôlatrait, sa volonté et sa bravoure était telle, qu'à elle seule, Hortense avait sauvé tout le devenir de sa famille.

Mme Dunoyer admira ses deux garçons, confortablement assis sur la banquette en face. L'aînée venait d'avoir onze ans et le second neuf ans. Ses deux fils étaient à la pointe de l'élégance, le premier aussi nommé Basile paraissait un peu hautain et sûr de lui. Ses yeux noirs rappelaient la particularité physique des de Lestrange et sa mèche bien coiffé ainsi que rangé sur le côté gauche de son front renforcaient cet air de supériorité. En revanche le cadet, Hippolyte, était plus réservé mais point sot pour autant. Il préférait la danse à la chasse et les comérages entre femmes que les discussions politiques entre hommes. Sa mère avait bien remarqué cette différence mais n'avait jamais jugé le cas grave.

M. Dunoyer et la vieille Mme de Lestrange voyagaient dans un autre coche. Héloïse avait préféré gardé auprès d'elle la gouvernante, une vieille amie.

- Je me demande si tante Hortense a accouché d'une fille ou d'un garçon ! décréta Hippolyte, avachis contre le rebord de la fenêtre

- J'ai grand hâte de le savoir aussi ! répondit gaiement sa mère, je suis certaine qu'il sera aussi ravissant que ses deux autres filles.

- Ce serait amusant si tante Charlotte avait eu un enfant elle aussi !

- Ce serait étonnant, votre oncle me l'aurait dit en même temps dans son courrier où il annonçait l'heureuse nouvelle pour sa femme.

La gouvernante ne cessait de se remuer cherchant une place convenable, elle était agacée par la lenteur du trajet et souhaitait à tout prix se dégourdir les jambes.

- Tout va bien ? s'inquiéta Mme Dunoyer en s'adressant à cette dernière

- Oh, oui madame ne vous en fait guère, j'attends juste avec impatience de regagner enfin la terre ferme.

- Vous verrez, le Vivarais est un lieu paradisiaque où le temps semble se rompre.

- Je n'en doute pas, quelle étrange sensation que de revenir en France, je l'ai quitté il y a de cela presque dix ans.

- Et le sort ne vous a point épargné ma pauvre amie. soupira Mme Dunoyer

La gouvernante tourna sa tête et observa le paysage, allait-elle enfin rencontré la paix intérieure ? Tant de tourments avaient accablé sa vie. Elle était toujours célibataires, sans famille, simplement un nom noble qui ne lui servait plus.

- Savez-vous quand nous arriverons madame ? demanda-t-elle

- Je vois nos terres au loin, je dirais un bon quart d'heure Gertrude.

Durant ce temps, au château, l'ambiance était à la fête. Chaque résidents avait revêtus leurs plus beaux vêtements et s'étaient coiffés de manière impeccable.
Mme de Marquet avait ordonné qu'on polisse les escaliers en marbre au point où l'on puisse y voir son reflet. Elle avait aussi commandé les meilleurs mets de la région puis fait installer les draps les plus soyeux dans la chambre de ses hôtes.
Seules deux ombres au tableau, annoncer à sa mère qu'elle éduquait un enfant né d'un adultère ainsi que la mort prématuré du fils d'Hortense. Cela allait être un tâche difficile, d'autant que la mère de la jeune femme était très à cheval sur l'étiquette et les coutumes.

Prodigieux Souvenirs [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant