L'héritier du Grand Méchant Loup

Chapitre 26 : Le premier amour de l'Alpha

« Plus de règles ? » répète Kaleb, incrédule.

Je vois Lewis se relever difficilement du billard improvisé sur la table du refuge, fouillant dans sa poche. Il en sort l'émetteur : le seul objet qui peut lui garantir de lui faire gagner le jeu. Son regard brille de détermination. Par réflexe, je place ma main sur ma nuque. Depuis la tentative de marquage d'Ash, j'ai commencé à développer une phobie des loups souhaitant déclarer leur propriété sur moi, que je sois leur âme-sœur ou non.

« Lewis ? Qu'est-ce que... » s'inquiète Cara.

Alors que Lewis, sous les protestations de Kaleb qui n'a pas eu le temps de finir ses soins, pose avec difficulté un pied devant l'autre dans ma direction, Flavia, jusque-là inconsciente sur le fauteuil défoncé du refuge, ouvre les yeux brusquement. Elle pousse un gémissement sourd.

Kate pousse une exclamation, retombant au sol alors qu'elle s'apprêtait à se relever du tapis. On dirait qu'une pression intense vient de leur tomber sur les épaules. Cara et moi nous précipitons vers Kate, tandis que Kaleb court vérifier que Flavia n'a pas fait une poussée de fièvre. La fillette tremble comme une feuille.

« Tout va bien ? demande la sorcière.

-L'Alpha... Il est furieux... halète Kate. Il rappelle ses loups.

-Le lien de Meute... réalise Kaleb en ôtant sa main du front de Flavia, cette dernière n'ayant pas de fièvre.

-Pourquoi il a un accès de colère, celui-là ? grommelle Lewis.

-Le vampire... murmure Flavia d'un ton épuisé. Les meurtres qu'il commet, associé à la souffrance de la perte de plusieurs membres de sa Meute... Cela lui rappelle...

-...Octavie. » je complète.

Adam a peut-être voulu défendre Lucy des loups ennemis, mais il a commis une erreur fatale : rappeler son premier amour à Ash, Octavie, servante et sœur d'Adam décédée dans une attaque du même acabit. Qui sait ce qu'Ash est capable de faire, maintenant ?

Cara pince ses lèvres, se précipitant vers Lewis. « Les autres. Dis-moi que tu sens les autres. Dis-moi qu'ils sont vivants. S'ils sont morts, ce serait comme perdre mes enfants, je...

-S'ils étaient morts, je l'aurais senti. D'ailleurs... » achève-t-il en fronçant les sourcils.

Tiens ? Pourquoi Lewis s'arrête-t-il en plein milieu de sa phrase ? Je fronce les narines. Une odeur âcre de sang provient de l'extérieur. Une odeur de loup en pleine chasse. Est-ce que, par hasard...

Soudainement, un loup immense surgit par la fenêtre, la transperçant comme si elle était en sucre. Il s'ébroue, poussant un aboiement rauque, avant de reprendre forme humaine : un grand roux à l'air brutal. Son pull gris est en lambeaux, et il est couvert de cicatrices plus ou moins récentes.

« Ah ! soupire-t-il, grisé. Vous êtes là. Je me disais bien que ça sentait le vieux parfum de Cara.

-Salut, Ian. » font Cara et Lewis en chœur, sous le regard ébahi de Kaleb, Kate, Flavia et moi.

Je ne sais pas ce qui m'étonne le plus : que Ian surgisse de nulle part par une fenêtre, que Cara et Lewis le saluent comme si de rien n'était ou le fait qu'il ait le sourire le plus béat que j'ai jamais vu sur le visage, à cause de l'euphorie que procure la violence aux loups-garous. Kaleb, qui depuis le début semble avoir une relation plus proche avec Ian qu'avec le reste de la Meute Férale, se rue sur le grand roux.

« Tu es couvert de sang ! s'écrie-t-il, la voix emplie de panique.

-Oh. Ce n'est pas le mien, gamin, sourit-il.