o8||°Un râteau à moins cinquante pour cent}

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Râteau, n.m. : outil de jardinage qui peut également servir à rembarrer des gens avec qui on n'a pas forcément envie de sortir.

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AU SECOURS.

Assise sur une chaise en bois disposée dans le salon, je regardais d'un œil distrait les extérieurs encore illuminés par la lumière apaisante de ce mois de juillet. Mon dieu... Mais pourquoi ne m'étais-je pas rendue plus tôt compte de ce qu'insinuait réellement Noé ? Pourquoi ne lui avais-je pas couru après pour lui dire que tous comptes faits, je n'avais pas envie d'aller à son fichu rendez-vous et que je préférais de loin rester à la ferme, et ce, même s'il fallait supporter Fanny et ses insupportables conversations sur l'élevage de cochons en clandestinité.

Moi, tout ce que je souhaitais, c'était qu'il revienne me voir plus tard dans la soirée, et qu'il me dise que tout ceci n'était qu'une blague. Et puis, je ne le connaissais pas vraiment à vrai dire : je l'avais vu une seule fois dans ma vie et ça y est, le mec s'était senti pousser des ailes ! Remarque, avec ses cheveux d'or bouclés, il avait la parfaite carrure du gentil petit ange joufflu et stéréotypé, le genre qui se vend sous forme de décoration lors des fêtes de Noël. Mais là n'était pas la question.

Désormais, il fallait que je mette au point tout un stratagème pour ne pas me rendre à ce rendez-vous, ou mieux, retourner son petit jeu contre Noé et faire en sorte que je passe un bon moment en compagnie de son ami, Ulysse, aussi connu comme le mec sur qui j'avais des vues. Néanmoins, pour exécuter ce genre de plan, il fallait que je trouve quelqu'un  d'assez fou pour accepter de se lancer dans n'importe quelle aventure, et ce, sans même prendre la peine de réfléchir. D'ailleurs, j'avais même déjà une petite idée, et je savais que cette personne allait être d'accord.

Ni une, ni deux, je sautai de mon siège et traversai à grandes enjambées le salon aux teintes colorées. J'atteignis le hall d'entrée et enfonçai mes pieds dans une paire de bottes en caoutchouc appartenant à ma tante : elle ne saura jamais que je lui ai empruntée, de toute façon, elle dort profondément sur le canapé et rien ne pourrait la réveiller. J'ouvris la porte discrètement, priant pour que cette dernière n'émette aucun son, et sortis, dans le plus grand des silences, de cette demeure où ronflements régnaient en maître depuis une heure.

Une fois à l'extérieur, je débutai doucement ma quête, vêtue de mon short de pyjama et d'un débardeur à l'effigie d'un groupe de rock lambda. Sous les hululements d'un hibou caché, j'avançais à tâtons, priant pour ne pas poser le pied sur une quelconque surface ductile, ou tout simplement pour ne pas rentrer dans un des murs du corps de ferme. Au loin, s'agitant doucement dans l'obscurité, j'apercevais un faisceau de lumière dorée, qui bougeait rapidement le long d'une des parois en métal de la grange. Bingo ! J'accélérai la cadence, déterminée à faire part à cette personne de mon idée, et emplie d'un espoir nouveau : celui de me débarrasser de ce "rencard" imprévu.

- Fanny ? Fanny c'est toi ? chuchotai-je alors que je me rapprochais du faisceau de lumière, sur la pointe des pieds.

Aussitôt, un puissant rayon jaunâtre vint entraver mon champ de vision, et par pur instinct de défense, je fermai les yeux et commençai à agiter mes bras dans tous les sens, comme si je chassais un nuage de moustiques avides de sang chaud. Des rires étouffés s'élevèrent suite à mes gestes et la lampe torche se détourna de moi, pour mon plus grand bonheur. Devant moi, assises sur des chaises de jardins vertes, les cheveux toutes les deux nattés et un bol de pop-corn à même le sol, se trouvaient Chloé et ma cousine, seule. Un petit sourire occupait leurs lèvres et elles se jetaient des coups d'œil malicieux alors que je tentais de chasser ces fichus points jaunes de ma vision.

MOI, DARLAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant