10||°Mission : lâcher de l'est}

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Tante, n.f. : personne qui te tape sur les nerfs H24 pour que tu restes avec ta cousine, et qui, quand tu n'as pas envie de faire quelque chose, t'y oblige sans le savoir.

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- BIEN SÛR QUE TU PEUX Y ALLER DARLA. JE NE VOIS PAS OÙ EST LE PROBLÈME ?

- Mais Tatie, le garçon avec qui je vais être ce soir est loin d'être un ange tu sais, complétai-je en essayant de paraître la plus crédible possible.

- Oh oui ! Même qu'il fume et qu'il boit comme un trou ! ajouta Fanny, se tenant à mes côtés.

J'étais impressionnée par son comportement si changeant : je ne lui avais rien demandé, et pourtant, elle s'était mise en quête de m'aider en dégoûtant sa mère du gars avec qui j'allais sûrement passer la soirée. Tatie Bio, trop occupée à regarder son émission culinaire, semblait à peine écouter ce que nous lui racontions, Fanny et moi, tant et si bien que j'en vins à me demander si elle comprenait réellement le message que nous essayions de lui faire passer.

- Et alors ? Je pense que tu es assez grande pour savoir ce qui est bien ou non, Darla ? fit-elle en détournant brièvement les yeux de son programme.

- Maman ne m'aurait jamais laissée y aller, conclus-je avec un air quelque peu supérieur, comme pour rappeler à ma tante la sagesse dont faisait preuve son aînée.

- Écoute, ma puce. C'est les vacances, et pendant les vacances tu peux faire ce que tu veux. Tant que tu ne deviens pas une délinquante et que tu ne fugues pas toutes les nuits, je ne vois pas en quoi je devrais t'interdire de vivre ta vie. Lâche un peu de l'est, je pensais que c'était tout ce que tu voulais ici : t'en aller le plus souvent possible de la ferme. Alors pourquoi crois-tu que je ne vais pas te laisser partir ?

- Pour rien, débitai-je en tournant les talons. Merci tatie.

- Fais attention sur le chemin par contre ! s'exclama la grande femme aux mèches orangées, toujours depuis son canapé.

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Ok, ma tentative d'esquive avait été vouée à l'échec. Désormais, il ne me restait plus qu'à affronter mon destin, tout en espérant ressortir vivante de toute cette histoire.

Comme s'il l'avait fait exprès, mon vélo n'avait pas déraillé une seule fois durant tout le trajet qui me séparait du corps de ferme jusqu'à la place du village. Cette même place où j'attendais, assise sur un des bancs en fer forgé, quelques cheveux volants un peu trop près de ma bouche, les joues rougies par l'effort et quelque peu transpirante, que Noé ne daigne venir me chercher. Pour mon plus grand damne, mon téléphone n'avait pas assez de batterie pour que je puisse l'utiliser jusqu'à ce que le jeune homme n'arrive. Alors, balayant une dernière fois la place du regard, je m'amusais à shooter dans un caillou blanc, abîmant le bout de mes chaussures déjà usées par les années écoulées.

- On attend son prince charmant ? questionna une voix douce, reconnaissable entre toutes.

Oh non. Ulysse.

- Pas vraiment, dis-je en feignant un petit rire forcé.

Tout ce que j'avais envie de faire, là maintenant, c'était de me terrer dans un trou si profond, que les archéologues mettraient des décennies avant de retrouver mon corps chétif. Pourquoi était-il là ? Pourquoi fallait-il qu'il vienne me voir alors que le moment tombait mal, très très mal ? Non pas que je ne souhaitais pas passer du temps avec lui, loin de là même ! Mais à vrai dire, si jamais Noé arrivait à l'instant même, je ne saurais comment expliquer à l'un ce que je faisais avec l'autre. Bon dieu... Ces mecs vont finir par me rendre folle !

MOI, DARLAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant