Décevoir, v. : verbe ayant un impact particulier lorsqu'il est prononcé par une personne chère.
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JE SUIS DÉÇU.
Ces mots résonnaient dans mon esprit depuis que mon oncle les avait soufflés, dans un murmure presque inaudible, mais qui, pourtant, voulait tout dire. Je l'avais déçu, alors que je m'étais promis de ne jamais le faire. J'adorais mon oncle, c'était la seule personne que j'appréciais réellement dans cette baraque et le voir ainsi, les yeux inexpressifs, en colère face à ce que j'avais entrepris, m'avait complètement retournée, tant et si bien que je restais là à me morfondre, assise sur la marche de la porte d'entrée.
J'avais l'air misérable ainsi, les cheveux secs volant et heurtant mon visage, les yeux rivés vers le sol en terre battue de la cours. J'avais l'air misérable mais je m'en fichais. Au fond de moi, j'aurais préféré que mon oncle me gronde et me force à travailler avec lui, plutôt qu'il ne dise rien et se contente de murmurer que je l'avais déçu. C'était horrible, je détestais cette phrase, surtout lorsqu'elle émanait de quelqu'un que j'appréciais. Je détestais décevoir les autres, ça me donnait envie de pleurer. Mais là, aucune larme ne semblait vouloir s'échapper de leur prison, et même en fixant un point fixe sans cligner des yeux, je n'arrivais pas à faire sortir une larme salée. C'était comme si le monde ne voulait pas que je pleure, que je montre que cette phrase m'avait blessée davantage que ce qu'Oncle Paul avait dit avant. Après tout, c'était l'été et durant l'été, il ne fallait pas pleurer.
Il ne fallait pas pleurer car le soleil était là, il ne fallait pas pleurer car on riait. Il ne fallait pas pleurer car c'étaient les beaux jours de l'année, il ne fallait pas pleurer car on passait son temps à sourire et à s'amuser. Non, il ne fallait pas pleurer, pas pleurer en été. La vie était belle après tout, et qui ne s'était pas déjà fait engueuler par quelqu'un ? Qui n'avait jamais déçu un proche ? Personne, tout simplement car nous sommes humain, nous faisons des conneries, nous mentons, nous jouons, nous rions et nous recommençons. C'était comme un cycle vicieux, le cycle de la vie.
Sur cette dernière pensée, qui m'avait permise de relativiser vis à vis de ma condition, je me relevai doucement, un faible sourire au bord des lèvres. La cour était toujours déserte, néanmoins, on percevait au loin le ronronnement du moteur du tracteur, ainsi que le son des sabots du cheval de Fanny. Elle devait sûrement se trouver là-bas, à chouchouter ce canasson alezan, et heureusement ! Je n'aurais pas su la supporter une minute de plus après avoir appris que c'était elle qui avait appelé son père pour le quad. Ce n'était qu'une sale peste qui me pourrissait la vie à longueur de journée, et ce, même si elle jouait la carte de la fille sympa avec moi.
Je frottai légèrement mon short rouge, enlevant la poussière qui avait élu domicile dessus et cherchai quelque chose à faire du restant de ma journée. Il fallait que je fasse profil bas, surtout si je ne souhaitais pas que mes parents soient informés de mes exploits, mais dans ce cas, que pouvais-je bien faire pour passer le temps ? Il était hors de question que je passe l'après-midi en compagnie de ma cousine, Chloé devait probablement être déjà avec elle, et avec Adrien j'avais donné ce matin : je le soupçonnais de me faire la tête depuis notre escapade à travers champ. En réalité, il ne me restait pas grand monde avec qui passer la journée, mis à part Noé ou ma tante, mais ça, il en était hors de question.
Personnellement, remplir des bocaux en verre de confiture ne me passionnait pas, de même que lire un bouquin à l'eau de rose assise sur une chaise de jardin. Non, vraiment pas. Moi ce que j'aimais c'était m'amuser, découvrir de nouvelles choses - du moins tant qu'il ne s'agissait pas d'une ferme ou d'animaux - et passer du temps en compagnie de personnes de mon âge, pas de ma tante quadragénaire ! Alors si je voulais passer une bonne après-midi, il ne me restait plus qu'une seule chose à faire : appeller Noé.
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MOI, DARLA
Teen Fiction- "Allez ça va être cool, Darla ! Pense qu'on ne vit qu'une fois ! - Ouais bah si c'est pour finir estropiée par une poule, j'préfère mourir en paix sur mon canapé !" ||° Fille de la ville, petite princesse à ses...