Chapitre 17

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En hurlant ces mots, Stephen avait plongé la tête la première dans la cabane en prenant bien soin de claquer la porte à l'aide de son talon. Il était tombé à genoux aux pieds de Nora et son visage était déformé par la peur.

Cette vision ne rassura guère la jeune femme, elle l'horrifia même : Stephen semblait toujours sous contrôle et Nora le voyait pour la première fois déstabilisé. Il s'écroulait au même titre que la terre sous leurs chaussures.

Un nouveau bruit, plus perçant, transperça l'air et Nora ne put retenir un cri de frayeur. Stupéfait par ce hurlement déchirant, Stephen reprit un peu de contenance et vint plaquer délicatement une de ses mains sur la bouche de la jeune femme avant de passer son autre bras autour de ses épaules. Il la berça et désormais, seules leurs respirations haletantes se faisaient entendre par-dessus les bombes qui saccageaient Baltivia.

Deux autres bruits ont rapidement succédé aux premiers, puis plus rien.

Stephen, qui s'était recroquevillé sur le corps de Nora, libéra sa bouche et se décrispa avant de frictionner les bras de son alliée.

— C'est fini, Nora. C'est fini, répéta-t-il pour lui-même.

Il n'avait pas vu que Nora avait pleuré pendant l'attaque : ses joues étaient humides et son teint blafard contrastait avec ses cernes violacés. Il voulut sécher ses larmes d'un pouce mais Nora fut plus réactive et passa négligemment son avant-bras sur son visage en reniflant sans une once d'élégance.

— C'est bon, ce n'est rien, rétorqua froidement Nora, ne voulant pas passer pour une faible. Que s'est-il passé ? Quels étaient ces bruits ? De quelle offensive s'agit-il ?

Avec toutes ces questions, Stephen aurait pu perdre le fil, mais il avait consciencieusement écouté les dires de Nora comme si le fait d'entendre la voix de la jeune femme lui rappelait qu'il était encore vivant et qu'il avait pu se réfugier à temps.

— Je ne suis pas sûr de pouvoir répondre à toutes tes questions, répondit-il, penaud. Je ne pense pas avoir tous les éléments.

— Dis-moi ce que tu sais, alors.

L'autorité dans la voix de Nora masquait à la perfection la peur qu'elle éprouvait réellement. Elle avait conscience qu'une chose dramatique venait de se produire : un pincement au cœur était apparu lors du premier bruit et il ne l'avait toujours pas quittée. Ce pincement, de faible intensité et pourtant d'une douleur intense, renforçait son idée de « scénario catastrophe ». Elle voulait lâcher prise ; pleurer jusqu'à la sécheresse de ses yeux, claquer la porte et sortir rejoindre sa famille, ou simplement, fermer les yeux et retourner vingt ans en arrière, quand elle était une enfant heureuse sur une île où il faisait bon de vivre.

Mais elle ne pouvait pas lâcher prise. Pas face à ce gouvernement impitoyable qui aurait sa peau dans la seconde si elle osait un relâchement.

Tendue, elle respira fortement en essuyant ses dernières larmes.

— Dis-moi ce que tu sais, alors, répéta-t-elle plus doucement.

— Très bien, se résigna Stephen alors qu'il craignait la tournure qu'allait prendre la suite de cette conversation. Je commence par quoi ?

— L'essentiel. Commence par ce qui te semble le plus important.

— Le gouvernement a lâché des bombes : ce sont les bruits que tu as entendus.

— Des b... bombes ? s'offusqua Nora.

— C'est assez éprouvant, évite de me faire répéter des choses aussi douloureuses, s'il te plaît.

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