Ça sentait l'humidité et le renfermé dans la pièce. Il y faisait sombre, très sombre. En réalité, il était impossible de distinguer la moindre lueur de lumière, le moindre contour d'une silhouette ou d'un meuble. Rien n'était distinguable à moins que la porte ne soit ouverte.
Nora avait bien essayé les premiers jours de se rapprocher de la porte pour voir à travers la serrure, ou bien regarder en dessous. Mais rien. Il n'y avait rien de l'autre côté à part le prolongement du néant.
D'un coup d'épaule, Nora se gratta la joue. La piqûre reçue sur la plaine la démangeait encore. Si elle avait pu se voir, elle verrait surement une énorme plaque rouge orner son visage. Mais elle ne voyait rien, plus rien. Bientôt, elle ne saurait plus à quoi ressemble le rouge.
L'oreille tendue, Nora entendit un son. Un bruit sourd qui se répétait à rythme régulier et qui semblait se rapprocher.
Clic
Clac
Clic
Clac
Clic...
Des pas. C'étaient des pas. Des pas qui s'arrêtèrent nets avant que la porte ne soit ouverte.
De la lumière. Nora vit de la lumière, elle distinguait même des couleurs. Les contours de la lampe étaient rouges, elle n'avait pas oublié cette couleur.
Nora ne prit pas le temps d'analyser les différentes nuances de bleus qui se mélangeaient dans le couloir que la porte se flanqua.
Désormais, Nora n'avait que trois choix.
Fermer les yeux.
Fixer une lumière aveuglante.
Batailler le regard glacial de Carter Rosenbach, cet homme immonde qui lui faisait face avec un sourire ignoble.
Nora ne lâcha rien et le regarda. Elle en avait peur mais faisait tout pour le cacher. Malheureusement, ses tremblements dus au froid n'aidaient pas à sa crédibilité. Carter s'amusait d'elle et son sourire se fit plus hautain.
- Pourquoi ne pas me tuer maintenant ? enragea Nora qui n'avait pas l'intention de rendre les armes.
- Parce que voir ta sale petite gueule souffrir est le mets le plus délectable que l'on ait pu me servir, espèce de garce, répondit froidement le gouverneur.
La violence de ses mots apeura davantage Nora qui voulut reculer bien qu'elle collait déjà au mur. Son destin serait plus funeste qu'elle ne l'avait espéré. Périr dans les cachots était la pire des morts. Nora ne le savait pas encore mais elle se doutait de la véracité de la légende.
Elle se racla la gorge avant de cracher aux pieds de Carter. Ce dernier se mit à s'esclaffer de plus belle.
- Tu es pathétique, pauvre enfant !
Alors que Carter rebroussait chemin pour partir sur cette victoire, le sol, le plafond et les murs se mirent à trembler. Il se retourna pour regarder Nora : elle semblait aussi surprise que lui. Son sourire suffisant disparut pour laisser place à une expression d'incompréhension
- C'est quoi ce bordel ? s'exclama le gouverneur, souhaitant contenir en vain sa panique.
Il ouvrit la porte et les tremblements s'amplifièrent. Par dessus les tremblements, des cris se firent entendre.
Des cris de haine.
Des cris de rage.
Des cris de pauvres.
Un sourcil levé, les lèvres retroussées, Nora osa maintenant regarder son bourreau dans les yeux :
- Et toi, tu es fini, pauvre Carter !

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UnFortunéum
Fiksi IlmiahCarter Rosenbach prit le pouvoir de Baltivia 20 ans auparavant. Il créa alors le Fortunéum : gouvernement oppressant où les pauvres sont exploités et encerclés par les riches. Depuis cette époque, l'inégalité règne sur l'île et personne n'ose trouve...