Chapitre 20

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— Tu ne crois pas que tu y as été un peu fort ?

— On était d'accord sur le sujet, Emy.

Une pause et la même voix reprit.

— Et puis, le mal est fait.

Un soupir. Lasse et désolé.

Nora était à terre, la tête délicatement posée sur les genoux de Stephen. Emy s'était

empressée de couvrir son amie de toutes les couvertures qu'elle avait trouvées. Une fois

Nora emmitouflée, Emy s'était posée à son chevet, en la bordant jusqu'au menton. Elle

passait et repassait ses mains dans les cheveux de sa meilleure amie. Pensait-elle qu'elle

le faisait pour apaiser Nora, mais il était clair que la raison principale était tout autre :

elle était tellement ébranlée suite à l'évanouissement de son amie qu'elle ne savait pas

comment occuper ses mains. D'où les caresses dans les cheveux.

Si la jeune Jenkins avait été éveillée, elle aurait pu lire dans les yeux d'Emy tout le

dégoût qu'elle éprouvait pour elle-même. Elle avait réussi à ravaler sa bile, mais

quelques larmes s'échappaient. Comment avait-elle pu oser faire cela à sa meilleure

amie. Elle avait été fourbe et mesquine, alors que son amie avait été loyale et inquiète.

Pouvait-elle encore qualifier leur relation d'amicale après ce qu'elle avait fait ?

— Sa main.

Emy détourna le regard vers cette voix. Bien qu'elle souhaitait détester cet homme

d'avoir ainsi manipulé Nora, elle n'y arrivait pas. Stephen avait ce quelque chose dans la

voix, ce petit détail qui prouvait qu'il n'avait pas souhaité en arriver là. Lui aussi semblait

victime de ses actes, visiblement.

— Quoi, sa main ? cracha-t-elle le plus froidement possible.

— Peux-tu lui dégager le bras, s'il te plait, répondit calmement Stephen bien qu'il

n'ait pas aimé le ton que venait d'employer Emy. J'ai besoin de connaître le résultat.

Emy fronça les sourcils. Elle n'aimait pas ça du tout. Stephen avait ses caprices des

gens des quartiers périphériques. Certes, il semblait éprouver des sentiments – ce qui se

faisait rare chez la population dont les poches étaient bien remplies –, mais il avait cet

air dédaigneux et suffisant, caractéristique de son espèce. Il osait demander aux plus

faibles car ces derniers ne pouvaient rien lui refuser. Un riche, en somme. La jeune

Clarks toisa le garde un instant avant de se reconcentrer sur son amie. Seule la santé de

Nora pouvait compter en cet instant. Sa santé et rien d'autre.

— Écoute Emy, nous avions un accord, reprit Stephen, moins calme ce coup-ci. Tu

étais consentante alors maintenant, va jusqu'au bout.

Emy avait envie de littéralement cracher au visage de l'homme qui l'observait

assidûment. Pourquoi avait-elle accepté déjà ?

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