Chapitre 11

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Noha mange lentement, il connait sa limite, et à la première nausée, il repousse le plat. Je l'observe sans rien dire, j'ai mangé plus tôt, je veux être sur le qui-vive s'il se sent mal. Depuis son réveil, il est bien silencieux... un peu trop même... Et ça m'agace. Aurait-il changé d'avis ? Il n'a plus envie de me parler... Je ne peux pas rester sans réponse maintenant ! Surtout après avoir lu ces mensonges.

J'ai besoin qu'il me confirme que ce n'est que ça... D'horrible mensonge.

- Je meurs de faim, mais je n'ose pas manger plus, dit-il et je cille pour revenir au présent.

- Je pense que c'est mieux, Noha, tu manges moins, mais plus souvent. Je ne veux pas que tu vomisses... Pas maintenant que tu es en meilleure forme.

Avec un faible sourire, il me tend le plateau que je ramène dans la cuisine. Je ne prends pas le temps de rincer et nettoyer, je remets un bois dans la cheminée, retourne auprès de lui et m'allonge silencieusement. Je patiente. J'attends qu'il se lance de lui-même. Je refuse de le brusquer... Mais je termine par détourner la tête, agacée.

Il sourit, ce con ! Il se moque de moi ? Lentement, Noha me fait également face, et ses lèvres redescendent et une tristesse s'étend sur son visage. Machinalement, le besoin de le réconforter est trop grand, et je tends ma main vers la sien et entrelace nos doigts. Je l'encourage, ce n'est que ça.

- Je t'ai dit que j'étais le premier né, commence-t-il, mon père m'a eu avec une femme extraordinaire. Ils s'aimaient, tous les deux, mais, la différence du milieu sociale était un problème constant pour tous les deux. Alors, ils se sont quittés, avec regret bien sûr...

- Mais... ton père t'as abandonné ? M'indigné-je, Noha fronce les sourcils.

- Bien sûr que non, il ignorait mon existence, tout comme ma mère. Réplique-t-il comme si j'étais débile, je serre les dents et le dévisage pour qu'il poursuive. Dès que papa a annoncé sa rupture aux siens, ils l'ont marié à cette femme...

- Un mariage forcé ? M'horrifié-je cette fois, et Noha rit nerveusement, agacé par mes questions.

- Personne ne l'a forcé, Eliane, les parents respectifs ont fait en sorte que leurs enfants se rencontrent, et ils se sont plu ! M'explique-t-il. Quand maman a su qu'elle était enceinte, elle voulait le dire mais papa était déjà fiancé... alors, elle lui a juste présenté ses félicitations et s'en est allé. Durant quatre ans, j'étais le plus heureux des bonhommes ! Mon père ne me manquait pas une seconde, pourtant, elle me parlait de lui...

- Ta mère semble être une femme extraordinaire...

- Semblait, Eli, maman est tombée malade, elle a eu un cancer à l'utérus, et malgré l'ablation de la tumeur, elle ne s'en est jamais remise. Les chimios la rendaient faible, elle était... Epuisée... La tumeur est revenue et s'étendait toujours plus haut. Elle sentait sa fin approcher, alors elle l'a appelé.

- Ton père ? Demandé-je bêtement, et j'ai droit à un regarde noir, je déglutis. Désolée...

- Mon père est venu chez nous, tout est allé si vite, je n'ai pas compris, j'avais six ans à ce moment-là, mais cet homme qui me regardait avec terreur était là... Il apprenait que j'étais son fils... Il apprenait que celle qu'il n'a jamais cessé d'aimer souffre... Et il a pleuré... Bafouille-t-il en se perdant dans ses souvenirs. Je me souviens lui avoir fait un câlin pour le consoler, innocemment, parce qu'il me faisait de la peine, et ses larmes ont redoublées...

- Noha, c'est tellement injuste, soufflé-je, les larmes aux yeux, sa main se resserre sur la mienne, il me console silencieusement, le temps de trouver la force de poursuivre.

Pour l'amour de l'orOù les histoires vivent. Découvrez maintenant