Introduction

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Une vive lumière l'éblouit, elle laissa échapper un grognement en refermant les yeux. Tout son corps était ankylosé mais, malgré tout, elle essaya de bouger. Des sangles lui bloquaient les chevilles, les genoux et les poignets.

Un bip incessant lui perça les tympans. Elle ignorait où elle était, ni même pourquoi. Des bruits de pas se rapprochèrent d'où elle était allongée, des voix retentirent enfin :

- Donc... contrôle des volatiles, en conclut une.

- Exactement, répondit en une seconde après un soupir. Je ne comprends vraiment pas pourquoi 000-C nous a ramené celle-ci alors que, apparemment, il y aurait un Destroya qui arrêterait le temps... ou une autre qui contrôlerait sa propre ombre.

C'est à ce moment précis que Morgane comprit.

La Destroya n'était plus dans la Zone Fantôme. La panique reprit le dessus, elle commença à forcer sur les sangles pour s'en libérer. Elle bougea la tête dans tous les sens avant de hurler comme une possédée. Deux personnes, deux hommes, se ruèrent sur elle, en blouse blanche et avec des masques chirurgicaux cachant le bas de leur visage, afin de la maintenir fermement.

Elle était de retour à Avignon. Dans la base de l'État.

- LAISSEZ-MOI PARTIR ! aboya l'adolescente, au bord des larmes et la voix brisée. J'AI RIEN FAIT !

- Arrête de t'agiter, fit un des inconnus en lui attrapant la tête. Ça ne sert à rien.

Morgane continuait de crier, espérant que quelqu'un de bienveillant puisse entendre ses prières et son appel à l'aide. La Destroya mordit la main d'un des hommes qui voulait la faire taire, jusqu'au sang, un mélange de fer et de latex prit en assaut ses papilles gustatives. L'homme en question recula en grognant, les yeux sur sa main ensanglantée et son gant déchiré.

- Quelle tarée ! cracha-t-il. Il fallait qu'il nous ramène la seule qui est totalement barjot !

- Tous les Destroyas sont ''barjots'', rappela l'autre.

- Ah ouais, c'est vrai. Même ces putains de gosses de l'équipe 0.

- Ramène les autres. On va en finir avec elle.

Morgane serra les dents, les yeux écarquillés et brûlés par ses propres larmes. Cette fois-ci, c'était fini. Elle allait mourir. Elle continua à hurler jusqu'à s'en époumoner, une violente quinte de toux la fit enfin taire. Sa respiration était saccadée, elle avait l'impression que son cœur allait exploser dans sa cage thoracique.

L'attaque de l'État sur la Ville. Le retour de Clément. Sa confrontation avec lui. La mort de Kim. Son évanouissement. Morgane se rappelait de tout, tout était clair dans sa tête. Où étaient les autres ? Était-ce seulement un cauchemar sans fin où Baraka l'avait enfermée ? Quelqu'un allait-il venir la secourir ? Tous les Destroyas étaient-ils dans la même situation qu'elle ? Étaient-ils tous morts ?

Axel allait-il la sortir de là ?

- Axel, soupira-t-elle entre deux sanglots.

Baptiste pouvait la secourir, lui ! Il maîtrisait bien l'espace et le temps ! Alors pourquoi la laissait-elle seule, face à son terrible destin ? Morgane ne voulait pas mourir, pas maintenant ! Et encore moins dans les laboratoires d'une blancheur morbide de l'État !

Elle se maudissait d'avoir un pouvoir qui la faisait seulement contrôler les oiseaux. Pourquoi n'avait-elle pas eu quelque chose de bien plus utile, dans cette situation ? La Destroya rugit de rage et de désespoir avant de se débattre de nouveau, en vain. Toute résistance était inutile.

Échec et mat, Morgane.

- 000-C aurait pu nous Le ramener, cracha l'homme qui lui tenait fermement la tête. Mon Dieu... enfin. J'espère qu'elle va nous être utile, elle.

Des pas et des voix s'approchèrent. Une porte s'ouvrit avec violence, quelqu'un fit d'une voix furieuse :

- Et cette folle m'a mordu ! Je n'arrive pas à y croire !

- Destroyas de merde, rétorqua un autre d'une façon paradoxalement plus calme.

- De vraies plaies, déclara une troisième voix, une voix féminine cette fois.

Ils se penchèrent tous vers l'adolescente, le regard grave et sévère. La Destroya ferma les yeux, ne supportant pas de voir ces quatre paires de yeux rivées sur elle, comme si elle était un ridicule cobaye. Elle était terrifiée et affolée. La seule femme du groupe fronça les sourcils avant de faire un sourire en coin cruel.

- Alors elle ressemble à ça, cette folle qui t'a mordu ?

- Ouais, répondit celui que Morgane avait blessé.

- Regarde-la. Elle fait pitié à pleurnicher comme une gamine. Ah... je m'attendais à mieux de la part de 000-C.

- On s'en fiche, cracha un des trois hommes. Tant qu'elle nous sert à quelque chose.

- Surtout tant qu'elle nous sert à Le capturer, Lui, remarqua la femme en se redressant. Enfin. Préparez la seringue.

Les yeux de l'adolescente se rouvrirent brutalement. Seringue. Ce mot résonna dans sa tête comme le fracas d'une sinistre cloche. Un frisson parcourut tout son corps, les dents de la Destroya s'entrechoquèrent brutalement.

Complètement désespérée, Morgane se remit à hurler. Elle cria à l'aide, que l'on la sorte de cet Enfer, les prénoms de ses amis. Les inconnus la laissèrent s'essouffler en la jugeant du regard, l'un d'entre eux sortit une longue seringue d'un tiroir métallique. La Destroya sentit son sang se glacer quand elle vit la fine et grande aiguille menaçant d'une seconde à l'autre de pénétrer ses veines. L'homme qui tenait cette prochaine arme du crime émit un léger rire avant de dire :

- J'espère que tu n'as pas peur des seringues et des piqûres, jeune fille. Si tout se passe bien et si tu te laisses faire, surtout, tu ne souffriras pas.

Une voix si calme et angélique pour un homme au rôle si mauvais. La Destroya ne tenta même plus de se débattre, elle fixa le plafond d'un regard vide, mort. C'était terminé. Morgane allait mourir, attachée à un lit d'opération et entourée d'inconnus qui la méprisaient. Pourquoi continuer à se battre ? La Destroya avait déjà perdu et elle savait que c'était sans espoir.

- Tu sais pourquoi 000-C a choisi celle-là ? demanda l'un des hommes.

- Non, répondit la femme d'un ton sec. Probablement parce qu'il n'est pas arrivé à L'attraper.

- Comment veux-tu L'attraper, Lui, aussi, rétorqua un autre inconnu. C'est le Destroya le plus puissant de tous.

- Mais c'est surtout le Destroya le moins Destroya de tous.

L'aiguille de la seringue s'enfonça dans la fine peau de l'intérieur de son coude. Morgane hurla une nouvelle fois, un liquide légèrement bleuté se répandit dans l'intégralité de son corps. Elle toussa bruyamment, étouffée par ses pleurs inconsolables, avant de gueuler une toute dernière fois, malgré la douleur qui prenait en assaut sa gorge :

- AXEEEEEEEEEL !

Puis plus rien. Ses yeux se fermèrent tout seuls. L'obscurité engloutit son âme. La Destroya ne vit plus, ne sentit plus, n'exista plus. Paralysée dans les ténèbres, elle se laissa sombrer.

Morgane avait disparu.

DESTROYAS III : War is the AnswerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant