Chapitre 13

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- Qu'en penses-tu ?

- J'en pense que tu pars totalement en couille, Baptiste !

Caché derrière des poubelles pestilentielles, dans le tunnel qui reliait la cour de l'hôtel et le reste de la Ville, Axel ne pouvait s'empêcher d'espionner le chef de la Ville et son bras droit. Il savait pertinemment que ce qu'il faisait était mal, et que s'il se faisait attraper ici il n'allait pas s'en sortir indemne, mais la tentation avait été trop forte. Le Destroya jeta un furtif coup d'œil vers la cour intérieure de l'hôtel, Mathys se tenait droit devant Baptiste, lui qui était assis sur son trône de fortune, les jambes croisées.

Leur chef émit un rire avant de dire :

- Je m'attendais à une réponse bien plus constructive, venant de toi. Développe.

- Mais depuis quand tu t'es dit qu'aller directement attaquer Avignon était une bonne idée ?! Ici, on a plus ou moins l'avantage, mais au sein des remparts ? T'es totalement fou !

- Mais non, mais non. Tu t'inquiètes pour rien.

- Et comment tu veux pénétrer dans Avignon, au juste ?

- Armande peut se téléporter, répondit le chef en levant les yeux au ciel, comme si ce qu'il disait semblait bien trop évident. Elle pourrait nous ouvrir le passage. De plus... maintenant, nous avons aussi André. Et André peut tout désintégrer, je te signale.

- C'est de la folie, souffla Mathys.

- Ah, cesse tes idioties. Cela me fatigue, de jouer la victime.

- Donc tu comptes vraiment nous envoyer nous faire massacrer, un par un ?!

- Qu'est-ce que tu m'énerves, Mathys, cracha Baptiste entre ses dents. Depuis quand te permet-je de me tutoyer ? Tu n'es rien face à moi, alors si j'étais toi, même si jamais je serai aussi ridicule que le minable Destroya qui me fait face, alors ferme-la et obéis-moi. Arrête ta crise d'adolescence, ça ne marcherai pas avec moi. À mes yeux, tu n'es qu'un... enfin, je parle trop. Hors de ma vue.

Son bras droit marmonna quelque chose qu'Axel ne put comprendre. Alors que Mathys venait à peine de tourner les talons, leur chef fit d'un ton plus calme :

- Oh, et oui... dis à Axel de venir ici. Je sais qu'il est là. Il n'est pas très discret, comme garçon.

Son sang se glaça instantanément, il se figea sur place. Le Destroya avait oublié que Baptiste connaissait tout sur tout... mais comment ? L'adolescent était bien caché, pourtant ! Baptiste émit un léger rire amusé.

- Franchement... je sais que tu es derrière cette poubelle. Montre-toi. Enfin... ah, tu es encore là, toi ? rajouta-t-il en lançant un regard mauvais à Mathys. Je t'ai dit de déguerpir, sur-le-champ !

Son bras droit le fixa avec des yeux noircis par la colère, avant d'obéir désespérément à son ordre. Il passa devant la poubelle avant de s'arrêter subitement et de tourner la tête vers Axel, toujours accroupi derrière la benne à ordures.

- Jamais tu retiendras la leçon, marmonna le bras droit de Baptiste, la mâchoire serrée.

- Mathys, le menaça leur chef d'un ton froid, qu'ai-je exigé ? Dois-je te le rappeler ?

L'adolescent aux cheveux bruns s'empressa de quitter les lieux, d'une démarche rapide, les yeux écarquillés par la révolte et les poings serrés avec violence. Un silence s'installa, le cœur d'Axel battait à la chamade : cette fois-ci, c'était terminé pour lui. Il n'aurait probablement jamais dû entendre cette conversation, ni même mettre un pied ici, Baptiste allait certainement lui faire payer le prix pour avoir entendu ce qu'il devait ignorer. Le Destroya ferma les yeux et la panique lui fit perdre tous ses moyens, le temps se stoppa tout autour de lui, les aiguilles des horloges se figèrent.

- Jamais tu pourras me fuir, même en arrêtant le temps. As-tu oublié qui je suis ?

Axel releva brusquement la tête, les yeux écartés et les poumons en feu. Baptiste était juste derrière lui, à côté de la benne à ordures, ce même sourire peint sur le visage. L'adolescent se mit à tousser, il n'arriva plus à contrôler son pouvoir et tout redevint normal... sans que personne ne le remarque.

- Comment...

- Ai-je fait pour sentir ta présence ? Pour me retrouver à quelques centimètres de toi, d'une seconde à l'autre ? Pour être si... imprévisible ?

Le Destroya hocha lentement la tête, ne sachant pas quoi réellement lui répondre. Le chef de la Ville lâcha un soupir, lui tourna le dos puis poursuivit :

- Chaque chose en son temps. Si tu es ici, c'est pour t'entraîner, non ?

- Oui... mais...

- Mais quoi ?

Les yeux de Baptiste étaient encore plus froids que la glace qu'il contrôlait. Mais, dans en certain sens, son regard était tout aussi brûlant : brûlant d'ambition, brûlant d'intelligence, brûlant de stratégie. Quand l'adolescent y repensait, il arrivait à la même conclusion : Baptiste était bien imprévisible comme il le prétendait, mais pas seulement. Il était aussi fourbe, caché, mais sincère dans ses propos. Un chef qui avait à se faire respecter parmi les siens. Un homme de parole.

Axel prit son courage à deux mains et lui demanda, les yeux dans les yeux :

- Qu'est-ce que Mathys voulait dire, par ''attaquer Avignon'' ? Vous voulez vraiment dire que...

Il laissa sa phrase en suspens quand il vit le regard foudroyant du jeune homme. Personne ne parla pendant un moment, une ambiance pesante s'écrasa sur l'adolescent, jusqu'à que Baptiste fasse un maigre sourire. Le chef de la Ville lui fit signe de le suivre, tous les deux rentrèrent dans la cour intérieure de l'hôtel, qui était devenue le second endroit qu'Axel fréquentait le plus. Le jeune homme s'assit sur sa chaise en plastique et commença alors ses explications :

- Les attaques de l'État m'énervent au plus haut point, et devoir les subir devient de plus en plus insupportable. J'envisage alors de sortir mes griffes et de passer à l'offensive. Mais cette idée ne plaît pas à tout le monde, à ce que je constate...

Baptiste haussa les épaules, son sourire s'élargit.

- Bah, qu'importe ! Je n'ai pas besoin de l'avis de cet adolescent qui se croit plus intelligent que les autres. Un adolescent reste un adolescent.

- Merci, je suppose, souffla Axel, légèrement vexé.

- Oh, je ne prétend en aucun cas que tu sois aussi stupide et fermé d'esprit que lui, loin de là. C'est que vous êtes vraiment impulsifs, à ce moment précis de votre vie. Et vraiment pénibles, aussi.

Le Destroya qui arrêtait le temps avait l'impression que leur chef disait ça comme s'il n'avait jamais traversé cette période.. Baptiste se releva avec vélocité avant de faire craquer ses épaules. Il déclara alors :

- Allons ! Assez parlé, il est temps de reprendre notre entraînement. Tu as encore beaucoup à apprendre, donc...

Une violente explosion osa lui couper la parole.

DESTROYAS III : War is the AnswerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant