Blue Sword (Tome 2) - Haunted World

4. Vision

Musique : Dir En Grey - Uroko

   Il ne pouvait s'ôter cette pensée de l'esprit. Après tout, c'était le seul survivant de son village. Et il avait échappé à ce sordide massacre. De par la perte d'êtres chers, la culpabilité et la faim, son ventre hurlait de douleur en émettant des plaintes régulières. Son bras semblait de nouveau s'être endormit et restait immobile. Il avala une gorgée d'eau de la gourde qu'il avait emportée et arpentait le long chemin de terre. Il n'avait pas pu supporter de rester dans ce village maudit et l'avait quitté avec le peu d'argent qu'il avait trouvé et de l'eau du puits. De peur et de faim son ventre geignait. Le jeune homme avait peur de ce qu'il était en train de devenir. Il avait eu la force de voler un peu d'argent et d'eau dans la maison des Hamersons, des commerçants. Jamais après avoir assisté à cela le Randy d'avant n'en aurait eu la force. Il se sentait responsable de tous ces morts et avait l'impression qu'un grappin traversait son ventre et qu'il traînait tous les corps derrière lui. Oui, il était bien différent désormais. Car s'il était resté le même, il aurait mis fin à ses jours. Ce n'était pas du courage qui lui avait manqué, mais un genre d'instinct sous-jacent qui le poussait à survivre. Il n'avait aucune idée de pourquoi il faisait cela, mais ça n'avait pas d'importance. Son bras quant à lui semblait avoir perdu une grande partie de sa peau et du sang suintait légèrement du foulard. Il marcha ainsi une journée et demi en ne croisant que la charrette d'un boutiquier ambulant. Ce dernier serait probablement assez déçu de l'accueille qui lui était réservé un peu plus loin.

   Au bout de longues heures de marche Randy parvînt enfin à la ville voisine. Il cacha son visage sous la capuche de la houppelande et entra par la rue principale. Il s'agissait de Caral, la dernière ville importante au Nord-Est de l'empire de Grisma avant le massif des Lardennes. Il s'agissait d'une ville-jonction importante par laquelle transitait les voyageurs de tout le Nord-Ouest vers la cité de Elme et inversement. Caral était donc en permanence traversée par des voyageurs humains et elfes et par des marchands. Randy se fît tout petit et acheta quelques victuailles de ses maigres richesses volées. Le pain et les pommes eurent un goût terriblement amer. Mais quelque chose lui disait que cela ne venait pas de la nourriture mais de lui. La ville était plutôt animée et des barbes jouaient leurs mélodies dans les rues. Mais Randy n'avait pas la tête à ça. Il était à bout de force. Il lui sembla qu'il pourrait tomber et mourir d'une seconde à l'autre. Il avait des côtes cassées, une entaille à l'épaule, des contusions un peu partout, une douleur dans l'arrière du crâne qui s'était réveillé après l'épisode des gardes et avait empiré après le coup de hampe, et surtout un bras dans un état indescriptible. Il devait voir un médecin, un druide ou un guérisseur. N'importe quoi ferait l'affaire. Et par-dessus tout il devait se reposer. Il se dirigea donc vers le centre-ville où un druide semblait être installé. Les druides étaient des magiciens spécialisés dans les soins. Sa mère lui avait raconté qu'ils n'étaient pas aussi doués que les véritables magiciens qui avaient étudiés plus longtemps mais avaient des champs d'activité bien plus larges. Mais il s'en moquait, n'importe qui aurait fait l'affaire du moment qu'il soulage un peu ses souffrances.

   Un écriteau cloué sur la porte indiquait : « Clinique du druide Kelvin Horst ». Le garçon appuya sur la poignée et entra dans la demeure. La petite clinique semblait bien fonctionner. Des meubles en acajou et des tableaux de qualité décoraient l'entrée. Plusieurs personnes semblaient attendre dans un couloir où étaient installés des bancs. Un homme d'âge mûr doté d'une barbe bien taillée se tenait assis sur une chaise juste à l'entrée de ce couloir. Il lui fît signe d'approcher.

   -   Bonjours jeune homme, comment t'appelle-tu ? Allons, je ne te veux aucun mal, je veux seulement savoir si tu es déjà venu. Affirma-t-il le plus amicalement du monde.