Le Joyau de la Couronne

Chapitre 24

Alors qu'Arion galopait comme un fou depuis quelques heures, le cheval à la robe mordorée de Klevs s'arrêta subitement. Je calmai mon beau destrier de quelques petites tapes sur l'encolure, observant la cause de l'arrêt de mon compagnon de route. Derrière nous, dans un horizon lointain, s'élevait des nuages de poussières. Il saisit sa longue-vue et regarda dans cette direction avant de contracter la mâchoire en annonçant : "Ce n'est pas une tempête. Des cavaliers nous poursuivent, ils sont quatre." Puis il ajouta dans un souffle, ayant peur d'annoncer la vérité : "Ce sont probablement le prince et sa garde..." Je fixai mes yeux sur le nuage lointain, sans parvenir à distinguer les silhouettes des cavaliers.

Il y avait quelques heures, lorsque je m'étais réveillée de ma sieste, j'avais pris une résolution. J'irais voir mon frère, que Akim le veuille ou non. Nous n'étions pas encore mariés et, bien qu'étant donné le coma de mon frère, j'étais sous la tutelle de mon fiancé, il n'en serait bientôt plus le cas. Dès que mon frère serait debout, je repasserais sous sa protection. Tel était le protocole qui, pour une fois, allait en mon sens. De plus, j'étais bien trop perturbée par mes souvenirs pour oser le confronter dans l'immédiat.

Mais je m'étais vite rendue compte que je n'irais pas loin seule et l'unique personne pouvant m'aider était celui qui semblait avoir une dent contre mon prince de fiancé. J'étais alors aller trouver Klevs, plus que content de me voir sans "Sa Majesté". Il nous avait fait fuir avec Arion et un autre cheval pris dans l'écurie, sans que les gardes du palais ne s'en aperçoivent. Notre destination était Izmir. Mon frère serait probablement réveillé à notre arrivé, aussi je demandais à Klevs : "Combien de temps avant qu'ils ne nous rattrapent ?

 - En prenant en compte l'état de nos chevaux et l'avance que nous avons pris, et en comptant aussi une pause pour se reposer et pour nourrir nos montures, je dirais aux alentours d'une journée.

Pas suffisant pour arriver avant eux, pensais-je alors. Car il suffisait d'avoir une avance de quelques minutes afin que mon frère me voit pour que je passe sous sa protection et n'ait alors, légitimement, plus l'obligation d'obéir à Akim en restant au palais. J'eus une idée qui pourrait nous faire gagner du temps.

 - Klevs, y'a-t-il une ville à moins d'une journée de cheval d'ici ?

Il sembla réfléchir quelques instants, avant de planter son regard dans le mien, l'air contrit.

 - J'en vois bien un, mais ce n'est qu'un petit village ne contenant pas plus d'une centaine d'habitants.

Je souris.

 - Ce sera suffisant."

Il pencha légèrement la tête sur le côté, dans un mouvement curieux, cherchant à savoir ou je voulais en venir.

 - Je t'expliquerai en chemin, donnais-je pour toute réponse."

Haussant les épaules, il talonna son destrier afin de nous conduire légèrement plus à l'Est.

Mon ventre se serrait déjà d'angoisse à l'idée de réaliser ce plan, pour le moins douteux. S'il ne fonctionnait pas, ou si je n'en étais pas capable, alors le prince nous tomberait sûrement dessus, me ramenant de force au palais. Et cela, c'était hors de question, j'avais trop besoin de voir Maxime. Pour le moment, lui seul comptait.

Je me mis alors à expliquer mon plan au lieutenant à mes côtés, qui ne cessait d'écarquiller les yeux. Je crus même qu'il allait me crier que je devais être folle pour croire que ça fonctionnerait, mais il s'était probablement retenu, choisissant plutôt de me l'expliquer. Cependant, ses arguments avaient beau être convaincants, ma décision était prise.

Le silence s'installa entre nous et aucun de nous deux ne pris plus la parole. Le vent fouettait mes cheveux et mon corps se secouait à chaque foulée de Arion.