Chapitre 30

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Rappel : Anniversaire de Zack.

Un an. Jour pour jour. Et j'ai encore ce foutu rappel enregistré dans mon téléphone, comment est-ce possible ? Je pensais avoir effacé toute trace de son existence mais visiblement il est plus coriace que je ne l'aurais cru. Onze mois que je n'ai pas prononcé son prénom, dix que je ne suis plus retournée dans la rue commerçante de ma ville natale juste pour ne pas le croiser, neuf depuis son dernier message. Le compteur reprend à zéro, aujourd'hui c'est son anniversaire.

Depuis que j'ai vu ce rappel ma journée s'est arrêtée comme si le temps m'octroyait une pause me permettant de faire un vide en moi nécessaire. Seulement, la terre ne s'arrête pas de tourner et si je ne me reprends pas très vite, c'est ma vie que je vais laisser passer. "L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive ; Il coule, et nous passons !" Ces vers de Lamartine m'ont toujours poussé à la réflexion... Ma classe de poésie m'a au moins servi à quelque chose ! Je peux trouver un poème qui colle à toutes les situations merdiques de nos existences ! J'adore ce cours... Réciter des vers m'empêche de trop songer à ce qui me préoccupe réellement, seulement, il arrive un moment où mon stock est épuisé. A trop penser au passé on en reste prisonnier mais pour une journée, j'accepte de rester captive. Parce qu'il y a un peu plus d'un an j'ai pris conscience de l'horrible merdier dans lequel je m'étais fourrée. Ce fut brutal mais nécessaire.

Les herbes folles dansent autour de moi grâce au vent du mois de janvier. Un vent glacial qui devrait geler mon sang pourtant je ne ressens rien. Ma tête repose sur mon sac de sport alors que je suis emmitouflée dans une écharpe trop grande pour moi. Je suis sûre que mon nez et mes joues sont aussi rouges qu'ils peuvent l'être mais je n'en ai toujours rien à faire. Je serai surement malade demain, peu importe. A cette heure-ci je devrai déjà être en train de danser mais je n'en avais pas le courage, je me sens si faible. J'ai erré tel un fantôme dans les couloirs des différents bâtiments de l'université, sans savoir où j'allais, sans savoir ce que je cherchais. Mais il y a une heure j'ai décidé de cesser mon cinéma et de venir m'allonger ici, à l'abri des regards. Il ne manquerait plus que quelqu'un me voie dans cet état là, je ne saurai absolument pas quoi dire. Peut-être aurais-je du annoncer à Jennifer quel jour nous sommes, elle comprendrait instantanément. Mais, je ne sais pas, elle semble un peu stressée en ce moment, je ne veux pas l'embêter. Les mains dans les poches de mon manteau je tripote un vieux ticket de caisse et un capuchon de stylo. J'admire les nuages effectuer leur trajets dans cette étendue de bleu. Je ne devrai pas rester dans ce silence mais je ne sais pas à qui en parler... Ou peut-être que si justement, mais il n'est surement pas disponible. Je respire de grandes bouffées pour garder un semblant de calme et empêcher mes membres de trembler. Pourquoi je ne parviens pas à me détacher de cette partie de ma vie ? Je suis partie, je suis sortie avec un autre garçon, je ne vois pas ce que je peux faire d'autre. Un jour j'y parviendrai, j'en suis sûre, mais pour le moment je suis si fatiguée. J'ai l'impression d'en faire trop, comme si je n'avais pas à me plaindre. Après tout, rien de sérieux n'est arrivé... Les flics peuvent être si con ! Au moment où je sens une larme perler au coin de mon œil quelqu'un s'allonge à mes côtés.

Une odeur de musc et de citron vient frôler mes narines et mon cœur se met à battre si vite que je me réchauffe instantanément. Je n'ose faire un mouvement trop brusque, j'ai peur de rêver ce moment. Je continue de fixer le ciel me faisant violence pour ne pas poser mes yeux sur son beau visage que je sens tout près. Il pose sa tête sur mon sac et je me décale pour lui laisser plus de place alors que je n'ai qu'une envie : me rapprocher encore plus près. Pas un bruit ne vient troubler le silence reposant que nous partageons. Mais je ne tiens plus, j'ai besoin de le voir, de savoir que c'est bien lui et pas un simple mirage. Je tourne mon visage vers le sien et m'aperçois qu'il est déjà en train de me regarder. Nos lèvres ne sont qu'à quelques centimètres les unes des autres mais aucun de nous n'ose faire le premier pas. Alors dans une tentative désespérée je pose mon front contre le sien et ferme les paupières un instant. L'attirance que nous avions toujours connue se transforme en autre chose d'indéfinissable. Aujourd'hui devait être une journée horrible mais grâce à sa présence je me dis que tout n'est pas fini. Il est là, son front collé au mien, et tout s'écroule lorsque Thomas vient caresser mes cheveux. Le masque tombe et de grosses larmes viennent couler le long de mes joues. Je me recroqueville sur moi-même et il ne m'abandonne pas. Au contraire, ses bras viennent m'encercler en signe protecteur et en cet instant je le crois. Il me protège de mes mauvais souvenirs. J'abandonne, je ne veux plus être comme ça... Nous restons dans cette position le temps que mes pleurs cessent, ma tête désormais collé à son torse et ses lèvres sur mon front. Et pour je ne sais quelle raison, je me laisse pousser à la confession.

It's Time, Tout commence avec toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant