THOMASDix kilomètres, je peux encore tenir le double. Je n'arrive pas à m'arrêter de courir, mes muscles commencent à ressentir l'effort pourtant je ne plie pas. Il faut à tout prix que j'évacue cette colère qui ne me quitte pas depuis quelques jours, depuis toujours. Grace au sport, mes poings ne trouvent pas refuge sur la figure du premier venu. Seulement courir sur un tapis, ça n'a jamais été mon truc. Tu te retrouves seul, face à tes pensées et il n'y a aucun moyen de les éviter. J'ai essayé, au début. Songer aux personnes qui m'entourent, fait pendant les quinze premières minutes. Observer le compteur de calories brûlées, fait les cinq minutes qui ont suivi. Réfléchir aux paroles des musiques que j'écoute, je ne fais que ça. Mais chaque mot me fait penser à elle...
Jamais je n'aurais cru, qu'un jour, elle me confierait tout ça. C'était si inattendu et en même temps si prévisible. Elles finissent toutes par me confier leur vie, seulement, je m'en tape. Mais pas Julia, non, elle ça compte. Je ne sais pas comment l'expliquer parce que ça ne m'est jamais arrivé. J'espérais tellement fort qu'elle me raconte ce qui lui était arrivé, pourtant, j'ai vite déchanté. A peine avait-elle commencé son histoire que je maudissais mes jambes d'être venues jusqu'à elle. Je ne voulais pas entendre ça même si j'en avais besoin.
Sa chevelure brune se détachait parfaitement dans l'herbe verte, sans parler de son sac de sport rouge sur lequel elle avait posé sa tête. Elle ne bougeait pas, comme si le temps s'était arrêté et qu'il n'avait plus d'importance. Le froid ne semblait rien lui faire alors que je ne rêvais que de retourner dans un bâtiment me réchauffer. J'ai eu peur. Matt m'a dit comme si rien n'était que Julia ressemblait à un zombie aujourd'hui. Immédiatement, je me suis senti coupable : et si, notre incartade dans les toilettes avait eu un impact sur elle ? Mais ce n'était pas ça, je l'ai senti à la seconde même ou je me suis approché d'elle. Belle, douce et triste. Ce sont les mots qui tournaient en boucle dans ma tête, ça ne voulait plus s'arrêter. Alors, je me suis allongé à ses côtés, ma tête contre la sienne sur cet horrible sac rouge espérant parvenir à lire dans ses pensées.
Dans ce silence réconfortant, j'avais moi-même oublié le vent glacial et mes mains gelées. Ce moment nous appartenait, je ne serais parti pour rien au monde. Et puis j'ai caressé ses cheveux, et puis, elle a pleuré. Des larmes de résignation, comme si elle avait perdu, comme si tout s'écroulait mais que c'était pour le mieux. Ca l'est dans un sens, Julia ne peut pas garder toutes ses émotions pour elle-même. Elle se détruisait petit à petit. Et tout ça, c'est à cause de lui ! Il l'a détruit. Et maintenant je suis en colère.
Cette rage ne me quitte pas et je sais que je serai déjà en train de casser la gueule à cet enfoiré si Julia m'avait donné un nom ou une adresse. Comment on peut faire ça à une gamine ? De l'harcèlement moral et une tentative de viol et ce mec se ballade toujours dans les rues de sa ville comme si tout était normal. Il était plus vieux, il savait que Julia ne serait pas assez forte pour prendre le dessus sur lui. Et à seize ans, on se construit. L'avis de son entourage est important, comment gagner confiance en soi quand on vous répète sans cesse que vous n'êtes qu'une moins que rien ? Il a brisé quelque chose en elle que personne ne pourra jamais réparer. Même moi Julia, je ne peux pas combler les creux de ton âme. Je ne suis pas suffisamment fort pour en assumer les responsabilités, surtout que tu ne connais pas tout. Lorsque tu te rendras compte de l'enfoiré que je suis, il sera trop tard. Heureusement, tu es très bien entourée aujourd'hui. Tu t'en sortiras, tu es tellement courageuse... Ce n'est pas qu'un rôle que tu te donnes, être toujours positive t'apporte tellement. J'espère que tu continueras à être comme ça... Mais pour l'instant je ne te dis rien, j'ai tout arrêté alors rien ne sert d'en parler.
Je sens quelqu'un me taper sur l'épaule ce qui me fait subitement sortir de mes pensées. J'enlève mes écouteurs et regarde Matt sur le tapis à côté du mien. Il est rouge à cause de l'effort, il a tenté de me suivre dans cette course folle contre mes démons mais son endurance n'est pas son point fort. C'est dommage pour un joueur de football. Mon ami est complètement à bout de souffle et je décide de ralentir la cadence pour finalement m'arrêter. Je bois la moitié de la bouteille d'eau qu'il me tend tandis que nous nous dirigeons vers les vestiaires. Une heure et demi que nous sommes ici, il faut que je file à la douche et ensuite j'ai répétition. Heureusement qu'il m'a arrêté, j'étais parti pour rester ici toute la journée. Sur le chemin, je suis pris d'une envie de me confier plus qu'étrange. Il faut que je lui raconte ce que j'ai fait parce que je crois que je débloque complètement. Je prononce sur un ton neutre :
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It's Time, Tout commence avec toi
Romance" Si l'eau pouvait éteindre un baiser amoureux, Ton amour qui me brûle est si fort douloureux, Que j'eusse éteins son feu de la mer de mes larmes. " Pierre de MARBEUF Julia, jeune fille de dix-huit ans emménage dans une colocation avec sa meilleure...