Ma chambre ne m'a jamais semblé aussi oppressante. Les quelques décorations aux murs sont si impersonnelles, on se demanderait presque si quelqu'un a vraiment vécu ici pendant dix-huit ans. Les murs sont d'un blanc délavé et les draps de mon lit d'un rouge sang qui contraste parfaitement avec l'ensemble du mobilier en bois. A peine sur le pas de la porte, je ressens toutes les émotions qui ont imprégné l'atmosphère de cette pièce. Je me revois pleurer sur les oreillers, me perdre assise sur le fauteuil devant la fenêtre. Et je vais devoir dormir ici pendant deux jours. Je peux le faire, c'est du passé maintenant. Je pose négligemment mon sac dans un coin et m'assoie en tailleur sur le lit. Des frissons me parcourent lorsque les souvenirs refont surface. J'ai froid, très froid. C'est dans cette chambre que j'ai compris que ça n'allait pas, qu'il a failli...- Eh bah ! Ta chambre n'a pas changé en deux ans !
Aurore entre à son tour dans la chambre le regard rieur. C'est vrai, elle n'a pas changé pourtant tout semble différent d'il y a quelques mois, quand j'habitais encore ici. Elle s'assoit sur le fauteuil et le tourne vers moi. L'ambiance pourrait être la confidence sauf qu'on ne fonctionne pas comme ça.
- Alors petite sœur, raconte moi tout ! J'ai l'impression de ne rien connaître de ta vie depuis que je suis partie.
- Tu ne t'y es jamais intéressée.
Mon ton est froid et ça me surprend autant qu'elle. Je ne veux pas que l'on se dispute mais certaines choses doivent être dites. Nous n'avons jamais joué les hypocrites, c'est à l'encontre de nos principes. Alors je peux paraître méchante de vouloir mettre carte sur table quelques heures après son arrivée mais il est hors de question de lui laisser penser que tout va bien. En deux ans il s'en est passé des choses !
- Pas besoin de m'agresser, c'est pour cela que je viens aux nouvelles, lâche-t-elle sur un ton dédaigneux.
Aurore se recroqueville sur le fauteuil comme pour se protéger de ma prochaine attaque. Elle peut jouer à la fille qui ne voit pas les problèmes mais je la connais, tout ce qu'elle fait de mauvais : elle s'en rappelle. C'est vraiment un problème chez elle, ce n'est pas vraiment de la culpabilité parce que la plupart du temps elle ne regrette rien. Elle n'oublie juste jamais à quelle point ses vices ont été poussé à leur extrême, en espérant qu'elle n'ira pas plus loin la prochaine fois. Ce devait être son maximum, deux ans sans revenir.
- Et si je te dis que les nouvelles ne sont pas bonnes tu vas faire quoi ? C'est un peu tard pour s'occuper de ma vie...
Je ne parviens pas à cacher toute la rancœur qui m'anime. J'attends cette discussion depuis tant de temps ! Je ne peux plus me taire, il faut qu'elle redescende de son petit nuage. Ma vie pendant deux ans a été un enfer et on ne peut pas soigner tout ça en faisant une apparition dans mon quotidien seulement dans les bons moments.
- Julia arrête ton cinéma, j'ai toujours été là quand tu avais besoin de moi !
- Vraiment ? Alors dis-moi, tu étais où quand je vivais un cauchemar éveillé ? Quand je pleurais le soir à cause de la situation dans laquelle j'étais ? Tu étais où, putain, lorsque je suis tombée au fond du gouffre ?
Je laisse exploser ma colère, je ne peux plus la retenir. J'ai tellement souffert de son départ, elle était mon pilier ! C'était à elle de me protéger des danger de la vie, de m'apprendre à quoi doit ressembler l'amour. Au lieu de ça, elle est partie, loin, trop loin. Me laissant comprendre par moi-même que le bonheur n'est qu'éphémère et que le prince charmant se transforme le plus souvent en crapaud une fois la date d'expiration arrivée. Aurore me dévisage comme si elle ne comprenait pas d'où tout cela venait. Bah oui, pour le comprendre il aurait fallu s'occuper de moi.
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It's Time, Tout commence avec toi
Romansa" Si l'eau pouvait éteindre un baiser amoureux, Ton amour qui me brûle est si fort douloureux, Que j'eusse éteins son feu de la mer de mes larmes. " Pierre de MARBEUF Julia, jeune fille de dix-huit ans emménage dans une colocation avec sa meilleure...