Chapitre 14 : Requiem d'une idylle ♫

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Au travers de la fenêtre, je pouvais voir les premiers flocons de neige descendre pour venir se poser sur le manteau blanc qui avait recouvert la cour extérieure de l'hôpital hier la veille. Du blanc, encore et toujours. J'avais fini par me lasser de cette couleur qui envahissait mon quotidien depuis maintenant presque trois semaines depuis mon arrivée ici. Pourtant, la neige tombante restait toujours un spectacle des plus plaisants à regarder. D'autant plus qu'étant à peine au début du mois de novembre comme l'indiquait le calendrier où le 12 avait été grossièrement entouré au feutre rouge, l'hiver arrivait prématurément. Dans ma contemplation, je sentis une petite main tirer sur la mienne afin d'attirer mon attention.

- Dis Monie ! On peut aller jouer dehors avec la neig ? me supplia une petite voix.

- Mmmmh pas tout de suite ma douce, répondis-je peu tentée à la petite fille.

- Mais j'en ai envie maintenant! Je veux mon Olaf! bouda-t-elle en gonflant ses joues.

- Allez Fanny, dans une semaine, tu pourras y jouer tous les jours, tentai-je de la consoler.

Je m'agenouillai afin de me mettre à la hauteur de la fillette à peine âgée de 7 ans pour ajuster le bonnet qu'elle portait. Ce dernier était identique au mien. Après ma chute de cheveux causée par les séances de chimiothérapie, ma mère m'avait offert un bonnet pour m'aider à surmonter le choc du vide capillaire. Il était beige et large, légèrement tombant avec à l'arrière un pompon en fausse fourrure brun. Je n'osais même plus me regarder dans une glace sans le porter. Fanny était la patiente qui occupait la chambre voisine, la 136 tandis que j'étais dans la 135. Elle traversait la phase finale de rémission et allait bientôt pouvoir retourner chez elle. Étant souvent seule à cause du divorce de ses parents, je tentais - lorsque mes forces me le permettaient - de passer du temps en sa compagnie. En voyant mon bonnet et ne cessant de dire qu'elle l'aimait, j'avais fini par demander à ma mère d'en acheter un autre identique afin de le lui offrir.

Dès les premiers pas franchis dans ces lieux, je fus envahie par cette étrange sensation ressentie par la majorité du commun des mortels en entrant dans un hôpital : celle qui ne présageait rien de bon. Si à mon arrivée, l'angoisse de ce qui m'attendait, m'avait constamment donné la boule au ventre, la rencontre avec d'autres patients comme Fanny me redonna néanmoins un peu plus de courage. Le personnel, les infirmières mais aussi le médecin étaient d'aimables personnes également. Enfin, mes amies ne tardèrent pas à venir me rendre visite dès qu'ils le purent en fonction de leurs horaires de cours notamment. Je ne m'étais donc pas sentie seule en traversant les premières étapes difficiles du traitement de ma maladie.

- Harmonie a raison, ma p'tite Fanny ! renchérit Mathilde, l'infirmière de notre étage qui venait de faire irruption dans ma chambre afin de changer mes perfusions. Un peu rondelette sous son un uniforme assez ample, cette petite femme avait des yeux marrons pétillants et toujours l'air enjouée.

- Monie ! Je vous ai déjà dit que c'était mieux d'utiliser mon diminutif. C'est plus rapide!

- Oh excuse moi Monie ! Ça viendra ne t'en fais pas... Mais tu as un si joli prénom... Mais bon comme tu le disais à Fanny, si elle prend son mal en patience, elle pourra jouer dans la neige autant qu'elle le veut. Bon maintenant, ma petite, tu files dans ta chambre pour que le Dr Polet te fasse un examen, ordonna-t-elle ensuite en tendant la main à la fillette, me laissant ainsi seule dans la chambre.

En jetant un coup d'œil à la montre, celle-ci indiquait déjà 15 heures. Les autres n'allaient pas tarder à venir car nous étions un mercredi. Compte tenu de notre anniversaire à Mél et moi, cela ne faisait l'ombre d'un doute qu'ils ne manqueraient pas cet événement prévu depuis longtemps. Je soupirais tout en me dirigeant dans ma petite salle de bain pour me voir dans la glace dans la perspective de me faire faire une « petite beauté ». Face au miroir, je ne pouvais que constater l'ampleur des dégâts que la lutte contre la maladie engendrait sur mon corps. Passant la main sur l'une de mes pommettes, je constatai que j'avais encore perdu du poids de façon démesurée. Je jurais de ne plus jamais me plaindre de mes petits kilos en trop une fois sortie de cet établissement. Je me trouvais faible et fatiguée, cette sensation étant accentuée par les cernes sous les yeux. À me voir, n'importe qui aurait pu croire que je pouvais être cassée aussi facilement que de la porcelaine. Aujourd'hui pourtant, je faisais un effort pour masquer ma fatigue et j'avais demandé à Mathilde de me donner un remède afin de calmer mes nausées pour cette journée. Je prenais une profonde inspiration, ajustais mon bonnet et affichais un sourire peu convaincant au miroir lorsque j'entendis quelqu'un frapper. Sortant de la petite pièce, quelle ne fut pas ma surprise en voyant entrer Lysandre accompagné de Castiel et Rosalya. Cette dernière se précipita pour me serrer dans ses bras toute en gémissant comme une fillette le fait que je lui avais « terriblement manqué », ce qui eut pour effet de me faire rire. Après m'avoir saluée, Lysandre s'excusa de la part de Dake et Kentin de ne pas avoir pu se libérer à cause de leurs activités en dehors du lycée. Je le rassurai en disant que je comprenais parfaitement. D'un autre côté, cela m'arrangeait presque qu'il n'y ait pas trop de monde. Nous étions encore dans un hôpital et il ne fallait pas abuser de cette autorisation exceptionnelle en causant des nuisances sonores auprès des autres patients. Rosalya se permit de faire quelques critiques sur la déco de la chambre, accusant de mauvais goût la présence des rideaux marrons. Je n'osais lui dire que c'était le seul élément coloré qui rendait à mes yeux la chambre moins monotone.

Ce mec me déboussole !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant