Chapitre 11 : Non rien de rien, non je ne regrette rien... ♫

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- Alors? J'attends.

Je n'avais plus vu de larmes perler sur ses joues depuis maintenant 13 ans, c'est-à-dire l'année où ce lâche nous avait laissées derrière lui. À présent, j'avais le sentiment que je ne valais pas mieux... Paniquée, je dévisageais ma mère qui venait de poser brutalement l'enveloppe sur la table et croisait à présent les bras en exigeant une réponse. Son regard mêlait à la fois tristesse et colère et j'avais quelque peu du mal à le soutenir. Ce moment était donc finalement arrivé et je n'avais rien pu faire pour l'en empêcher. Je déglutis avant d'enfin pouvoir prendre la parole.

- Maman, écoute, je voulais t'en parler... mais... je n'ai jamais... je voulais... pas maintenant.

- Et tu comptais donc attendre que je le découvre en te voyant sur un lit d'hôpital peut-être ? cingla-t-elle. Mais qu'est-ce qui t'es passé par la tête Harmonie ! J'ai appelé ta grand-mère et je peux te dire qu'entre elle et moi, c'est fini ! Franchement dans quel monde d'idiots inconscients je suis tombée !

- C'est pas de sa faute! C'est moi qui ai demandé à ce que Mélodie et toi ne sachiez rien pour le moment.

- Ce que je n'arrive pas à comprendre, c'est pourquoi ? POURQUOI ? Finit-elle par hurler.

- PARCE QUE J'AVAIS PEUR ! répliquai-je sur le même ton. Tu crois que ça a été facile pour moi de voir cette saloperie débarquée ?

- Non, bien sûr que non ! Mais tu n'avais pas à traverser ça seule, nous informer aurait été plus sage...

- J'avais l'impression que plus les gens en savaient et moins je pouvais ne pas y penser, avouai-je d'une voix cassée. C'était pas juste pour faire ma thug, t'imagine pas un truc de tes bouquins sur les psychos des ados... J'ai... j'ai pas envie de vivre avec la mort... de me dire que jusqu'à la fin, elle m'aura... hantée.

Face à mon angoisse, ma mère soupira et se passa la main dans les cheveux, cherchant à retrouver son calme. Elle fit plusieurs fois le tour de la cuisine avant de se poster devant moi. Elle fit mine de ranger une mèche de mes cheveux alors que j'essuyais doucement une larme qui coulait lentement sur son visage. C'est alors qu'elle me serra dans ses bras avant de prendre la direction de sa chambre. Elle s'arrêta au seuil de la porte pour me dire une dernière chose avant de disparaître:

- Restons en là pour le moment. Je me chargerai de contacter l'hôpital en espérant que leur dire "je n'étais pas au courant de la leucémie de ma propre fille" ne me décrédibilise pas pour la suite. On ne peut franchement pas dire que j'assure comme maman...

Je restais quant à moi plantée là au milieu de la pièce, dans le silence interrompu par les gouttes d'eau du robinet. J'étais emplie d'une culpabilité sans borne devant ce que je faisais subir à ma mère. Tout ça parce que j'avais été au final égoïste envers elle et Mélodie. Je me servais de ma manche pour essuyer à mes yeux humides.

- Et merde! jurai-je. Merde merde merde! Mon Dieu, pourquoi moi ? Qu'est ce que j'ai fait de mal pour mériter ça? continuai-je à me lamenter en serrant les poings afin de réprimer l'envie de me frapper.

L'esprit complètement chamboulé, je sortais en trombe de la maison. Je voulais m'échapper de cette atmosphère déjà sombre et oppressante comme la mort. Je marchais encore une fois guidée par mes pas, les mains enfouies dans les poches de mon sweat. Il faisait vraiment froid et je laissais mes pieds frotter les feuilles jaunies tombées au sol. Encore une fois, j'atterrissais dans le parc, non loin de la petite aire de jeu pour enfant d'où je pouvais entendre les cris et rires des mômes. Ça me rappelait les fois où maman nous emmenait Mél et moi faire un pique-nique au parc les samedis. Je m'amusais à faire croire à Mélodie qu'une guêpe lui courrait après et ensuite ma mère me grondait. Pourtant je riais beaucoup. Ce temps me paraîssait déjà loin.

Ce mec me déboussole !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant