Amara resta silencieuse. Don Eduardo fit un pas vers Ricardo qui, sous le coup de l'émotion, était tombé à genoux. Doña Amelia, livide, regardait sa fille avec inquiétude. Celle-ci, cependant, ne montrait pas la moindre trace de crainte. Elle était songeuse. Elle avait évité de regarder le visage de Zorro, et Zorro avait évité de regarder le sien, elle en était convaincue. Cela voulait-il dire qu'elle aurait pu le reconnaître? Qu'elle aurait su?
Le commandante ramassa son épée, fit signe à ses hommes de se retirer et se tourna vers don Eduardo.
- Señor Verdana, je vous laisse le soin de disposer de Ricardo.
Amara fut agréablement surprise de découvrir que le commandante était un homme de parole. Il rangea son épée, s'inclina devant la famille au complet, contourna Amara et rentra dans son bureau. La famille Verdana au complet restait silencieuse. Don Eduardo déclara ensuite, encore devant les soldats qui semblaient comme encore figés sur place:
- Ricardo, tu comprends que je ne peux pas t'employer à nouveau. Tu as trahi ma confiance et mis en danger la sécurité de ma femme et de ma fille. Je t'interdis de prononcer mon nom à nouveau. Considère ce pardon comme l'ultime preuve de ma merci.
Ricardo s'inclina profondément devant Eduardo Verdana, et un soldat lui tendit le sac qui contenait les objets de valeur qu'il avait volés. On voyait dans son regard qu'il était convaincu que l'affaire ne méritait pas l'intervention de Zorro, et Amara ne put s'empêcher de se dire qu'elle aussi, elle pensait la même chose. Mais elle était presque sûre que Zorro n'avait fait cela que pour se donner une occasion pas trop grave pour pouvoir rencontrer et tester le commandante.
- Et si tu vois Paulo, sois bien sûr de lui dire qu'il n'aura guère droit au même genre de pardon que toi. Si le commandante l'appréhende, aucun de nous ne sera là pour le sauver.
Ricardo s'inclina une seconde fois et disparut dans les ténèbres, honteux, mais vivant. Les Verdana se regardèrent, silencieusement, et montèrent dans leur carriole. Ils s'en allèrent en silence. Ils avaient rencontré Zorro, qui avait sauvé leur ancien serviteur d'un sort peu agréable. Mais pourquoi ? se demandait sans cesse Amara. Son père aurait bien fini par faire entendre raison au commandante, qui ne semblait pas être un homme particulièrement cruel ou inhumain.
Zorro voulait sûrement faire connaissance avec le commandante et lui montrer ce pour quoi il se battait, qui il défendait, et pourquoi. Il avait de ce fait montré au commandante qu'il serait là pour le combattre s'il le fallait, et l'aider s'il le méritait. Ricardo n'était sans doute qu'une occasion. Un moyen de venir en ayant l'occasion de lui montrer qui il était... et même de le combattre. Il jaugeait son adversaire, ayant encore à décider de s'ils se rencontreraient une seconde fois... Amara, étant sûre d'avoir compris cela juste, fut impressionnée par la rapidité avec laquelle le justicier masqué avait eu vent de l'événement. Il devait sûrement habiter tout près de la caserne... peut-être même au pueblo.
Mais elle ne pouvait s'empêcher de se dire que Zorro devait savoir autre chose, quelque chose qu'eux n'auraient pas su et qui aurait tout changé...
Elle avait remarqué que ses habits étaient d'une qualité insoupçonnée. Sa cape semblait littéralement flotter dans l'air, et son chapeau était presque comme neuf. Ses bottes étaient cirées et rien n'était plus noir que lui... Elle ne regrettait pas de n'avoir pas pu voir son visage. Elle voulait encore pouvoir se l'imaginer comme une ombre planant au-dessus de Los Angeles, un homme désintéressé, n'ayant d'yeux que pour la justice et l'équité... Un homme ayant les mêmes valeurs qu'elle.
- Je n'avais jamais vu Zorro auparavant, finit par chuchoter doña Amelia.
Amara eut un sourire. Elle non plus. Il ne lui avait cependant fallu qu'une semaine avant de le voir. Mais sa famille était une famille calme et sans ennuis. Il était normal qu'ils n'aient jamais vu le justicier masqué - et Amara, d'ailleurs en était soulagée. Elle préférait savoir ses parents loin du danger.

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Sombra
FanfictionLorsque'Amara Verdana revient en Californie après cinq ans d'absence, elle n'est plus la jeune fille éprise de musique et de poésie que connaissaient ses parents. Sa fougue naturelle l'a menée à apprendre le maniement des armes, et les nouvelles ven...