Lorsqu'Amara revint chez elle, peu avant le coucher du soleil, c'était avec l'esprit ailleurs, sa main se portant de temps à autre au collier de topaze qu'elle portait désormais comme à la fois un talisman et une preuve de son alliance avec Diego. Elle laissa son cheval aux soins d'un serviteur dont elle ne se rappelait même pas le nom - il lui faudrait changer cela - et entra chez elle avec un léger sourire aux lèvres.
Sa bonne humeur fut immédiatement mise à rude épreuve: doña Margarita se tenait dans le patio, ses mains sur les épaules de sa fille, la señorita Adella. Elles étaient en pleine discussion et aucune des deux ne semblait avoir entendu Amara (ou peut-être voulaient-elles donner cette impression, se dit Amara avec un petit sourire).
- Ma chère, avant la fin de la semaine, ce don Diego sera à vos pieds. Nous partirons de cette... hacienda (le ton qu'elle avait employé était tellement dédaigneux qu'Amara se demanda si elle n'avait pas hésité avec "porcherie", ce qui lui fit hausser un sourcil.) la tête haute.
- Je lui ai envoyé un messager tout à l'heure, et je suis sûre qu'il arrivera avec empressement, se confia Adella.
- Evidemment. Quel caballero ne se presserait pas pour voir ma magnifique Espagnole?
Doña Amelia sortit au même moment de sa chambre, au premier, et son regard, qui passa d'abord avec un air méprisant sur le couple que formaient les deux Espagnoles, s'illumina lorsqu'elle rencontra celui de sa fille.
- Ah! Amara. Tu es déjà de retour!
- Mère, vous savez bien que Diego s'en voudrait affreusement s'il me faisait arriver en retard, dit Amara d'un ton exagéré.
- Mais... que vois-je, autour de ton cou?
Amara rougit légèrement, oubliant subitement la présence des Espagnoles et laissa sa mère se précipiter vers elle pour regarder le magnifique bijou que lui avait offert Diego. Elle le prit dans le creux de sa paume, l'admira quelques secondes, puis le laissa retomber sur la gorge de sa fille et prit ses mains dans les siennes.
- Je le savais, murmura-t-elle. Tu ne peux pas savoir à quel point je suis heureuse...
- Je crois, dit Amara avec humour, sans hausser assez la voix pour que les Espagnoles l'entendent, que j'ai une petite idée de comment vous vous sentez, mère.
Amelia murmura encore un "bien sûr" avant de prendre sa fille contre elle. Puis, elles se dirigèrent toutes deux vers le salon. Elles entrèrent dans la salle et se figèrent toutes les deux. La salle était transformée. Pas complètement, évidemment; les vases qui avaient été changés par d'autres, qu'aucune des deux n'avait jamais vus, se tenaient presque aux mêmes endroits que les anciens. Ceux-ci avaient disparus. Plusieurs tableaux avaient été décrochés du mur et reposaient contre le sol, en attente d'être rangés ailleurs, et un meuble avait été orienté différemment. Amara, surprise, n'émit pas le moindre son. Elle n'avait pas eu vraiment le temps de s'habituer au salon qu'elle avait découvert en rentrant d'Espagne, puisqu'il était très différent de celui qu'elle avait quitté cinq ans auparavant, mais elle pouvait s'imaginer que la chose était bizarre pour sa mère, qui passait son temps dans cette pièce. Un fauteuil avait disparu, remarqua même Amara, et avait été remplacé par deux petits siègles.
Les deux femmes espagnoles pénétrèrent dans le salon juste derrière Amara et doña Margarita la devança pour s'arrêter aux côtés de doña Amelia tandis qu'Adella prenait le bras d'Amara sous le sien.
- Oh, j'ai oublié de vous prévenir. (On pouvait comprendre: je ne vous ai pas demandé votre autorisation.) J'ai procédé à quelques changements, afin de me sentir plus à la maison. Je me sentais un peu dépaysée, ce matin, quand j'ai remarqué que ce salon était encore trois modes en retard – oh, je n'essaie pas du vous insulter ; il est normal qu'avec vos ressources la mode ne soit pas une priorité, ajouta-t-elle en jetant un regard aux habits (elle les aurait sûrement qualifiés de nippes.) des deux femmes qui était en soi une plus grande insulte encore.
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Sombra
FanfictionLorsque'Amara Verdana revient en Californie après cinq ans d'absence, elle n'est plus la jeune fille éprise de musique et de poésie que connaissaient ses parents. Sa fougue naturelle l'a menée à apprendre le maniement des armes, et les nouvelles ven...