XVII

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C'est moi.

C'est moi, c'est moi.

Ces mots résonnent, tourbillonnent dans ma tête. Ne s'arrêtent plus. Ils cognent violemment les parois de mon crâne et manquent de me faire défaillir.

Je me lève en regardant droit devant moi, de peur de vomir en plein naufrage.

Un naufrage qui décide soudain de faire couler mon plus beau bateau. Tout ce en quoi j'ai cru, tout ce que j'ai mis en œuvre. Tout ce que j'ai bâti avec soin.
Il n'en restera plus rien.

Avant de le réaliser, je quitte ce grand gymnase qui me donne le vertige.
J'ai soudain très froid. Mes dents claquent, mes mains tremblent. Mes muscles sont alourdis.
Mais à l'intérieur de moi, je me sens comme incandescente.

Je me faufile à travers les gradins sans même prendre la peine de m'excuser, et sors rapidement de ce gymnase suffocant. 

Dans les couloirs, je marche vers la sortie. De plus en plus vite.

C'est moi C'est moi c'est moi c'est moi.

Je ne suis que rage et déception.

Je deviens rouge de colère et me dirige avec hâte vers l'extérieur.

Une fois devant les portes du lycée, je les pousse violemment et m'extirpe enfin dehors. Un peu d'air frais rafraîchit mon visage bouillonnant.

C'est moi.
Steve s'est dénoncé.
C'est moi.
Mais Nina a quand même souffert.
Kevin a pardonné Nina et m'en veut terriblement aujoud'hui.

C'est moi...
En fin de compte, c'est moi la coupable ici.

Devant moi ; cette rue étroite, la même empruntée avec Nina, le jour où j'ai renversé cette grosse benne à ordure.

J'hésite à la bousculer une seconde fois. Mais avec plus de puissance cette fois-ci. Plus de rage, plus de culpabilité.

Mais je ne le ferai pas.

Je me contiens pour la première fois et décide de garder cette colère pour un autre moment.

Je serre mon poing aussi fort que je le peux.

Cet effort surhumain fait perler une larme sur ma joue.
Noire.
Elle fait couler avec elle le mascara sur mes yeux.
Celle qui porte un masque ici, c'est bien moi.

C'est moi qui ai fait du mal à Nina.
Je n'avais pas à lui faire endurer tout ce que je ressens au quotidien.

Pauvre Nina... J'ai été stupide de croire que moi seule corrigerais les défauts de ce monde.

Ceux que je peux corriger avant tout, ce sont les miens.
Mon comportement, ma personnalité.
Ce qui fait de moi Claire.

Une personne sensible et meurtrie par la vie. Qui prend tout sur elle depuis bien trop longtemps.

Une boule dans ma gorge fait surface.
Mais je renonce à verser une seconde larme.
Je suis bien plus forte que je le pense. 

Alors je me dirige vers mon domicile d'un pas ferme et assuré.

Je me calme durant le court trajet, et tempère le rythme de mon cœur qui, jusqu'ici, ne battaient que pour les autres.

Aujourd'hui, mon cœur bat pour moi.

Les pieds fixés sur le palier devant chez moi, je n'ose ouvrir la porte. J'ai peur de ce qu'il y a à l'intérieur. De ce qui m'attend ce soir, encore.

Non.
Aujourd'hui je n'ai plus peur de ce qui m'attend.
Avant de franchir le palier, je prends une profonde inspiration.

Et je souffle à fond.

Culpabilité LycéenneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant