Jour 48

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"I'll be your sun and your moon tonight."

Maroon 5 – New Love

*


Il a dû s'écouler vingt heures, ou peut-être un peu moins, depuis que ça s'est produit. Comment pourrais-je réellement qualifier cela ? Un baiser ? Je suis tenté d'utiliser ce terme là, c'est évident, mais je ne suis pas certain que dans de telles conditions, ça puisse être le bon. J'ai peu d'expérience, voir aucune, mais je ne peux m'empêcher de me dire que la chose doit être différente lorsqu'elle est vraiment désirée. Pas que je ne l'ai pas voulu, je ne crois pas en tous cas, mais je doute fortement que nous ayons eu la même compréhension de l'instant. J'étais plaqué contre un mur, à deux doigts de me faire frapper parce que je n'avais pas ouvert la porte assez vite et c'est arrivé comme l'hiver cède sa place au printemps. Sans que je ne m'en rende compte.

A la base, il n'y a aucun doute possible, Azraël n'est pas venu avec en tête l'idée que notre altercation finirait ainsi, si même il avait songé qu'altercation il y aurait. Son geste a été bien trop impulsif et irréfléchi au plus haut point pour que ce ne soit le cas. Pourtant, je prends vite conscience que je suis en train d'effleurer mes lèvres au simple souvenir des siennes dessus. Rien n'était prévu, mais la pagaille que tout cela a causé en moi est évidente. C'est arrivé le jour même où j'ai commencé à me rendre compte que c'était ce que je voulais et... Je ne sais pas si la coïncidence est trop forte pour que ça ne puisse être qu'un rêve ou si le rêve a pris place dans la réalité. Tout ce dont je suis certain, c'est que je voudrais recommencer encore et encore, tant la sensation m'est apparue délicieuse. Il n'y avait aucun goût particulier comme peuvent le dire les auteurs dans les bouquins, ni même gout sucré ou salé sur ses lèvres. Rien. C'était simplement un sentiment naturel de plénitude et de bien-être.

Dire à haute voix quelque chose de trop précieux qui me ferait tomber plus bas que terre serait idiot, mais pour autant, je ne peux nier que tout ceci est en train de cruellement me plaire. Pour la première fois de ma vie, je me suis senti à la fois chanceux et heureux, comme si une force invisible avait eu vent de mes paroles et les avaient amenées jusque dans le creux de l'oreille d'Azraël.

« Qu'est-ce que tu fais assis là ? »

« C'est chez moi. Au cas où tu ne serais pas au courant. »

« Donc parce que c'est chez toi, tu peux t'asseoir sur le perron à toute heure et passer pour un con ? »

« Un con ? »

« Il fait froid et nuit. Au cas où tu ne serais pas au courant. »

Ce n'est pas un reproche, simplement un constat, et je ne peux m'empêcher de sourire en l'entendant reprendre mes mots pour se défendre. Je ne sais pas d'où il sort, ni s'il était dans le coin depuis longtemps, mais il n'est pas encore assis près de moi que déjà je me sens mieux. Il a cette façon de sublimer le monde qui l'entoure et j'ai compris maintenant que ma vie avait pris un tournant décisif lorsqu'il était entré dedans. Je ne sais pas qui remercier pour un tel cadeau, mais du fond du cœur, je le fais malgré tout. Il m'a secouru lors de notre première rencontre et depuis, il ne cesse de persévérer dans cette voie.

Les minutes s'écoulent doucement sans qu'aucun de nous ne semble s'en soucier. Personne ne parle, ni ne fait le premier pas, mais il est venu et ne semble pas mal à l'aise d'être ici. Il respire l'air qui l'entoure, fier de ce qu'il est, confiant du caractère qui l'habite et faisant de son assurance sa force. Azraël et moi sommes comme l'eau et le feu, rien à l'origine ne nous prédisposait à avoir des atomes crochus. Nous sommes ce genre de duo que le monde ne peut imaginer, tant la consistance du fil nous reliant est différente en ses deux opposés ; la partie la plus forte en fer blanc et la plus faible à peine constitué d'un film plastique pour l'entourer.

SublimationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant