Jour 56

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"I'm following the map that leads to you."

Maroon 5 - Maps

*


« Non, non, et non. Comment tu peux laisser quelqu'un faire ça ? Je n'arrive pas à comprendre. »

Parfois, je me dis qu'Azraël sent quand les jours pour venir ne sont pas les bons. Hier soir, après mon altercation avec Gwenaël, je n'ai vu personne ; ni au ponton, ni chez moi. Et je crois que ça m'arrangeait de ne pas avoir à contenir ma haine devant lui. Du coup, quand je l'ai croisé sur le chemin en rentrant du lycée, je l'ai directement invité à me suivre chez moi. Quand il a vu le bleu sur ma pommette, il a commencé à me soigner sans poser de questions et ça m'a fait un bien fou après cette journée misérable. A ma surprise comme à la sienne, mon corps n'a aucunement mal réagi lorsqu'il a appliqué la crème sur ma joue. Et dans un élan que je ne saisis toujours pas, nous avons vécu le premier de nos baisers que j'ai moi même amorcé. Doux sentiment d'euphorie et de plénitude se mélangeant dans mon estomac.

C'est après que tout s'est compliqué légèrement, lorsqu'il a fini par ne plus accepter mon silence et que j'ai commencé à tout expliquer. Tout. Et bizarrement, Gwenaël a envahi absolument toute la conversation, comme si nous lui en voulions plus à lui qu'à Calvin. Mais est-ce que ce n'est pas indirectement le cas ?

« Il protège l'homme qu'il aime. Et même si je ne suis pas d'accord avec lui, je pense que je le comprends. Ça ne doit pas être facile pour lui. »

« Tu crois que ça l'est pour moi ? »

« Ce n'est pas ce que je dis. Mais essaie d'imaginer le contraire ? »

« Quel contraire ? Si toi tu frappais un pauvre abruti tous les soirs et que je devais choisir qui de lui ou toi je soutiens ? »

Ses yeux m'envoient des éclairs. Il a compris l'insulte doucement glissée là, que je m'adresse à moi-même et je crois qu'il me la jetterait au visage si la matérialiser était possible. Et c'est stupide, une fois de plus, mais j'aime n'avoir qu'à le regarder pour comprendre tout ceci.

« Non mais Az, soyons réalistes deux secondes. Tu pourrais regarder un type se faire battre sans intervenir ? »

« Si tu étais en tort et que ça pouvait te causer des ennuis, je te protégerais. Parce que je sais ce que tu vaux et que moi aussi à sa place je ne saurais pas qui choisir. »

« Mais ta réponse est non, c'est évi... Hey ! Tu viens de laisser entendre que j'étais ton Calvin ou j'ai rêvé ? »

« Tu as rêvé, c'est ton esprit qui te fait croire ça. »

Et son rire doux envahit mon salon, entre joie et sarcasme. Vu l'amour qu'il porte à Calvin, ce serait un comble qu'il soit celui me désignant à ses yeux. A contrario, je sais qu'Azraël ne me dira pas directement qu'il ressent quelque chose pour moi, mais que ses actes sont là pour cela. J'ai déjà appris à lire en lui et je sais qu'il est aussi attaché à moi que je ne le suis à lui. Et je refuse même de penser qu'un jour quelque chose puisse changer.

« Je suis fier de toi Séraphin. »

Aussi rapidement que s'était envolé son rire, l'oiseau revient au nid. Ce sérieux dont il fait preuve est visible à des dizaines de kilomètres à la ronde et je me surprends à ne pas comprendre pourquoi. Azraël est aussi beau et attentionné que troublant et incompréhensible. Tout ce que je suis doit dégager un trouble, mais au fond, une seule chose subsiste. La joie. Peu importe la raison pour laquelle c'est, je comprendrais même s'il ne voulait pas me le dire. Le savoir me suffit bien amplement.

SublimationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant