Mérite-le.

Chapitre 18

Trois heures du matin. Uranie observait la petite cuisinière de sa chambre d'un œil terne. Après s'être réveillée dans son bain, elle s'était rapidement séchée et habillée. Cette fois-ci, elle avait rêvé du jour de sa mort.

Elle avait gentiment demandé au groupe de jeunes de baisser le volume de leur musique, tenter de se montrer serviable et agréable avec Angelina et fait à manger à ses parents. Elle n'avait même pris un bain et ne s'était pas lavé les cheveux. Pourtant, à vingt deux heures trente trois et pas une minute de puis, son cœur s'était arrêté encore une fois. Elle n'avait rien pu changer.

Lorsque le bruit étouffé des sanglots et gémissements douloureux de Lucy dans la chambre à sa gauche devint insupportable, elle quitta la pièce en se pinçant la lèvre inférieur. Se rassembler n'était peut-être pas une bonne idée. Elle toqua à la chambre de droite sans vraiment savoir pourquoi. Lorsque la porte s'ouvrit et laissa place à la silhouette du blond, elle se surpris à fondre en larme. Cela faisait un bon moment qu'elle n'avait pas pleuré.

« J'ai fait de mon mieux ... Et ça a rien changé ... Lucien ... »

Dans les bras du blond, elle sentit presque son cœur se calmer, mais il ne battait plus depuis longtemps. Rester debout était épuisant. Ils passèrent une heure entière côte à côte dans le lit à observer le plafond. Lorsque l'on se lève à trois heures, on sait que la journée sera longue et on a du temps à perdre.

L'Église sonna quatre heures et elle s'imagina presque sangloter de nouveau. Lucien la sonda du coin de l'œil.

« Qu'est ce qu'il y a ?

- Rien. Il releva les yeux vers le plafond. Je m'ennuie juste un peu, alors je regardais si tu allais mieux pour parler. Un large sourire se traça sur le visage d'Uranie et elle se tourna vers lui, toujours silencieuse. Il avorta un rire. Je savais pas que tu savais pleurer, tu sais.

- Moi non plus, je crois. Ma vie était pas assez triste. Je savais pas que c'était si chiant, maintenant j'ai le nez qui coule et mal à la tête ...

- C'est la vie. Elle rit.

- Et toi ? Tu comptes me parler de ta vie, un jour ? Elle leva les yeux vers ceux de l'adolescent. T'étais une ordure ? T'as tué quelqu'un ?

- Nan ! Rien de tout ça ... Tu veux que je te confie un truc ?

- Ouais, plutôt. C'était le but de ma question, après tout.

- Ma vie avait rien de fantastique. Si j'en parle pas c'est que j'ai rien à dire. J'aimerai presque pouvoir te dire que j'ai tué quelqu'un, mais je crois que je suis ici parce que je volais tout le temps dans les magasins. »

Uranie acquiesça pour lui montrer qu'elle avait entendu mais n'ajouta rien et ferma les yeux. De son vivant, elle aurait pensé qu'il était pitoyable, mais depuis elle avait cessé de respirer et parlé avec quatre esprits dont une meurtrière de treize ans, alors elle ne savait plus vraiment comment raisonner comme à l'époque. Il aurait pu lui annoncer qu'il avait égorgé sa sœur qu'elle n'aurait pas su réagir. Peu importe qui il avait été, elle savait qu'il était probablement le meilleur ami qu'elle n'aie jamais eu. Elle n'était même pas sûre que sa relation avec Angelina était vraiment de l'amitié, en y réfléchissant bien. Au bout de quelques minutes, elle rouvrit les paupières.

« Dis-moi. Si t'étais encore vivant. Quel est la chose que tu aimerais le plus faire ? Par dessus tout ? Honnêtement.

- Honnêtement ? J'aurai aimé être riche pour acheter un château.

- Un château ? Elle arqua un sourcil. Pour quoi en foutre ? C'était assez inattendu de la part du blond.

- Ma mère m'a élevée seule et on a jamais eu beaucoup d'argent. Quand j'étais petit, je lui disais qu'un jour je serais riche et qu'on quitterait notre appartement pour vivre dans un château. C'était une sale idée de gosse et ma mère m'a déjà dit pleins de fois qu'elle aurait pas grand-chose à faire dans ce château mais ça m'aurait fait rire d'en avoir un quand même.

- Ta mère avait raison ...

- Ouais, mais bon. Et toi ?

- Je volerais une voiture et j'irai où je voudrais. Je dormirais dedans et le jour je roulerais jusqu'à ce qu'on m'attrape !

- Eh bien, je pensais que tu sortirais un rêve moins débile que le mien, mais je me suis trompé.

- Va te faire foutre. »