Chapitre 20

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Salon de l'Église, neuves heures. Bien que tous avaient tenté de rallonger le petit-déjeuner et de s'occuper avec des jeux de société, l'ennui devenait pesant. Léna s'était recouchée pour faire passer le temps, d'ailleurs. En attendant midi, les quatre autres jouaient au Monopoly. Enfin, Gabriel et Lucien jouaient sérieusement tandis que Lucy rêvassait et qu'Uranie sifflait tout ce qui lui passait par la tête pour s'occuper.

« Est-ce qu'on peut vraiment dire qu'on est dans une Église si il y a rien de religieux ? Genre on est dans une ... Athéglise ?

- Tais-toi et lance les dés. »

Cette première matinée confirma les doutes d'Uranie. L'éternité risquait d'être longue. Après tout, la recette de ce monde était bien mauvaise. Rassemblez autant d'individus morts aux personnalités complètements différentes, installez-les dans une presque Église angoissante à l'intérieur d'une ville inconnue, faites-les faire des cauchemars de leur ancienne vie tous les soirs, faites en sorte qu'ils se soupçonnent tous d'être des violeurs ou tueurs en série et vous créerez probablement le groupe le moins uni et harmonieux de l'univers.

Midi arriva et on déjeuna jusqu'à ce que le clocher de l'Église sonne treize heures. Uranie mima un sourire en enfilant une veste. « Bon, moi je vais me balader. J'ai laissé des trucs dans la maison où j'étais avant, en plus. C'était faux. Elle s'ennuyait et la fontaine lui manquait un peu.

- Ok, à ce soir. »

Elle adressa un dernier geste de la main à Lucien tandis que tous rejoignaient leurs chambres. Elle était la seule à sortir, de toute évidence. Honnêtement, elle ne savait pas si elle en était heureuse ou déçue. La dernière fois qu'elle avait eu à passer tout un après-midi seule remontait à bien longtemps. Avant sa mort, probablement. C'était plutôt drôle de se dire qu'à l'époque ou elle vivait dans une ville de plus de 6 000 habitants elle ne voyait personne ; Maintenant ils étaient cinq et tous installés dans le même couloir.

« Salut, Fonty. Elle fit mine de taper dans la main de la fontaine. J'ai l'impression que ça fait un siècle que je t'ai pas vue. C'est peut-être le cas, d'ailleurs. Je sais pas si le temps se déroule de la même façon que sur terre, ici. »

Uranie se laissa tomber sur le rebord de Fonty, un sourire ridicule aux lèvres. Elle aimait bien être ici, même si il n'y avait rien à y faire. De toute façon, elle n'avait jamais été du genre à avoir un emploi du temps très chargé, même de son vivant. Ses journées se résumaient à travailler pour les cours du lendemain en écoutant de la musique. Parfois elle avait le fantasme de partir se promener en ville, mais elle abandonnait rapidement l'idée en se rappelant du fait que les rues grouillaient d'êtres humains. Dieu qu'elle haïssait l'Homme. Cette ville vide était merveilleuse.

Soudain, l'air se rafraîchit et le vent se leva. Uranie se redressa lentement, prise d'une sueur froide. Le ciel était devenu gris. Il n'était pas nuageux, pas dissimulé par les nuages. Il était tout bonnement devenu gris, tout simplement. Elle se leva en panique du rebord de la fontaine. Ce monde n'allait décidément jamais cesser de lui faire peur.

« Qu'est ce que c'est que ce bordel ?! Elle lança un regard perdu à Fonty, comme espérant une réponse. Un visage se dessina lentement au fond du bassin.

- C'est moi. Enchantée, Uranie. Alors, comment se passe ta mort ? »

Et en un instant, Uranie était à quelques rues de la fontaine. Elle avait diverses qualités, mais le courage n'en faisait pas partit, elle devait l'avouer. Alors qu'elle descendait la rue le plus vite possible, une enfant s'imposa devant elle, l'air vexée. Ses cheveux blanchâtres tombaient en cascade le long de ses bras et ses grands yeux noirs et cernés la dévisageaient avec désintérêt.

« Je peux savoir où tu vas ? La fillette soupira. Je suis Epiales. Désolée pour le retard. Je suis l'esprit qui gère ton district.

- Qui gère mon district ?

- Oui, évidemment. Elle sourit. Ne me dis pas que tu n'as pas conscience d'où tu es, Schwarz ?

La brune grimaça. - Non ? Comment tu connais mon nom, d'ailleurs ?

- Je vous gère. Tu ne m'écoute pas, n'est ce pas ? Il n'y a rien que je n'ignore sur toi. Elle sortit de sa poche un petit carnet et sembla le consulter. Uranie Schwarz, 17 ans, bélier, tu es adoptée. Ta mère biologique t'as eu à 16 ans. Ta meilleure amie s'appelle Angelina. Ah, elle ne te considère pas comme tel, d'ailleurs.

- Oui, je ... Je m'en doute ... Et sinon ... On est où, du coup ? Pourquoi l'église est athée, pourquoi il y a rien ?

L'enfant la toisa un instant du regard, excédée. - Tout le district est Athée, donc vous n'êtes pris en compte par aucune religion. Aussi, je n'ai pas l'intention de te dire pourquoi tu es ici, tu n'as pas l'air prête à en prendre conscience. Elle mima un sourire. Ce soir, nous arriverons à votre cinquième jour ici. Vous avez déjà tous fait des progrès, c'est bien. Mais j'ai enfin le droit d'intervenir. Je t'accorde trois vœux. Une idée ? »


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