Mérite-le.

Chapitre 27

Uranie se leva d'un bond et examina les environs. Le ciel était d'un bleu azur magnifique, le sable blanc et chaud, les vagues de la mers apportait quelques coquillages qui braillaient sur le large, Lucien, Gabriel et Lucien affichaient une grimace hideuse, Léna buvait un jus de goyave, une adolescente inconnue arquait un sourcil.

« Qu'est-ce-qu'on-fout-là ?

- Je n'ai pas spécialement besoin de faire de vœux très sérieux, alors bon ... Léna rit, posant son verre de jus sur sa serviette. J'ai souhaité qu'on aille à la plage tous ensemble pour se détendre et qu'on ait des boissons à l'infini, comme tout le monde est un peu sur les nerfs aujourd'hui !

- Et elle sort d'où, la gamine ?

Lucy éclata son jus de pomme contre un rocher. - C'est Mélanie, la fille que j'ai tué ! Je viens de faire mon vœu de la voir ! Je voulais lui parler sérieusement dans un endroit neutre, pas au milieu de vous sur la plage en maillot de bain ! Sérieux !

- Oh. La jolie jeune femme afficha un visage crispé, comme retenant un rire. Désolée, c'est une drôle de coïncidence qu'on ait fait nos vœux presque simultanément ... À côté d'elle, Gabriel lui n'avait pas retenu un rire aux éclats. Lucy leva les yeux au ciel.

- Vous êtes nuls, c'est pas drôle ! »

Et elle attrapa le bras de Mélanie pour la traîner avec elle de l'autre côté de la plage tandis que l'adolescente leur adressait un regard suppliant qui hurlait «me laissez pas avec cette folle, pitié ». Bien sûr, ils ignorèrent ce regard. Uranie haussa les épaules et s'installa sur sa serviette, sirotant sa limonade. Cette situation avait beau être improbable, il valait mieux en profiter. Elle pouvait sentir la chaleur du soleil sur ses épaules. Cela faisait longtemps. Malgré tout, Lucien, à côté d'elle, tirait une de ces tronches. Elle soupira. Ce qu'il pouvait être chiant.

« Comment t'arrive à trouver ça normal ? On devait réfléchir sérieusement à nos vœux, aujourd'hui, pas faire bronzette ...

Uranie mima un sourire. Soit agacé, garçon. Tant que tu ne te seras pas excusé pour ton comportement de la matinée, tu ne mérites pas de paix intérieure. - Qu'est-ce que t'es rigide ... On réfléchit mieux au soleil. Léna a sacrifié un vœu pour qu'on puisse tous se détendre et un peu oublier le stress habituel, remercie-la en le faisant au lieu de faire la gueule, ingrat.

- Non mais je ... Il soupira et s'allongea sur la serviette à côté d'elle. Ouais, ouais. ... C'est pas faux, en soit ... Désolé pour ce matin. Comment tu vas ?

La jolie brune ne put retenir un sourire comblé d'enfant gâté. - Ça va ! Comment c'était, ton futur ?

- ... J'ai pas super envie d'en parler, mais vas-y, raconte moi le tien.

Ils échangèrent un regard. Le sourire d'Uranie s'effaça. - C'était nul. Je l'ai déjà dit. Pourquoi tu veux jamais rien me dire sur toi ? C'est pas grave si c'était pitoyable, je faisais pas la fière non plus, tu sais, j'étais à la rue, ma mère est morte ... Je t'ai envoyé un message et tu ne m'as pas répondu, aussi.

- Tu m'as envoyé un message ?

- Bah ... Oui. J'ai trouvé les comptes instagram de tout le monde, en fait ... Enfin, de Léna et toi ... Alors je voulais prendre de tes nouvelles ... C'est tout. Voilà. ... Bref. ... Pourquoi tu ne me réponds pas ?!

- Pour rien, je réfléchis, du calme ! »

Il fixa la brune un instant. Elle eu un mouvement de recul, le regard triste et l'air déçue. Les premiers jours, elle ne l'écoutait même pas quand il lui parlait et elle passait tout son temps à l'éviter et à faire ce qu'elle voulait en ignorant tout ce qu'il pouvait bien ressentir ou en penser, et voilà que désormais elle était bien réellement investie émotionnellement et tenait absolument à savoir ce qu'il avait vécu et comment il se sentait. Au delà du fait qu'elle était bien trop investie, un tel revirement était un peu déboussolant. C'était cela, le pouvoir du jugement dernier et des expériences que leur infligeait Epiales ?

« Uranie, tu as réfléchi à tes vœux ?

- Lucien, tu as réfléchi à répondre à mes questions ?

- ... Désolé. En fait j'ai rien fait de mon futur, j'ai vraiment rien à te raconter.

- T'as rien fait ?

- Je ne suis pas allé dans le futur, Uranie. Enfin si, mais j'ai rien pu faire car ... Car j'en sais rien, j'étais un fantôme. Je crois que même si j'avais survécu cette fois-ci, je serai quand même mort plus tard dans moins de cinq ans, et ça craint.

- Oh. Elle avala une gorgée de limonade, tendue. Tu as pu voir tes proches, au moins ? ... Et ta mère ? Elle allait bien ?

- Comme une mère qui a perdu son seul enfant, c'est quoi cette question ?

- ... Euh ... ouais, c'est vrai .... Désolée ...

- Tu vois, c'est gênant, tu ne voulais pas savoir. ... Tu sais quoi, je trouve ça débile qu'on parle que de nos problèmes, on devrait juste profiter du fait qu'on est pas seuls pour ne pas y penser !

- Tu te fous de moi ? C'est toi qui m'a envoyé me faire voir ce matin pour pouvoir penser à tes problèmes en paix !

- Je sais, je sais pas, j'en sais rien ! Écoute, on s'en fout de ce que je dis, j'ai aucune idée de quoi penser ...

- ... Elle posa sa limonade. Tu viens te baigner.

- Hein ?

- Tu sais nager ?

- ... Ouais ? En réalité, il n'en était pas sûr. Théoriquement, il lui semblait qu'il en était capable, mais il n'avait pas essayé depuis bien longtemps.

- Bah c'est partit. Elle attrapa son bras et le tira vers la rive. Elle a l'air bonne !

- Je-

- Ta gueule, tu ne sais pas, je me fous de ce que tu dis. »

Le blond balisa un instant avant de dévisager Uranie qui lui adressa un sourire carnassier et le poussa dans l'eau. Elle en faisait toujours définitivement qu'à sa tête, en fait. Il mima un sourire avant de l'attraper et lui faire boire la tasse. C'était étrange à dire, mais il était heureux d'être mort jeune, le même jour qu'elle.

Un peu plus loin, Gabriel et Léna, commères de leur état, échangèrent un regard perplexe, sirotant leurs boissons côte à côte.

« On est d'accord que ces deux là sont notre feuilleton quotidien ?

- Ouais, j'ai l'impression de suivre une série de romance un peu foireuse. »