Partie 3 - Chapitre 8

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 Ma vision fut trouble un moment. Je sentais comme un énorme poids le long de mes bras, en fait, j'étais le poids ! Je m'agitai soudain. Je me rendis compte avoir les mains attachées par une corde et être suspendu, seules les pointes de mes pieds touchaient le sol. La lumière était abondante, malgré le bandeau que j'avais sur les yeux, je distinguais de la lumière. Mais il ne faisait pas jour, j'en étais certain, l'air était frais et je ne sentais pas la chaleur des rayons du soleil sur ma peau.

Je me sentais atrocement mal. Ma tête tournait et mon estomac, eh bien, j'avais l'impression de recevoir constamment des coups de hache dedans.

Des coups de tambour se firent entendre. Puis comme un cri de guerre, une sorte de chant de tribut ou de clan.

— Patria ! hurla une voix masculine. Elle était amplifiée par un porte-voix mais elle paraissait tellement impressionnante que j'étais certain qu'elle résonnait dans les canyons. Cela faisait un écho. Le chant continuait.

— Silence ! ordonna la même voix. Tous les bruits s'évanouirent. Otez-leur les bandeaux ! Les tambours se remirent en mouvement. Un rythme lent.

Quelqu'un sauta à mes côtés, soulevant un nuage de poussière. On arracha le ruban qui cachait mes yeux. Tout juste devant moi, la tête enrubannée d'un homme. Une énorme paire de lunettes de ski teintée barrait son visage. Il portait une longue tunique et une veste à fourrure sans manches. Des bottes, elles aussi recouvertes de fourrure et un pantalon en toile. Il portait un masque comme ceux utilisés par les ouvriers de la cité pour ne pas inhaler les produits toxiques.

Le type me donna une tape sur la joue et remonta sur la petite corniche au-dessus de ma tête.

Tous les hommes ayant enlevé les bandeaux grimpèrent sur un petit renfoncement dans le canyon. Comme des aigles surveillant leur proie.

J'étais attaché, debout, contre la paroi d'un canyon oranger. Le lieu était circulaire, cela formait comme une boucle, au centre, un immense rocher, tout autour, de l'eau, puis nous, sur une petite bande de pierre. Pour accéder au centre, aucun moyen. Nous ne pouvions pas y accéder à part en sautant dans l'eau du fleuve. J'étais certain d'être déjà venu ici... ou... dans un livre ! Oui, c'était cela, dans un livre. Nous étions à Horseshoe Bend, sauf qu'autrefois, l'eau du Lake Powell avait presque disparu, désormais, l'eau était remontée de plusieurs mètres. Quelque chose avait changé cependant, car je ne me rappelais pas que le rocher au centre était autrefois complètement détaché du reste du canyon voire pas du tout. Là, cela représentait comme le centre d'une arène, l'eau était comme les douves de ce rocher.

Des torches enflammées étaient enfoncées dans la roche. Au centre du rocher, des centaines de personnes habillées comme l'homme qui avait enlevé mon bandeau. Et tout autour de nous, au-dessus, retenus par des barrières, des milliers d'hommes et de femmes, une foule en délire dans des gradins. Certains avaient des jumelles, d'autres des télescopes ou des loupes.

Les tambours étaient au centre, sur le rocher, de même que l'homme qui parlait. Lui, était sur une estrade circulaire, il surplombait tout le monde. Une plateforme par laquelle on accédait grâce à une longue échelle, comme celles des camions de pompiers de la cité, était entourée d'une barrière et au-dessus, un petit toit enflammé. Il avait une cape en fourrure et des motifs tribaux peinturés sur le visage ainsi que sur son torse nu et les bras.

Nous étions tous attachés ainsi, contre la paroi du canyon. Personne ne manquait à l'appel. A équidistance les uns des autres. Nous avions tous nos sacs à dos et je sentais bien que le mien était toujours plein. Pourquoi ne pas nous les avoir pris ?

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