Chapitre 2

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Se réveiller dans le sud, ouvrir les yeux sur le plafonnier en verre jaune, le bruit de la mer et des vacances, rien ne pouvait être plus agréable. Ainsi commençaient les vacances. Je descendais d'un pas léger dans la cuisine circulaire de Nona qui sentait le café et le pain grillé, le miel et les herbes séchées au-dessus de l'évier. Je m'installais à la table, profitais de chaque détail autour de moi pour garder à tout jamais les images de ce début d'été ; le robinet de cuivre sous le soleil, la fenêtre ronde qui laissait entrer une lumière matinale.

Nona caressait mes cheveux, je pliai la tête sous sa main. J'aimais ces caresses, douces, furtives, inopinées. J'aimais que l'on me touche, mais chez nous, passé un certain âge, on n'avait plus le droit à certaines marques d'affection. Et j'avais passé l'âge.

« Tu as encore coupé tes cheveux. »

Je fini mon jus d'orange pressé, croquai ma tartine. Chez Nona, on pouvait, on devait ! manger du beurre. A la maison, toute graisse inutile était bannie. Maman ne cuisinait que peu, et mieux valait l'éviter.

« Le collège l'exige. Et maman aime qu'ils soient courts.

- Tu n'as plus tes boucles, se désola-t-elle. »

J'embrassai sa main, ça la fit sourire.

« Six semaines ici, elles vont revenir, crois-moi. »

Mes cheveux poussaient extraordinairement vite, ce qui désolait maman. En deux semaines à peine, mes boucles caresseraient à nouveau mes oreilles et ma nuque. Je pourrais les prendre entre mes doigts, douces et entières. Elles devenaient rapidement plus souples, ondulation dans mon cou.

« Tu es un si beau garçon. »

Je souris, gêné. Nona disait les choses telles qu'elles lui venaient.Ca me faisait souvent rire, cette façon de ne pas se retenir si elle pensait quelque chose.

« Tu te promènes aujourd'hui ?

- Oui, tu viens avec moi ?

- Non, Nino, je dois finir une robe. »

Après son mariage, Nona s'était mise à la couture, et Dieu était témoin qu'elle était douée. Très douée, alors en tant que femme veuve et seule avec un enfant, elle était devenue couturière réputée dans la région. J'avais vu la robe en question, robe de mariée, qu'elle confectionnait dans la verrière ouest.

« Retrouve donc Edward, cela lui fera plaisir.

- Je... Oui, peut-être. »

Maman n'avait mis dans ma valise que des chemises à manches longues, et en dessous, des chemises à manches courtes, puis des polos. Que de quoi aller à la messe ou bien faire des dîners de ministre. J'enfilais un polo blanc, un short et les chaussures qui étaient restées dans un coin de ma chambre. J'embrassai Nona avant de filer vers la plage, seul. Je n'avais pas de main à tenir, des petites sœurs dans mes jambes, pas de mère inquiète. A l'aube de mes seize ans, et de mon indépendance qui filait à grands pas vers moi, j'étais indéniablement heureux.

La plage n'était que sable et longue étendue bleue. Je levais les yeux vers le soleil, débordant et dévorant. Il faisait si beau ici, d'un air si pur. J'étais seul, les pieds dans le sable, à regarder la mer s'étendre devant moi, calme et voluptueuse, bleue, tendre, réconfortante. Je n'avais jamais connu la mer aussi calme.

Un cri pourtant derrière moi, je me retournai vivement. Je reconnu immédiatement Edward, la silhouette dégingandée, toute en longueur, comme un arbrisseau. Mais il était accompagné, et Edward courait derrière. C'était celui en tête qui avait crié et continuait de le faire, s'époumonant face au vent marin. Les deux se rapprochaient de moi, et Edward, avec ses jambes de girafon allait rattraper l'autre. Contre toute attente, ce fut moi qui le rattrapais pourtant de mes deux bras où il s'écrasa. L'inconnu riait aux éclats, d'un rire de gorge, profond, alors que je l'aidai à se relever. Edward accouru, essoufflé.

Sea, Sex and Sun [ AUTO-EDITE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant