Le temps passe toujours plus vite quand on essaye de le retenir. Les jours s'égrainaient entre mes doigts sans que je ne puisse rien y faire. Le mardi, je dus aider Nona à transporter de nouvelles robes, nous fîmes plusieurs aller-retours jusqu'à la boutique, croulant sous le poids des vêtements. Elle avait accepté mon cadeau sous certaines conditions et je me pliais à sa moindre volonté. Le mercredi, Will et Ed furent absents, et à nouveau, Will me demandait de ne poser aucune question. Je me pliais à sa moindre volonté. Nous nous verrions le lendemain, jour de mon anniversaire, et cette seule perspective me mettait dans tous mes états.
Je n'étais qu'une boule de nerfs, voyant arriver vers moi, ma vie, comme un mur. Le mercredi matin, une lettre pressée de Marc arriva. Je l'ouvris, les mains tremblantes, le ventre retourné. Qu'allait-il dire ? Qu'avait-il compris ? Le message était court, n'occupait que le recto d'une page pliée en hâte, d'une écriture peu soignée.
Je me laissais tomber dans le sofa dès les premières lignes. J'avais tant espéré qu'il comprenne, qu'il mette des mots là où je ne pouvais pas. Et il l'avait fait.
« Angelo,
J'ai bien reçu ta réponse, cette lettre où tu sembles t'enliser dans des explications qui ne viennent pas. Ne prend pas ton ami pour l'idiot qu'il n'est pas toujours. C'est un homme. Ta lettre floue est bien trop claire dans ce que tu ne dis pas, Angelo. Ainsi donc, c'est un homme qui a ravi ton cœur et aura sût te faire comprendre que les choses de la vie ne sont pas repoussantes comme tu le dis ? Que puis-je te dire ? Tu te dis amoureux, et mon âme qui brûlera en Enfer n'ira jamais en guerre contre cœur amoureux. Oui, bien des choses vont changer, mais tu m'es chère Angelo, et si tu pars, j'estimerai ton courage plus que tu ne peux l'imaginer. Je ne te juge pas, je ne dirai rien. Je ne pourrai plus t'écrire dès aujourd'hui et ce durant plusieurs semaines. Dès que tu le sauras, envoie-moi des nouvelles chez mes parents, et si jamais, une adresse pour te joindre.
Sois heureux, sois brave, sois amoureux.
Affectueusement,
Marc. »
Je m'effondrai, le papier encore serré dans mes mains, je le froissais sans faire exprès. Je rejetai ma tête dans les coussins, le corps secoué de sanglots. Pourquoi fallait-il que tout le monde me fasse pleurer ? J'avais l'impression d'avoir versé plus de larmes durant ces vacances que mes dix dernières années. Pourquoi fallait-il que tout le monde m'accepte et m'encourage ? Pourquoi rendaient-ils cela si facile quand tout devrait être compliqué ? Pourquoi avais-je toujours refoulé cela si loin en moi alors que tout semblait normal ?
Je n'en avais pas moins espéré de Marc, mais tout de même, savoir que je ne le perdais pas et qu'il voulait rester en contact avec moi me réchauffait le cœur. Le plus grand obstacle restait mon père, mais j'aurais des soutiens, j'aurai des piliers s'il le fallait. Je ne pris pas la peine de répondre, puisqu'il ne recevrait rien avant des semaines. J'attendrai. La prochaine lettre que je lui écrirais contiendrai la réponse de mon père, le récit de la rencontre, et je ne pouvais y croire.
« Joyeux anniversaire Nino. »
J'ouvrai les yeux sur ma grand-mère, penchée vers moi, au-dessus de mon lit. Je souris. Je rabattis la couette sur mon visage, piégé par la lumière et mon aïeule de bien trop bonne humeur pour cette heure si matinale.
« Merci Nona.
- Le repas est prêt, il est dans le four. Le gâteau est sur la table, ; je t'ai fait un tiramisu.
- Tu es géniale Nona, la meilleure.
- Tu es sûr que tout va bien aller ? »
Je me redressais sur mes avant-bras, m'étirais. Je frottais mon visage, débarrassais mes cheveux de mon front pour paraitre plus réveillé et sérieux.
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Sea, Sex and Sun [ AUTO-EDITE]
Romance1956. Dans sa vie parisienne bien rangée, Angelo, quinze ans, découvre la liberté d'un été seul dans le Sud de la France chez sa grand-mère. Que pourraient bien lui apporter ces deux jeunes Anglais en vacances eux aussi dont sa grand-mère ne cesse d...