Chapitre 23

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Je dormis dans ses bras, inspirant son odeur douce, profitant de sa chaleur. Nous n'avions pas tiré les rideaux, nous n'avions pas dîné tous les deux dans le même bateau, la même boule au ventre. Edward nous avait laissé étonnamment tranquille, sans doute a la vue de mon visage et de celui de son frère avait-il compris que l'heure était grave.

Je me gavais de son corps, de sa proximité dans une sage intimité qui n'eut rien de sexuel. Je n'en avais pas le cœur et il semblait que lui non plus. Je ne voulais pas y mettre de mauvais sentiments.

Il dormait encore quand je m'éveillais, la tête tournante et le ventre criant famine. Je passais ma chemise dont je m'étais délaissée sur une chaise et me mis en quête de nourriture. Je n'avais pas mangé depuis plus de vingt-quatre heures et je comprenais que mon entêtement dans ma dépression ne m'était d'aucune aide. Je ne saurais en aucune cas crédible dans le rôle de l'adolescent chétif et au bord de l'évanouissement. Je me dirigeais par automatisme vers le petit salon où je savais qu'ils prenaient d'ordinaire leur petit déjeuner. Et je ne me trompais pas, Edward s'y tenait, avec son thé et son journal, ses lunettes et son air sérieux. Il m'avisa, haussa un sourcil, s'attendant sans doute à ce que son frère apparaisse, mais il n'en était rien.

« Souhaites-tu déjeuner ?

- Oui ! Oui, s'il te plaît. »

Il me désigna une déserte en bois sur le côté, la théière fumante et un plateau à étage de gâteaux et de pâtisseries plus alléchantes que jamais. Je me servis généreusement avant de m'installer en face de lui, bien moins intimidé que je l'aurais été auparavant par son air solennel.

« Mon frère dort il encore ?

- Oui, la soirée dut éprouvante à vrai dire. »

Ed haussa un sourcil et je piquais un fard dans ma tasse de thé en comprenant le double sens de mes paroles. Mais il ne dit rien, se contenta de boire son thé en penchant délicatement sa tasse.

« Ce n'est pas ce que je voulais dire ! repris-je. Mon père va venir, il arrive la semaine prochaine. Ton frère va le rencontrer. Je pourrai mourir de cette impatience tant elle me prend aux tripes.

- Oh. Alors tout cela devient officiel. Tu joues bien gros pour mon frère. »

Il éloigna sa tasse vide, plia soigneusement le journal. Rien que d'en parler mon cœur s'emballait.

« Edward je suis... Je suis éperdument amoureux de ton frère. Il a bouleversé ma vie et tout ce que je croyais acquis.

- Tu pourrais tout perdre.

- Je sais. Mais il est la chose la plus forte que j'ai connu. Et même si un jour, cela devait se finir, je ne veux pas laisser passer cette chance, et je n'aimerai jamais une femme. Ne penses-tu pas que cela serait pire de tout construire sur un mensonge ? Pour en plus peut-être voire tout s'envoler dans dix ou vingt ans ? »

Il sembla réfléchir, prendre ma question très au sérieux. Son nez se fronça, il remonta ses lunettes. Je croquais un gâteau en deux bouchées qui me laissèrent les doigts plein de sucre.

« Peut-être. A vrai dire, je veux juste que mon frère soit heureux. Si tu fais partie du plan, tant mieux. Si tu n'en fais pas partie, tant pis. »

Au moins, c'était clair. Il toussa, se pencha un peu plus vers moi alors que j'essuyais mes mains sur une serviette. Le plancher craqua au-dessus de nous, signe que Will se réveillait.

« Mais sache, Angelo, que si tu as le courage d'aller jusqu'au bout, et que malgré cela, tu arrives à rendre mon frère heureux, je serai honoré de te considérer comme ma famille. Et je ferai tout, et comprend bien tout, pour que personne ne gâche jamais votre bonheur. »

Je restai coi devant lui, ne sachant pas vraiment comment interpréter cette déclaration qui se voulait sans doute réconfortante mais qui promettait une lourde pression. Mais je n'eus pas le temps de lui répondre, Will était devant nous, sa lettre à la main.

Il nous avisa, caressa les cheveux de son frère en s'approchant de nous puis vint embrasser ma joue. Ses yeux étaient lourds de fatigue, ses cheveux comme de petites plumes autour de son visage. Il sentait comme le lit, il respirait la chaleur des draps en se laissant tomber près de moi. Sa lettre sur la table laissait deviner son écriture.

« Es-tu sûr de vouloir l'envoyer ?

- Oui. Il ne faut pas que j'y réfléchisse, c'est le meilleur moyen.

- A qui as-tu écrit ?

- Aux parents. »

A nouveau, Edward ne fit aucun commentaire. Qu'aurait-il put dire, dans cette scène qui se jouait clairement entre son frère et moi ?


Moins d'une heure plus tard, je dus partir. Mon sac à l'épaule, le cœur vaillant. J'avais toujours peur de cette rencontre qui m'arrivait droit dessus, cette impression étouffante que j'allais moi-même rencontrer mon père pour la première fois, mais je savais désormais à coup sûr que je ne serai pas seul. J'avais accompagné Will déposer sa lettre jusqu'à l'entrée du village dans la fraîcheur de très tôt matin. Ni l'un ni l'autre ne pourrions plus renoncer. Et je n'en avais pas envie.


Nona était réveillée et m'accueillit chaleureusement. Elle caressa longuement mes boucles, sans rien dire alors que je m'assis sur la causeuse de son atelier. Je me laissais faire sous sa main, appréciant la douceur, l'attention, le calme.

« Te sens-tu mieux ?

- Je ne sais pas. Je crois que tout ce que je veux, c'est que ce soit fini, qu'importe comment cela se passe. »

Elle hocha la tête sans rien dire de plus.

« Nona, je sais ce que je veux comme cadeau pour mon anniversaire. Cela ne te coûtera rien. »

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Bon, j'aurai voulu écrire plus mais honnetement, mon concours s'approchant, en plus du boulot, j'ai très peu de temps. La suite arrive et vous aurez le droit à l'anniversaire d'Angelo ;)

En attendant pensez à voter et commenter !

Sea, Sex and Sun [ AUTO-EDITE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant