Une amitié brisée (Tome 1)

Chapitre 9

PDV Lucas

Je savais que Maxence était allé voir Bianca la veille. J'avais envie de la voir aujourd'hui, pour tenter de savoir s'il s'était passé quelque chose entre eux. Je décidai donc de l'appeler, vers onze heures, pour être certain de ne pas la réveiller. Elle répondit au bout de plusieurs sonneries, alors que j'étais sur le point de raccrocher.

« Allô ?

- Ouais, Bianca, c'est Lucas...

- Salut, Lucas ! Ça va ?

- Oui, très bien et toi ?

- Oui...

- T'as quelque chose de prévu aujourd'hui ?

- Euh... Ouais.

- Oh... J'avais pensé qu'on pourrait faire un truc...

- Je suis désolée, Lucas, ça sera pas possible aujourd'hui. J'ai commencé à écrire un nouveau truc. Je dois m'installer dans mon nouvel appart' et...

- Un nouvel appart' ? Tu t'installe à Paris ?

- Oui... Pour quelques mois. Il faut aussi que je prépare la vidéo, mais... On se voit demain, quand même.

- Euh... Oui, bien sûr. À demain, alors...

- À demain. »

Elle raccrocha et je me laissai tomber sur le canapé, déçu.

Je décidai de me rendre au studio, même si je n'avais rien à tourner aujourd'hui. Je n'avais pas envie de rester seul chez moi. J'amenai Natsu avec moi et décidai d'aller voir si Raphaël et David étaient dans leur studio. J'entrai sans cogner, heureux de voir qu'ils étaient là, en train de travailler sur un sketch.

« Salut les mecs! je lançai joyeusement, tentant de cacher ma déception. Vous êtes prêts pour demain? Parce que, c'est pas pour me vanter, hein, mais moi je les connais bien les expressions québecoises, tabarnak.

- J'ai déjà parié que Mcfly allait perdre, répondit Raphaël en donnant un coup de coude dans les côtes de son ami.

- Je crois pas que la petite Bianca va nous rendre la tâche facile, dit David. Tu devrais pas être aussi sûr de toi, Lucas. »

Je sentis mon coeur se serrer en entendant le nom de celle à qui je ne pouvais plus m'arrêter de penser.

« Vous avez une idée de ce qu'elle va demander comme gage au perdant? » interrogea Raphaël, qui ne semblait pas avoir remarqué mon état.

Nous lançâmes quelques suggestions au hasard, mais rien ne ressortit vraiment. Nous étions très tentés de googler quelques expressions québécoises, mais Raphaël nous convainquit de ne pas le faire. Tout se jouerait le lendemain. J'espérais impressionner Bianca.

« T'as eu des nouvelles de Maxence? lança Raphaël à un moment à travers nos délires.

- Non... »

Je regardai l'heure. Il devait être à Nîmes, maintenant. D'ailleurs, le temps avait filé depuis que j'avais retrouvé mes deux amis.

« Bianca s'installe à Paris pour quelques mois », annonçai-je en m'asseyant sur le canapé.

Cette information m'avait trotté dans la tête depuis que je l'avais apprise, mais je n'avais pas encore osé en parler. Je ne comprenais pas pourquoi elle me perturbait autant, alors que j'aurais dû m'en réjouir. Ma confusion devait se lire sur mon visage, car David me demanda:

« C'est une bonne nouvelle, non?

- Je sais pas trop... je comprends pas pourquoi tout d'un coup elle décide de rester pour longtemps. »

Je croisai le regard de Raphaël, ce qui suffit pour que je comprenne qu'il pensait comme moi. Peut-être qu'elle était restée pour Maxence. J'avais bien hâte qu'il revienne pour qu'on ait une bonne discussion ensemble. Le silence qui s'était installé fut brisé par la sonnerie de mon téléphone.

« Allô?

- Lucas? C'est Bianca...

- Salut!

- Je pensais aller dans le petit café de l'autre fois pour écrire un peu... Si t'as un truc à travailler, peut-être que tu pourrais me rejoindre? J'aime bien être avec quelqu'un quand j'écris.

- Euh... ouais, absolument, j'ai quelques recherches à faire pour une vidéo justement. On se rejoint là-bas à vingt heures?

- Ça marche! À plus tard! »

Je raccrochai, un peu perdu. Elle semblait si distante ce matin, je n'arrivais plus à suivre.

« Je vais travailler avec Bianca au café ce soir », résumai-je pour mes amis qui me lançaient des regards interrogateurs.

Même eux ne semblaient rien y comprendre.

« Je suis marié et pourtant, je comprendrai jamais rien aux femmes », se désola faussement Raphaël, nous faisant rigoler.

Je rentrai chez moi pour dîner, avant de me rendre au café. Je ne savais pas trop à quoi m'attendre pour la soirée, mais j'essayais de garder en tête que je n'étais qu'un pote pour elle. Quand j'arrivai, elle était déjà assise à une table, devant un café, un paquet de feuilles blanches avec des schémas et des notes gribouillées dessus et un cahier.

Je pris place en face d'elle. Elle releva brièvement la tête pour me sourire, mais revint très vite à ses notes.

« Ça va ? Demandai-je.

- Très bien... Ça fait du bien d'arriver à écrire... Ça faisait longtemps. »

Elle finit d'écrire une phrase et posa son stylo pour mieux poursuivre la discussion.

« T'es bien installée ?

- Oui, l'appart' est pas très grand, mais ça me va, pour le temps que j'y passe... T'as passé une bonne journée ?

- Ouais, j'ai passé l'après-m' avec Mcfly et Carlito.

- Vous avez pas triché, j'espère ?

- J'avoue, on y a pensé... Mais Raph nous a interdit de le faire. »

Elle rit doucement.

« Ça me surprend pas.

- Pourquoi t'as décidé de rester plus longtemps, alors ? »

Je n'avais pas prévu de lui poser la question, mais je l'avais prononcée avant même de m'en rendre compte.

« Euh... En fait, c'est que j'ai obtenu une subvention et... Je trouve la ville inspirante. Je peux me permettre de rester un peu, j'ai les moyens.

- C'est génial !

- Oui... Mais mes proches me manquent déjà... J'ai l'habitude d'aller dans un petit café comme ici avec ma meilleure amie pour écrire. Ça me manque, c'est pour ça que je t'ai demandé de me rejoindre. »

Alors qu'elle disait cela, des larmes lui montèrent aux yeux. Je me levai et lui fit signe de venir dans mes bras pour la réconforter. Elle vint s'y blottir et je lui caressai les cheveux doucement. Au bout de quelques secondes, elle s'écarta brusquement.

« Désolée, dit-elle en retournant s'asseoir. Je voulais pas...

- Hé, Bianca, c'est rien... T'as le droit d'être triste...

- C'est pas ça, Lucas... Je veux juste pas que... que tu te fasse des fausses idées.

Je tentai de cacher le mal qu'elle venait de me faire, même si je savais déjà qu'elle ne me voyait que comme un ami, dit comme ça, ça semblait pire.