« Arthur. » La voix était sèche, peu impressionnée, et il avait tourné sur ses talons, la tête penchée sur le côté pour examiner son interlocuteur. Il savait de qui il s’agissait, évidemment – il avait été prévenu de son arrivée dès son atterrissage, avait suivi du coin de l’oeil sa progression dans Necropolis, l’avait observé passer les différents stages de la sécurité, uns par uns, pour être sûr qu’il ne venait pas l’assassiner. C’était un luxe qu’il prenait, celui d’avoir l’air surpris, expression parfaite et travaillée, comme pour faire penser qu’il ne pistait pas ses visiteurs avec les caméras qui criblaient la ville. Cela marchait avec la plupart de ses visiteurs, qui lui attribuait plus de puissance qu’il n’en avait lorsqu’ils le voyaient étonné de les trouver là. Cela ne marchait pas avec Sal. Cela ne marchait plus avec Sal et il lui avait souri, un sourire de prédateur, un sourire toute en pointe et en joie cruelle, avant de se jucher sur son bureau, les jambes croisées et le menton enfoncée dans la pointe de sa main.
« Tu vas bien ?
– Je ne suis pas là pour ça. Je suis là pour ton expérience.
– Laquelle ?
– La galaxie, la fille, le dragon, tu sais de quoi je parle, Arthur. »La vérité, c’était qu’il les avait presque oublié. Il avait d’autres choses à gérer, un droit de vie et de mort sur la fange de Necropolis, un peuple à distraire. Il avait oublié la fille kidnappée pour punir son père de n’avoir pas voulu travailler pour lui. Il avait oublié le dragon charmé, la promesse de retrouver son créateur quand il n’avait que pour unique but de prendre sa place. Il avait oublié. Ce n’était pas important, jusque là, et les sourcils froncés de Sal lui avait fait hausser le sien, par provocation.
« Il y a un souci avec ça ?
– Ils sont partis. »C’était inattendu. Il ne pensait pas qu’elle pourrait communiquer avec l’être, il ne pensait pas qu’elle pourrait le convaincre. Il ne pensait pas. Il avait haussé les épaules, comme pour le rassurer, comme pour se rassurer, avait appuyé les mains contre le bois luminescent de son bureau.
« C’est grave ?
– Son père a disparu aussi. »C’était fâcheux. Pas irrécupérable mais fâcheux.
« Ils viennent pour toi, Arthur. C’est certain. »
C’était injuste, en réalité, qu’ils puissent vouloir s’en prendre à lui. Injuste mais terriblement attendue, qui ne voudrait pas s’en prendre à l’homme le plus puissant des galaxies ? Personne.
« Eh bien. » avait-il lancé d’un ton qui lui avait valu un regard noir de la part de Sal. « Qu’ils viennent, je les attends. »
Il ne serait pas seul pour les accueillir.

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de poussière et d'étoiles
Science FictionFINIE | Quelque part au centre de la galaxie, une énergie palpite. Au-dessus des têtes, le Créateur dort. Au milieu de tout cela, le Casino Lovelace asservit la galaxie. Perchée sur les ruines d'un empire détruit, Corbeau veille.