Chapitre 15. Alizée

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Lundi.

Tout c'était passé comme je l'avais prévu. Je l'avais totalement ignoré de toute la soirée, l'avais fait serrer des poings comme prédits en supposant que je n'avais jamais regretté d'avoir déménagé, j'avais réduit sa virilité à néant avec un simple pauvre ver de terre sans défense, j'étais carrément satisfaite du déroulement de ce diner, et il a réussi à me retirer toute réjouissance quant à cette victoire écrasante en un quart de seconde.

Dès l'instant où la chaleur envoûtante de son corps a bordé le mien, et que sa voix suavement rauque à résonner contre mon tympan en élançant un frisson familier sur ma peau, j'ai été irrémédiablement disqualifiée pour abandon de mes propres convictions. Soit de ne plus montrer aucuns signes de faiblesse envers lui. Autant dire que c'était un échec puisant.

« T'es très belle dans cette robe trésor », « Laisse-moi une chance »... Ça tourne en boucle dans ma tête depuis deux jours.

Si je ne m'étais pas déjà fait berner, j'aurais facilement pu croire qu'il était sincère et que le ton suppliant et navré qu'il tenait ne venait pas seulement de mon imagination, ni d'une nouvelle méthode pour m'amadouer et parvenir à m'humilier encore une fois. J'aurais bêtement cru que Thomas disait vrai.
Sauf que j'ai bel et bien déjà été naïve une première fois, et que j'ai durement appris de mes erreurs depuis.

-Bonjour trésor, me surprend-il à l'arrêt de bus du campus, alors que je prenais pleinement la fuite à l'heure du déjeuner.

L'enfoiré, il m'a doublé !

-Qu'est-ce que tu fais là ? T'as voiture est en panne ? fais-je semblant de ne pas savoir ce qu'il attend.

Rien à voir avec un bus, je le sais bien, mais pas question de lui donner ce qu'il veut.

-Ma voiture se porte très bien. Enfin, si ce n'est que maintenant, elle brille de milliers de paillettes indélébiles au moindre rayon de soleil.

Bien fait.

-Tu sais pourquoi je suis là, reprend-il en se relevant.

Il enfonce nonchalamment ses mains dans les poches de son jean noir, puis se plante devant moi de toute sa hauteur. Même avec mes bottines à talons, j'atteins difficilement sa hauteur et suis obligée de relever le menton pour l'observer. 

-Et moi, je savais que toi, tu serais là, prête à t'enfuir, comme toujours...

-Il ne me semble pas t'avoir dit oui pour ce déjeuner, lui fais-je remarquer froidement. 

-Il ne me semble pas t'avoir entendu le refuser non plus, rétorque-t-il.

-Autant pour moi, je pensais que ma réponse était évidente. C'est non, bonne journée.

Me prouvant une nouvelle fois qu'il me connait réellement par cœur, il anticipe la fuite que j'allais reprendre en attrapant mon poignet, élançant un énième et incontournable frisson électrisant sur ma peau. Je me retire sèchement de sa prise en me maudissant à voix basse de réagir de cette façon, encore, malgré toute la rancœur que je lui voue.

-Je sais que pour l'instant tu me détestes et t'en as largement le droit, mais j'ai quelque chose à te montrer qui pourra peut-être changer l'opinion que t'as de moi. Que j'ai conscience de t'avoir moi-même donné, et je m'en veux vraiment énormément pour ça alors s'il te plait, accorde-moi rien qu'un déjeuner pour essayer de te prouver que je ne suis pas le connard que je t'ai laissé croire que j'étais. Je ne t'oblige pas à ma pardonner après ça si tu n'en n'as toujours pas envie, je te demande juste de me laisser une infime chance de réparer mes erreurs Ali... insiste-t-il de cette même foutue voix suppliante.

Vengeance ou sentiments.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant