Chapitre 18. Mathieu

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Samedi.

-Arrête de te prendre la tête vieux, je suis sûr qu'elle va venir.

Thomas, qui se montre étonnement réconfortant depuis une heure que j'attends de moins en moins patiemment l'arrivée d'Alizée, me sourit en m'offrant une tape amical dans le dos.

-Viens discuter avec nous autour d'une bière, t'as l'air d'un con à fixer la porte comme ça, me charrie-t-il en pressant mon épaule pour m'inciter.

En refoulant un soupir déçu, j'abandonne le coin d'observation que je m'étais trouvé près de l'entrée, et le suis jusqu'au canapé où la plupart de nos potes sont installés. Du moins, aux alentours, y compris sur la table basse qui est devenue un tabouret géant pour invités, faute de place dans notre cinquante mètres carrés tout juste.

Même si je ne m'en plains pas, et que je suis largement reconnaissant à mes parents de payer la part du loyer tous les mois pour m'éviter d'avoir à travailler, et de pouvoir rester pleinement concentré sur mes études.

-Tiens, te revoilà ! me lance Lucie en laissant sa place à Thomas, avant de se rasseoir sur ses genoux. Je croyais que ta copine devait nous rejoindre ? J'avais hâte de la rencontrer, Tom m'a dit qu'elle était...

Elle hésite un moment en échangeant un regard à mon meilleur pote, que je fusille du regard en me doutant facilement de l'adjectif qu'il a dû employer pour décrire Alizée.

-Etonnante, choisit-elle d'alléger les propos de son copain. Elle ne vient pas finalement ?

-Ce n'est pas ma copine, me répétais-je, encore, dans un râle. Et je n'en sais rien, elle ne répond pas à mes appels... avouais-je en marmonnant derrière le goulot de ma bière.

J'avale une longue gorgée en vérifiant mon téléphone pour la millième fois, dénué de réponse de sa part.

-Il s'est passé un truc que t'aurais omis de me raconter ? se renseigne Thomas.

Ouais, un truc que je ne vais certainement pas te raconté devant une quinzaine de personnes.

-Rien en particulier, mentis-je.

Mais je sais qu'il va le comprendre. Il me le confirme en m'échangeant un rapide coup d'œil, intrigué, et un hochement de tête tout juste perceptible.

-Elle ne devrait pas tarder alors, elle doit se faire belle pour toi, suppose naïvement Quentin, essayant de me réconforter à son tour.

Je lui rend son sourire du mieux que je le peux, et m'intègre dans les conversations pour tenter d'avoir l'air moins déprimé et ne pas l'inquiéter. Seulement plus les minutes passent sans un signe d'elle, et plus j'ai du mal à faire semblant que je ne suis pas en train de perdre littéralement le contrôle de moi-même.

Je réfléchis à m'en torturer l'esprit, me repassant ces trois derniers jours en boucle pour chercher la faille et tout ce que je trouve pour excuser cette absence, c'est notre écart de cet après-midi qu'elle doit très probablement regretter. Ce que j'aurais dû anticiper. Elle flippe parce que notre relation prend de l'ampleur, et qu'elle dépasse tous les stades qu'elle a connu jusqu'à maintenant, je le sais parfaitement.

Si Alizée Boisié était faite pour l'engagement, ça se serait.
Déjà au lycée, elle évinçait tous les mecs qui s'intéressaient à elle. Pour mon plus grand bonheur, bien évidemment, mais c'était déjà un signe avant-coureur de son incapacité légendaire à entretenir une relation autre qu'amical. Et encore, même ça, ça détient de l'exploit pour elle. Une raison parmi d'autre qui m'a longuement découragé à lui avouer mes sentiments.

Vengeance ou sentiments.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant