*PDV Salem*
Perdu dans mes pensées, j'en avais même oublié de lire le texto de Sarah. Il disait : « Je sais que je t'ai fait du mal mais je m'en excuse. Pardonne-moi Salem. Yala sakh dafay balé. (=Même le bon Dieu nous pardonne nos péchés.)». Non mais pour qui me prenait cette fille ? Si elle pense qu'elle allait me tromper avec Dakar tout entier pour après, obtenir facilement ma miséricorde, elle se fourrait le doigt dans l'œil jusqu'à l'omoplate. Je n'étais pas Dieu le Clément, le Miséricordieux. Dieu pardonne ? Eh bah, moi Salem, je n'étais pas Dieu. Je fus tenté d'ignorer ses messages, tout comme sa multitude d'appels d'hier soir, mais je me devais de mettre fin à cette mascarade. Je lui répondis donc d'une manière très sèche, directe et sans détours, et qui saurait clore le débat à jamais.
Je ne lui pardonnerai jamais ni le fait de m'avoir trompé au vu et au su de tous, en abusant de ma confiance et de ma naïveté excessive, ni le fait qu'elle m'ait caché que sa mère était contre notre idylle naissante. Et même si je décidais de lui accorder une seconde chance, je ne voulais pas continuer une relation basée sur des cachotteries et des mensonges : si Sarah et moi devions nous remettre ensemble, nous devrions en mettre au courant nos parents respectifs. C'était ça ou rien ! Et vu qu'on n'aurait pas l'accord de sa mère, cette relation était carrément vouée à l'échec. Cela ne servirait donc à rien de recoller les morceaux pour une chose qui n'en valait pas la peine. Cette rupture était la solution idéale : pas de cœurs meurtris, pas de tiraillements entre mère et fille....
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* PDV Sarah *
Après lui avoir envoyé ce message qui se présentait comme ma dernière voie de recours, je suivis le conseil de mon père, et commençai donc à m'apprêter. J'en étais à m'habiller et à ranger tous mes gadgets électroniques dans mon bagage à main quand mon portable sonna. Ça y est !!!! J'avais enfin une réponse après plus de 48H de torture mentale. Salem était un vrai bourreau, pardi ! Ce fut donc avec une certaine appréhension que j'ouvris son SMS, en espérant de tout mon cœur et de toute mon âme, qu'il m'annoncerait qu'il serait à l'aéroport. Eh oui, malgré son lourd et long silence, je n'arrivais toujours pas à me résigner à accepter sa décision. Mais sa réponse tranchante me fit l'effet d'une douche froide. Elle disait mot pour mot : « Tu veux mon pardon ? Eh bah, tu l'as. Je te pardonne de tout mon cœur. Mais STP, oublie-moi. Toi et moi, c'est fini Sarah, et rien, ni personne, ne pourra me faire changer d'avis. Ne m'écris plus, et ne m'appelle plus STP. Merci. ».
Waouh. Le verdict était enfin tombé. Mon sort était scellé à travers un SMS de 3 lignes. Bravo Salem ! Merci de foutre en l'air notre relation. Même si elle n'avait duré que deux infimes mois, elle avait été la plus enrichissante en termes d'expérience, et d'émotions.
La pilule était très dure à avaler : Salem ne voulait plus de moi, et il me l'avait explicitement fait savoir à travers son SMS. Il est vrai que j'étais plus que consciente du fait que j'étais la principale coupable dans cette histoire. Mon infidélité en était le point départ, mais je trouvais la sentence rudement sévère. Toute relation amoureuse requiert des concessions et entre autres une compréhension mutuelle, une communication sans failles, et une tolérance réciproque. Mais Salem n'avait rien compris à cela apparemment, vu que Monsieur restait intraitable.
J'étais tellement sonnée par son message que mes larmes refusaient de sortir de leur loge.
« Rien, ni personne, ne pourra me faire changer d'avis. », avait-il dit. Sa phrase avait le mérite d'être claire. J'étais certes très amoureuse de lui, mais de là à continuer à supporter ses rejets incessants, non merci ! Il est l'heure de tourner la page pour toi, Sarah. Il ne voulait plus de toi, passe à autre chose. Toutefois, c'était plus facile à dire qu'à faire. Je ne devais pas me contenter de tourner la page, il me fallait aussi entièrement déchirer le chapitre dédié à Salem.
Fin prête, je me dirigeai vers la chambre de mes parents pour chercher mon père. Mais il n'y était pas : seule, ma mère était assise sur le lit conjugal, prostrée dans une position de lassitude qui me fendit le cœur. Nous avions passé le reste de l'été à nous mener la guéguerre, et j'étais tellement occupée à placer toute mon énergie dans ma relation avec Salem que je ne lui avais même pas consacré du temps. Pire : je l'évitais soigneusement pour éviter toute suspicion de sa part. Quand on persiste à dire que les enfants sont toujours ingrats envers leurs parents, il ne s'agit pas d'une légende, ni d'un mythe. Nous grandissons en suivant les petits cailloux qu'ils ont semés sur le chemin tortueux de la vie, tels des petits poucets, pour ensuite oublier leur rôle prépondérant de guides, dès que le moindre conflit familial se présentait à l'horizon.
_Moi : Maman, je suis prête ! Où est papa ? On devrait y aller, ils ont surement dû déjà commencer l'enregistrement.
_Maman : Il doit être en bas. Il a déjà mis tous tes bagages dans le coffre, façon. Assieds-toi, je voudrais te parler.
J'eus une boule dans le ventre. Ce n'était ni de l'anxiété, ni de la peur. Il s'agissait plutôt d'une tristesse abominable. J'avais juste envie de me blottir dans ses bras pour oublier ma peine. Les câlins de ma mère étaient plus efficaces que n'importe quel médoc. Je lui répondis d'une voix chevrotante :
_Moi : Je t'écoute, Man.
_Maman : Je sais que ces derniers jours n'ont pas été top entre nous. Mais sache que quoi qu'il ait pu se passer entre nous, je ne cherchais que ton bonheur. Si je t'ai interdit de voir Salem, c'est parce que je pense tout simplement qu'il n'est pas l'homme qu'il te faut. Un homme moins âgé que toi ne peut pas te comprendre, et prendre du recul par rapport à tes agissements. Je sais que tu as continué à le fréquenter, malgré mon interdiction. Je vous ai vus dans le taxi le jour où il t'a ramené vers 4h du matin. Je ne suis pas bête, tu sais. J'aurai pu le dire à ton père, mais une mère reste une mère. Je me réveille chaque matin avec un objectif unique : vous protéger toi et Malick. Bref, sache juste que je ne cherche ni à te nuire, ni à te faire du mal. Tout ce qui m'importe, c'est ton bonheur et ton bien-être. Je t'aime ma fille. Que Dieu te garde. Pars en paix, et reviens nous en paix.
Sur ces mots, elle me prit les mains, me les agrippa, les posa sur les siennes, et commença à psalmodier des prières dessus. J'étais toute émue. Je me lovais enfin dans ses bras et lui dis : « Je t'aime Maman, pardonne-moi. ». Nous pleurâmes toutes les deux, en nous séchant mutuellement nos larmes. Elle allait trop me manquer, ma Mamounette.
Le trajet jusqu'à l'aéroport fut terriblement court. Les minutes semblaient me narguer en passant à toute vitesse. Malick n'arrêtait pas de pleurer, et j'avais vraiment du mal à le calmer. Mon père regrettait presque de ne pas l'avoir laissé à la maison avec Maman qui détestait les au revoir et donc, n'avait pas le cœur à me raccompagner. Ça c'était mon petit frère tout craché, toujours à se plaindre quand je lui faisais des bisous, mais à chaque année, c'était le même scénario, il manquait de suffoquer de pleurs à mon départ. Et, le voir ainsi, me plongeait dans une détresse indescriptible.
L'aéroport Léopold Sédar Senghor est, de mon humble avis, le pire aéroport du monde : dès l'entrée, on vous sépare de vos proches qui ne sont pas autorisés à entrer dans l'enceinte de l'aéroport, et à vous accompagner dans la procédure d'enregistrement.
Je dus donc dire au revoir à mon père et à mon petit frère aussitôt arrivée. Je serrais très fort Malick, au point de l'étouffer et lui fit plein de bisous. Quant à mon père, peu doué pour les marques d'affection, il me serra maladroitement dans ses bras, mais je pouvais sentir toute son émotion contenue.
Mon enregistrement se passa à toute vitesse : il faut dire que j'étais tellement dans les vapes que je remarquais à peine le brouhaha affairé des divers voyageurs. J'étais arrivée au point du non-retour : il n'y avait plus aucun espoir, mon histoire d'amour avec Salem était bel et bien achevée, je partirai sans revoir une dernière fois son sourire si unique.
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* PDV Salem *
A la dernière minute, je pris la voiture de ma mère en catimini, et fila à grande vitesse vers l'aéroport. J'ignorais quel démon m'avait pris en otage, mais tout ce que je souhaitais, c'était la revoir une dernière fois, sinon, je risquais de péter les plombs à son départ. Je devais bien ce dernier souvenir à mon cœur meurtri. Je fus chanceux. En rabattant ma casquette sur ma tête, j'eus le temps de me garer, et de l'apercevoir au loin avec son père et Malick. Elle avait l'air triste ou fatiguée, et était adossée à son charriot. Elle était incroyablement belle. Je me retenais pour ne pas m'élancer à sa rencontre, et la serrer contre moi, et lui dire que tout était oublié, mais mon orgueil remporta la bataille contre mon cœur. Je lui jetais un dernier coup d'œil et je repartis en direction de ma voiture. C'était officiellement officiel : tout était fini.
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TOME 1 : Entre désillusions et trahisons, notre amour survivra-t-il ?
Roman d'amourJe sortis à la hâte de son building dont l'air était devenu étouffant, et m'apprêtai à héler un taxi pour m'y engouffrer moi et ma peine insupportable, lorsqu'Ismaël se pointa. _Ismael : Je t'avais bien dit que je ferai de ta vie un enfer sur terre...