À mon réveil, ma montre m'informe qu'il est cinq heures du matin. L'été s'achemine vers l'automne, les jours raccourcissent, nous plongeant petit à petit dans la trop longue nuit d'un hiver qui va s'avérer terrible. Nous sommes le 15 septembre.
Sans la mémoire infaillible de Madame Hermann, nous ne saurions absolument rien du jour qu'il est. Et je dois malheureusement avouer que la date précise ne serait de toute façon plus au centre de nos préoccupations. La seule chose qui compte désormais n'est pas de savoir quel jour nous sommes, mais de savoir si nous allons pouvoir vivre un jour de plus.
Notre situation n'a fait qu'aller de mal en pis depuis ce jour d'été où l'épidémie s'est déclarée. Nous n'avons fait que courir d'un lieu à l'autre, toujours déçus, jamais rassurés, sans cesse et où que nous allions, rattrapés par les morts, contraints de fuir encore plus loin. Nous n'avons plus de voiture, presque plus de vivres, ce que nous possédons se réduit à trois sacs à dos.
Hier nous avons parcouru plusieurs dizaines de kilomètres à pieds, en devant, Charly et moi, porter ma petite sœur à tour de rôle.
Nous avons frôlé au moins deux fois la catastrophe avec des rôdeurs, et nous n'avons dû notre survie qu'aux excellents réflexes et à la hargne inépuisable de notre ami.Nous avons fini par atterrir dans un pub minable, sans électricité ni eau courante. Seuls deux canapés hors d'âge dans le fond de la salle pouvaient faire office de lits de fortune. Malgré la fatigue, Charly a insisté pour en déplacer un jusque dans la réserve, uniquement pour que je puisse dormir tranquillement dans le silence – j'avais une migraine terrible. J'ai failli éclater en sanglots devant sa gentillesse et la patience dont il fait preuve avec moi.
Malgré les quelques heures de sommeil, je me sens aussi épuisé que si je n'avais pas dormi du tout. Depuis presque une semaine, aucun de nous trois ne parvient à récupérer de sa fatigue, même en nous organisant pour dormir équitablement à tour de rôle. L'unique point positif est que Danica va à peu près bien, elle mange correctement et fait de vraies nuits en plus de ses siestes quotidiennes, ce qui, pour nous, est la chose la plus importante.
Dans la pièce principale du bar, Charly est couché de tout son long sur le second canapé. Ses jambes débordant largement du divan sont posées sur une chaise. Dani dort sur lui, étalée sur le ventre, un bras et une jambe ballants, dépassant de sous la couverture.
La scène pourrait être amusante et attendrissante, mais vu le contexte, je me sens surtout retourné de voir ça. Mon ami est épuisé, il a d'énormes cernes sous les yeux. Il n'a même pas pris le temps de retirer ses chaussures, et il est évident qu'il est en train de dormir dans une position inconfortable pour sa grande taille.Un peu plus loin, Madame Hermann est assise à l'une des tables du bar.
Devant elle, à la lueur de plusieurs bougies, sont étalées une carte et une masse de feuilles de papier. Juste à côté est posée notre radio.
C'est une des premières idées de notre amie : nous nous somme procuré une de ces radios qu'utilisent les policiers – nous l'avons trouvée dans un commissariat abandonné, elle fonctionne sur piles. Elle fait à la fois émetteur et récepteur. Il nous a fallu un long moment pour comprendre comment l'utiliser, mais nous y sommes parvenu. Et nous avons découvert que les ondes étaient largement habitées, soit par ce qui restait d'autorités officielles, soit par des civils ayant eu la même idée que nous.
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L'étoile qui commence et termine la nuit
FanfictionHomme doux et anxieux, Jon est bien plus doué pour préparer le thé et s'occuper de sa petite sœur que pour la survie, mais sa rencontre avec une inconnue blessée armée d'un sabre va venir perturber sa tranquillité. Et peut-être même le forcer à affr...