Immédiatement, à la vue du sabre de la femme pointé vers nous, Charly a braqué son Smith&Wesson dans sa direction. Moi, je me fige, tétanisé face à cette arme terrifiante, qui semble littéralement sortie d'un autre âge.
Le regard de l'inconnue est d'une dureté à glacer le sang. Je sens instinctivement qu'elle n'hésitera pas une seconde à nous tuer, revolver ou pas.
Nous sommes deux et elle est seule, et j'ai pourtant la sensation absurde mais bien réelle que Charly et moi ne faisons pas le poids. Pourtant, elle n'attaque pas. Son sabre toujours fermement pointé, elle déplace son poids d'un pied sur l'autre, dans une sorte de petit trébuchement involontaire.
Et c'est là que je me rends compte de l'état de sa jambe.Un bandage de fortune est enroulé autour de sa cuisse, directement par dessus son jean. Il est gorgé de sang comme une éponge. On peut même voir la trace à travers le tissu du pantalon, là où le sang a dégouliné le long de sa jambe. Je suis effaré. Comment a-t-elle pu courir si vite avec une telle blessure ? Comment peut-elle encore tenir debout en ce moment ? La douleur doit être insoutenable, comment arrive-t-elle à supporter ça sans hurler ?
Il se passe ainsi quelques secondes d'hébétude, où je ne sais quoi dire. Le regard de cette femme silencieuse me transperce de part en part. Je ne serais pas davantage tétanisé en me trouvant face à face avec un tigre. Toute blessée et fatiguée qu'elle est, cette femme dégage une impression de force et de sauvagerie qui me cloue sur place.
Elle desserre finalement les mâchoires, et c'est presque furieusement qu'elle me jette à la figure ces quelques mots :
« Allez, finissons-en ! »La surprise qui se lit sur mon visage la fait hésiter, l'espace d'un court instant.
« T'attends quoi, connard, qu'il neige ? siffle-t-elle. Vous me vouliez, ça y est, vous m'avez ! »Je retrouve enfin ma voix.
« Madame, je ne comprends pas, dis-je maladroitement. Je ne vous connais pas. »
L'inconnue se trouble tout à fait maintenant. Elle me jette un regard incertain.
« Attendez, vous êtes pas... avec les autres ? »
Charly et moi nous dévisageons. Les autres ?
« Il n'y a personne d'autre, seulement nous deux », dis-je.Pour qui nous prend-elle ? Est-ce que sa blessure l'a désorientée au point de perdre pied avec la réalité ? Peut-être est-elle fiévreuse ? Infectée ? En tout cas, ce qui est certain, c'est que nous ne pouvons pas la laisser comme ça, il faut lui venir en aide.
« Ne pointez pas votre arme vers nous, madame, on ne vous veut pas de mal, tentai-je.
- Vous ? Qui est avec vous ? Vous êtes qui ? »
Elle est visiblement confuse.
« Vous avez l'air épuisé. Laissez-nous vous aider. »
L'inconnue ne semble pas du tout disposée à obtempérer. Devant son regard farouche, j'essaie de la convaincre du mieux que je peux.
« Nous avons un abri, un endroit sûr, vous serez plus en sécurité qu'ici. Il faut s'occuper de votre blessure, vous perdez beaucoup de sang, vous ne pouvez pas rester comme ça. Madame Hermann va vous soigner, c'est une femme qui est avec nous, elle est médecin.
- Médecin ?
- Oui, oui, elle est médecin, vous n'avez rien à craindre. S'il vous plait, rangez votre arme. »
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L'étoile qui commence et termine la nuit
Fiksi PenggemarHomme doux et anxieux, Jon est bien plus doué pour préparer le thé et s'occuper de sa petite sœur que pour la survie, mais sa rencontre avec une inconnue blessée armée d'un sabre va venir perturber sa tranquillité. Et peut-être même le forcer à affr...