J'ouvre les yeux.
La lumière filtrant à travers les rideaux de cette chambre qui n'est pas la mienne m'informe que c'est le matin. Ce qui veut dire que je suis parvenu à dormir plus de six heures. Je constate avec soulagement que la migraine qui m'a cloué au lit la veille s'est presque entièrement dissipée.Au-dessus de moi, au plafond de cette chambre, se trouve un ciel entier de petites étoiles, dessinant ce qui semble être les constellations connues – je devine la Grande Ourse. Je remarque ces étoiles pour la première fois. Il doit s'agir de ces autocollants qui brillent dans le noir.
Je me sentais si mal hier que je ne les avais même pas vus luire dans l'obscurité de la pièce. Un peu étrange, pour une chambre de femme adulte, mais à la réflexion, ça donne une petite touche poétique.
Durant un moment, je rêvasse un peu, détaillant la pièce qui m'entoure. Qui était cette femme qui vivait ici ? Cette femme qui possédait une modeste collection de chaussures à talons – que je trouve assez belles, élégantes et de bon goût – dont les murs sont ornés de reproductions de tableaux de Monet et de Delacroix, et qui s'endormait en regardant les étoiles ? Je ne le saurai jamais.Poussés à la fois par le hasard et par une de mes fréquentes et fatidiques crises aigües de migraine, lesquelles me forcent à demeurer de longues heures immobile dans le noir, nous nous sommes installés hier dans cette maison vide, de ce quartier résidentiel désert, d'une ville morte dont je ne connais même pas le nom, au hasard de notre voyage sans destination à travers cet État du Sud désormais désolé.
C'est drôle comme tout désormais a perdu son nom. Cette ville, cette femme, ce pays... morts, abandonnés, silencieux, ils ne parlent plus, ne vivent plus, et seul porte encore un nom leur souvenir, bientôt effacé. Tous les noms se sont perdus dans le silence.
De façon assez ironique, avant, le monde moderne me déplaisait, car je le trouvais trop bruyant. La rumeur incessante de la ville, le brouhaha inepte des conversations, le bourdonnement sans fin des machines de toutes sortes, tout cela m'agaçait, et je rêvais de silence. Le silence est désormais intégralement tombé sur le monde. Les machines et les hommes sont désormais muets, figés dans la mort.
C'est un silence qui n'a rien d'apaisant. Un mauvais silence, angoissant, anormal, pesant. Un silence à devenir fou. Et désormais, c'est de sons dont je rêve.Je sursaute en entendant la porte de la chambre s'ouvrir, mais je me rassure immédiatement en voyant Danica passer sa frimousse dans l'embrasure.
Justement, la voilà, ma petite faiseuse de bruit, une des dernières belles musiques au monde.En voyant que je suis réveillé, elle m'adresse un beau sourire en entrant dans la pièce. Danica sourit tout le temps. Ma belle, adorable petite Dani.
« Bonjour Jon. »
Elle parle doucement, d'une petite voix hésitante. Elle sait à quel point les agressions sonores me font souffrir lorsque je suis soumis à ces crises de migraine. À cause – ou grâce ? – à moi, Danica a toujours été une enfant très calme.
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L'étoile qui commence et termine la nuit
FanficHomme doux et anxieux, Jon est bien plus doué pour préparer le thé et s'occuper de sa petite sœur que pour la survie, mais sa rencontre avec une inconnue blessée armée d'un sabre va venir perturber sa tranquillité. Et peut-être même le forcer à affr...