Chapitre 8

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Il n'est aucune blessure que le temps ferme, aucune douleur qu'il ne console.

Charles de Bernard, Le nœud gordien

~ 2 mars 2020 ~

Je me réveille en sueur et en larmes, la respiration saccadée et la gorge nouée. Une boule se forme dans mon ventre, Sevastian est agenouillé en face de moi, le regard fatigué et inquiet. En le voyant mon cœur rate un battement, je me jette dans ses bras et le serre de toutes mes forces, mes battements de cœur sont plus puissants que n'importe qui.

- Oh mon dieu merci.

Mon visage devient rapidement strié de larmes. Sevastian me serre aussi dans ses bras mais je sens qu'il ne comprend pas.

- J'ai cru que je t'avais perdu.

- Non maintenant que je t'ai retrouvé je ne te laisse plus partir.

Une pression immense s'évanouit de ma poitrine, l'air afflue dans mes poumons. Je me lève, ma tête me tourne et ma vision devient noire mais quelques secondes après, elle redevient claire et le visage de Sevastian réapparaît. Ses yeux sont cachés par des mèches brunes, ses cheveux sont en bataille, une naissance de barbe orne son menton et ses joues, il ressemble tant au soldat mort que j'ai vu dans la plaine. En le voyant si vulnérable avec moi... Je le rends faible et je ne peux m'y résoudre.

- Il faut que j'aille marcher. Dors un peu tu as l'air vraiment fatigué, je lui conseille en me levant.

- D'accord mais pas très longtemps et tu me réveilles.

Je hoche la tête, prends mon arc et m'éloigne vers la cascade. La forêt est sinistre chaque bruit est amplifié par les ténèbres environnantes. Je distingue à peine les racines des arbres pour ne pas tomber, à chaque racine que je tape une douleur glisse de ma jambe dans tout mon corps ayant un système nerveux. J'entends la chute de l'eau qui me guide, la lune illumine la cascade et se reflète dans l'eau agitée. Je m'agenouille et plonge mes mains dans l'eau, elle est glacée. L'eau se referme autour de mes mains et les emprisonne dans un étau glacé. La température inférieure à zéro me mord la peau, je la vois devenir rouge puis prendre une teinte violette avant de devenir totalement bleue, sans compter une douleur foudroyante qui me brûle les mains. Je les sors de l'eau, l'air froid de la nuit hivernale parvient à les réchauffer. J'entends un craquement derrière moi, je me retourne les mains toujours devant moi.

- Ça fait mal hein ? me demande l'homme.

Il m'assène d'un coup avec le manche de son couteau dans la tempe et la douleur intense, insupportable, pour mon corps, me fait chavirer dans les profondeurs du monde.

Ma peau s'arrache lorsque j'ouvre les yeux, mes paupières sont soudées à ma peau. Un homme est penché au-dessus de moi, il est blond avec les yeux noisettes, une barbe hérissée, un regard fatigué et une mâchoire carrée. On dirait un animal épuisé d'être pourchassé. Je suis attachée sur une chaise par les poignets, dans la maison que j'ai entièrement vidé.

- Кто ты ?

- Encore un russe, je me plains dans un soupir.

- Tu es française ?

Je ne dis rien, je ne veux pas lui parler. Il se rapproche de moi, je m'écarte tant que je peux.

- Non je suis français aussi, il se défend.

- Alors pourquoi toutes ces armes ? je l'interroge.

- Que tu m'as volé ?

- Survie, je réponds simplement.

Récit de Guerre.  Descente aux EnfersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant